- Noxer a écrit:
- Bref, la participation à cette discussion peut se faire avec des exemples de discours ou vidéos portant une colère, et notre réaction à ceux-ci, ce pourrait être intéressant, ce peut être aussi une réponse aux questions que j'ai soulevées, un approfondissement, ou d'autres interrogations et témoignages.
[violence psychologique, je déconseille la lecture aux personnes sensibles]
Je suis très maladroite dans mes formulations, je n’arrive pas à exprimer clairement ces idées. Il y aura sûrement des biais, si quelqu’un-e a compris le fond de mon propos et le nuance, le complète de manière un peu plus “raisonnée”, je suis preneuse.
J’essaie donc de m’expliquer avec des liens et des exemples précis tirés de mon expérience militante (J’ai passé deux mois à suivre, observer de loin différentes formes de militantisme, à me prendre la violence certain-e-s militant-e-s plein la poire aussi). J’ai envie de donner mon ressenti.
Quelques liens intéressants, je redonnerai ceux que j’ai déjà donnés sur ce topic en m’expliquant plus longuement à leur sujet :
La violence des opprimé-e-s en BD
(Il est question de la violence des suffragettes)
https://emmaclit.com/2016/05/25/la-violence-des-opprime·e·s/amp/
Exemples d’exclusions délibérées de certains groupes :
- La mairie de Paris finance la Maison des Femmes un groupe non-mixte.
- Dans le métro japonais, on trouve des wagons spécifiquement réservés aux femmes.
- Des espaces de parole réservés aux LGBT organisés par le MAG jeunes LGBT.
- Les festivals tels que Nyansapo réservés aux personnes subissant le racisme structurel.
- Les happy men sont un groupe non-mixte d’hommes qui parle du “plancher de verre” et du virilisme dans le monde professionnel.
Autre exemple, sur Twitter avec le hashtag #LGBTbabes :
Des personnes l’ont utilisé pour faire leur coming-out, donner de la visibilité et du courage aux personnes qui vivent dans la peur du fait de leur orientation sexuelle ou de leur dysphorie de genre.
Très vite, des personnes non-concernées (très nombreuses) se sont emparées du hashtag en postant leurs photos, même pour soutenir la cause. Je suis également intervenue maladroitement pour les soutenir.
- Les concerné-e-s ont réagi avec violence, ont expliqué qu’ils s’agissait d’un coming out, qu’il fallait donner de la visibilité aux personnes concernées (l’acte était loin d’être anodin, les personnes franchissant ce pas le font la peur au ventre) et éviter de « noyer » le hashtag.
- Les personnes non-concernées se sont considérées injustement discriminées du fait d’avoir été et exclues du hashtag et ont reproché aux militant-e-s LGBT de reproduire l’exclusion qu’iels dénoncent (rien que ça
)
Autre exemple d’une violence que j’ai reçue : Une militante contre la “grossophobie” (lire à ce sujet “On ne naît pas grosse “ de Gabrielle Deydier qui parle des discriminations systémiques subies par les personnes obèses à l’emploi, aux soins, en milieu scolaire etc.) a fustigé les « conasses minces » qui se servent dans les vêtements grande taille des friperies pour recoudre à le tissu à leur taille privant les personnes obèses des rares vêtements bon marché à leur portée.
S’en est suivi un déferlement de haine : harcelée tous les jours, des menaces de mort, des menaces sur ses enfants je n’ai jamais vu une telle disproportion dans la haine elle a été contrainte de quitter internet et d’aller porter plainte.
Son message m’avait beaucoup énervée au début, mais je me demandais si ce n’était pas simplement faire preuve d’ego de ma part.
Je pourrais crier à la minçophobie, à la cisphobie/hétérophobie pour avoir été traitée de connasse mince, et avoir été exclue d’un hashtag pour être cisgenre
lol. est-ce la même portée, le même impact, le même arrière-plan ? Est-ce que, ce débat clos, ma vie ne continue pas comme avant ? Est-ce la même chose pour elle, les mots ont-ils le même poids ?
Est-ce que ces personnes m’auraient attaqué si je n’avais pas commis certains actes oppressifs (même involontairement)
Vont-elles venir se défouler sur moi pour ce que je suis par essence ou est-ce que je ne me fais pas taper dessus : 1/indirectement pour profiter de leur oppression sociale 2/ quand je fais preuve de maladresse 3/ ne veulent-elles pas m’apprendre quelque chose de leur souffrance (dont j’ignore tout pour ne pas la vivre) au fond ? Est-ce que je les aurais vraiment écouté si elles avaient formulé les choses gentiment ?
