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| | Nombre de messages : 357 Âge : 34 Localisation : 00.000.00.0 Pensée du jour : « Il n'y a pas une tête lucide entre deux termes d'un choix. Il y a une nature étrange, en détresse de n'être pas les deux. » Date d'inscription : 22/07/2021 | Nuage-Rouge / Tapage au bout de la nuit Jeu 20 Jan 2022 - 0:33 | |
| - Citation :
- tu admets la possibilité d'une sorte de "sens caché" qui s'exprimerait à travers le sujet sans que celui ait conscience même de la signification de ces comportements.
Non non justement, tu as raison d'y revenir juste en dessous. Je présuppose bel et bien que le sens attribué à l'acte est conscient. Ce qui ne signifie pas pour moi théorisé/intellectualisé. je sais pourquoi je m'habille de telle manière, ça fait sens pour moi, par exemple, mais ça ne signifie pas que j'ai théorisé/intellectualisé ma pratique vestimentaire sur le plan de la mode. Donc pour moi le sens pratique de l'action est conscient et même s'il n'est pas théorisé, il n'est pas pour autant "caché". - Citation :
- Et c'est à cela que je te répondais que selon Aristote (et peut-être moi aussi, je ne sais pas), un acte peut se déployer sans reconnaissance de sa finalité : cette finalité se révélant par l'action même, pas en amont.
Oui c'est bien ce que j'ai supposé donc, mais alors comment ? Quelle est la démonstration ? Quelle action ignore sa propre finalité ? je ne comprends pas. je ne conçois pas. - Citation :
- qu'est-ce qu'on appelle "sens" en fait ?
Oui, c'est vrai, pour moi le "sens" c'est ce qui est porteur d'une signification traduite par une orientation. On fait ceci et pas cela, comme ci plutôt que comme ça. Ce qui n'est pas hasardeux est forcément orienté par quelque chose qui lui donne un sens. La volonté pourrait théoriquement très bien s'exercer au hasard, mais est-ce le cas en pratique ? La volonté s'exerce à travers l'action selon des motivations et les motivations se constituent grâce à une finalité signifiante. Quelles seraient les autres possibilités ? - Citation :
- Est-ce que la signification que tu reconnais partout dans l'agir humain n'est pas la marque d'une interprétation après coup de cet agir.
C'est une hypothèse mais j'y avais pas pensé, je ne crois pas pour ma part. Moi ce qui me préoccupe c'est, dans une perspective plutôt déterministe, la question de la cause de l'action. Il y a 2 possibilités. Soit l'action est volontaire soit elle est involontaire. Si elle est involontaire, la question du sens ne se pose pas (puisqu'en effet je crois que la signification d'une action est liée à sa conscience). Si la cause de l'action est le fruit d'une conscience volontaire, je ne vois pas comment elle peut échapper à la motivation qui trouve ses contenus dans le sens qu'on attribue à la finalité de l'action (ou à sa réalisation même, qui prend la place de la finalité, genre plaisir de réaliser l'action, comme un plongeon par exemple). Mais comment une action volontaire peut elle échapper à la motivation, et comment cette motivation peut advenir hors finalité signifiante ? J'aimerais bien savoir comment en pratique et en exemple la position d'Aristote peut être défendue (si tu en as la conviction, le temps et la motivation bien sûr) * Merci pour tes apports, je suis absolument déterministe (même si je crois que la question du choix en conscience se pose, non pas en ce que le choix émanciperait du déterminisme, qui ne serait qu'une illusion, pour moi il est réel, matériel, mais que la conscience étant inconsciente de ses déterminismes à l'instant t du choix, la question du choix se posera toujours à elle dans l'expérience subjective) donc j'ai l'impression que mon paradigme semble incompatible avec la philosophie de Bergson que tu proposes sur cette question... - Citation :
- Pour lui, le "sens" se découvre dans la construction d'un récit de soi qui tisse des rapports entre