4/ est-ce que ces personnes n’ont pas besoin de se créer certains espaces de parole en m’excluant
quand en dehors de ces espaces, c’est moi qui leur tape dessus en profitant de mon privilège social ?
Cyril Hanouna a reçu une violence après son canular homophobe. L’émission Fort Boyard a reçu de la violence suite à son épreuve de la camisole de force (avec son atmosphère « schizophrène »), mais pour prendre conscience de l’ampleur du problème, n’a-t-on pas besoin de cela ?
Je ne suis pas d’accord avec les dires de ces texte mais je me demande ce qu’on en penserait ici :
http://www.non-violence-mp.org/muller/Oppresseurs.pdf
La non-violence face à l’oppression
(L’opprimé a déjà perdu puisque l’oppresseur est plus doué en violence)
À l’autre extrême
https://infokiosques.net/IMG/pdf/SCUM_v2005-pageparpage.pdf
La violence nécessaire face à l’oppression
Un lien intéressant, le point de vue d’une militante que beaucoup ici considèreraient comme radicale :
http://angryaboutthings.tumblr.com/post/126338246010/la-notion-de-victime-dans-un-contexte-doppression
Est-ce que le violeur qui parle de droit sur ton corps et la victime qui crie sont à mettre sur le même plan ? (Comme certains n’ont aucune hésitation à le faire)
J’avais lu sur le rejet du féminisme un message où il était question de tolérer que les hommes s’approprient les corps des femmes parce que les injonctions virilistes sont dures. (J’ai vomi)
Est-ton vraiment sur le même plan, le même degré ?
Je n’arrête pas de citer ce lien, mais il est pour moi une illustration flagrante de ce problème :
http://www.crepegeorgette.com/2016/04/21/non-mixite/
Est-ce que ces femmes deviennent les agresseurs, que penser de la violence de ces situations, (peut-on reprocher à victime de viol de s’être énervée autant qu’à cet homme de l’avoir coupée ?)
On pourrait demander à la victime de viol de se tempérer : médite, fais du sport, prend du Xanax, sois moins dans l’émotion, mais n’est-ce pas franchement hyper agressif de lui dire cela (et n’est-il pas dans un contexte de déni général, de silence, d’auto culpabilisation, comme celui-ci dans son intérêt d’affirmer sa souffrance pour faire prendre conscience d’un grave problème et cela vaudrait le coup de renvoyer même brutalement sa maladresse à son interlocuteur ?) Comme l’explique Emma dans sa BD :
https://emmaclit.com/2016/10/27/le-fond-et-la-forme/
- Spoiler:
Pour prendre un exemple un peu extrême, disons que j’assiste à un meeting des black-lives-matter et qu’en tant que non-concernée, j’y intervienne pour parler « des blancs aussi », les obligeant à
taire le ce pourquoi ils se rassemblent pour se recentrer sur moi, débattre, m’éduquer moi, imaginons que je me fasse rembarrer sévèrement.
Puis-je vraiment me dire que je suis la victime de ces bandes d’hystériques, que la politesse se perd, qu’il faut faire du sport et méditer ?
Ces policings me paraissent aberrants et indécents, en fait.
Est-ce que je ne suis pas en train de renverser les rôles et de m’approprier la souffrance d’un autre ?
N’a-ton pas en enjeu une intégrité fondamentale et de l’autre côté de l’ego.
A-t-on un conflit symétrique ici ?
Peut-on raviver (même involontairement) une souffrance et condamner le cri reçu en retour ?
Autre exemple : tenir des propos maladroits face à une personne en deuil, ces propos ont beau être calme et raisonnés, ils n’en sont pas moins violents (si en retour de ma maladresse, cette personne montre une violence, peut-on parler de défouloir, suis-je victime ? un défouloir implique un soulagement après, est-ce un soulagement que de rentrer en conflit avec une personne pour lui signifier qu’elle enfonce un couteau ?)
Sur Facebook, j’ai rejoint un groupe sur la neuroatypicité, j’ose très peu y intervenir librement ou alors je me renseigne et je mesure bien mon propos avant de m’adresser à ces personnes, je sais que mes mots auront dix fois plus de poids sur un sujet aussi délicat. Je peux aussi faire l’effort de
me renseigner, de beaucoup me renseigner avant de l’ouvrir,
d’écouter d’abord avant d’exiger une pédagogie pour ensuite m’offusquer si jamais elle ne m’est pas gentiment offerte (parce que je serai la dixième à la demander), d’adapter mon langage et tout ira bien (j’étais très maladroite à mes débuts d’alliée des afro féministes, j’ai pris une, deux, trois grosses claques, je me suis renseignée, j’ai appris, je suis retournée militer auprès d’elles en ayant intégré deux-trois choses importantes, et miracle, je ne me fais plus incendier depuis).
Est-ce que ces militant-e-s se défoulent ou est-ce qu’elles essaient de faire prendre conscience un peu brutalement d’un problème minoré, de la maladresse de leur interlocuteur ? Je le visualise comme un cri, le lien de Noxer sur le tone policing le résume bien :
- Citation :
- Un peu comme si un•e médecin urgentiste vous demandait d’être patient•e, alors que vous avez mal. Comme si c’était d’une quelconque aide.
Peut-on faire des symétries en omettant un contexte social global ?
Un conflit symétrique qui impliquerait de la part des victimes d’oppression que cela vaille le coup d’anesthésier leur souffrance, quitte à ce qu’elles soient moins entendue. Est-ce qu’il ne faut pas accepter de se faire un peu engueuler par celle-eux qui se taisent d’habitude si on est maladroit-e ? Dans le cas de la grossophobie, de la transphobie, du validisme, je profite en plus de ces oppressions, je suis immunisée, mes mots pour contredire ces luttes ont symboliquement plus d’impact.
La plus extrême des symétries qu’il m’a été donnée de débattre : un militant de droite me parlait de l’injustice qu’il y avait à considérer l’arrivée des réfugiés comme positive tandis que lui serait perçu comme un colon s’il s’installait dans leurs pays. (J’ai vomi) Conflit symétrique ?
Peut-on omettre un contexte en arrière-plan ? Je vous assure qu’il affirmait cela avec beaucoup de sérieux.
Pourquoi ces féministes extrémistes que l’on compare aux machistes, aux nazis, aux racistes ne vont pas comme ces derniers pourrir des hommes lambdas en dehors de leurs cercles politiques, les violer, les tuer, atteindre à leur intégrité ?
Quelques chiffres :
- Spoiler:
https://aldarone.fr/une-comparaison-entre-misandrie-et-misogynie/
N’est-on pas dans une toute autre perspective ? (défense, auto-émancipation d’un groupe opprimé qui passe par une grille de lecture politique).
Je redonne la synthèse des deux grands types d’antiracisme.
- Spoiler:
À travers ces grilles de lecture je retiens l’idée que :
- Les concerné-e-s créent un espace où iels pourront parler sereinement avec d’autres concerné-e-s d’une expérience sociale, sans être silencié-es. (On ne vise pas les hommes / les blancs/les hétéros/ les non-alcooliques pour ce qu’ils sont, c’est un espace ponctuel de parole ET un outil d’émancipation, on veut avoir de l’espace et s’affranchir ponctuellement de la violence symbolique)
Ce sont
des comportements sociaux que je voudrais combattre, pas une essence d’homme,
on ne reproche pas à quelqu’un ce qu’il est par essence c’est stupide et dangereux
et certain-e-s le font.
S’ils veulent un espace pour parler des injonctions virilistes, je n’ai aucune légitimité à les couper pour ramener le sujet à moi, à les contredire, à m’exprimer à leur place. (J’encourage les hommes à parler du virilisme et à créer des espaces pour combattre ces injonctions, et pas uniquement quand je l’ouvre moi sur vécu)
Les féministes perçoivent les injonctions virilistes comme
coût de la domination viriarcale (je les respecte = je gagne en pouvoir). Le féminisme combat la domination masculine et donc ces injonctions.
Les personnes concernées sont parfois agressives quand je tiens des propos problématiques à l’intérieur de leurs espaces (et il m’est très facile d’en tenir, ne connaissant pas leur situation) : elles me rembarrent.
Comment est-ce que moi je l’interprète : Elles sont blessées. Elles ne viennent pas spontanément m’attaquer pour être ce que je suis par essence bon sang
elles visent ma maladresse blessante dans un contexte d’émancipation, quand moi je ne suis pas concernée, c’est humain.
Je suis capable de le comprendre.
J’ai l’empathie de ne pas m’offusquer.
Ce sont des viviers de souffrance, je les visualise comme un essaim à manipuler délicatement, à connaître un minimum avant de s’y aventurer sans encombres (j’accepte que l’effort vienne de moi qui ne suis pas affectée, si ce problème m’obsède, je peux aussi aller m’éduquer toute seule, Google est vaste)
Il y a des jours où elles auront la patience de répondre avec douceur à mes interrogations, d’autres où elles ne l’auront pas. C’est ce que j’essayais d’expliquer sur le topic du rejet du féminisme avant de me prendre le tone-policing. Le post de Mara sur l’humanité allait aussi en ce sens.
Finalement, je me demande si soutenir ces luttes n’est pas avant tout une question d’empathie et d’ego flexible
je veux dire, si un-e militant-e de black-lives-matter s’emporte contre moi pour avoir tenu des propos maladroits, je suis capable de me taire, de m’excuser et de retenir ma maladresse pour ne plus la refaire (voire même de m’écarter spontanément de son groupe où il est question de problèmes qui ne me concernent pas), ça ne se discute même pas tellement le problème me paraît plus immense qu’un accrochage verbal (dans mon cas personnel, trop d’empathie ?)
Ce qui m’emmerderait, par contre, ce serait de voir un pur défouloir de haine et ça existe, j’ai déjà vu des militantes pratiquer un bullying mesquin avec plaisir envers une personne, ça, c’est inadmissible.
En parlant de bullying, la violence de l’antiféminisme en 2017, en quelques cas concrets :
https://www.lci.fr/societe/decathlon-cyber-harcelee-pour-un-tweet-sur-des-sacs-de-randonnee-2060299.html
http://www.20minutes.fr/high-tech/1996679-20170116-publie-sms-deplace-electricien-orange-fait-harceler-twitter
http://www.terrafemina.com/article/chroniques-de-l-impunite-2-0-un-docu-edifiant-sur-le-cyber-harcelement_a336857/1
(Voir si possible le reportage en question)
https://www.vice.com/amp/fr_ca/article/xyep43/harcelee-par-des-trolls-une-bedeiste-trans-est-forcee-de-demenager
http://mobile.lemonde.fr/big-browser/article/2017/10/31/le-numero-anti-relous-suspendu-apres-une-campagne-de-cyberharcelement_5208419_4832693.html
Menaces de morts envoyées aux créateurs du numéro anti-relou
http://www.europe1.fr/medias-tele/europe-1-agit-contre-la-campagne-de-cyber-harcelement-dont-nadia-daam-est-victime-3482270.amp
La journaliste féministe Nadia Daam dénonce l’impunité des cyber harceleurs et se prend des menaces de mort à son tour, des menaces sur ses enfants, des visites suspectes à son domicile, suspend temporairement son compte twitter.
Suite à ces menaces, la féministe Sophie Gourion appelle les sponsors du forum JVC à se retirer pour faire réagir la modération = 6 sponsors se retirent, Webedia panique et met en place une modération plus sévère.
Sophie Gourion est à son tour menacée, elle est seule et lance des appels aux féministes influentes autour d’elle pour la soutenir et faire bloc, peu de personnes y répondent. Elle regrette et parle de la peur des harceleurs dans la sphère militante.
Elle a quitté le réseau sous le poids des menaces.
C’est cela pour moi un défouloir, la haine. Ce que les cyber harceleurs appellent dans leur jargon un « raid », ils se sentent victorieux ensuite.
En comparaison, lorsque je me prenais des cris d’opprimés en pleine poire, c’était d’un tout autre ordre, c’était une violence beaucoup moins « acide », beaucoup moins dans l’intention de nuire à la personne en elle-même.
Pourquoi cette violence est-elle si peu “policée” d’ailleurs quand une victime de viol devrait faire autant d’efforts ?
Bon sang, ça fait un bien immense d’avoir écrit tout ça.
Je ne lirai pas les réponses qui suivront, bisous.
Bohr je n’avais pas vu ton message sur Anne Hidalgo, j’ai été un peu maladroite dans mon reproche : elle a été immédiatement informée suite à son tweet du programme initial : que les ateliers se tiendraient dans des espaces privés.
Elle a reculé après que les organisatrices aient fait appel à la presse britannique et américaine pour fustiger l’interdiction (ici, c’est pratiqué sans aucun problème, et j’ai rarement vu une ville aussi inclusive et mixte que Londres, à croire que l’intersectionnalité a du bon) pour moi, elle avait déjà été informée de ce que les organisatrices avaient prévu depuis le départ, d’où mon soupçon de mauvaise foi.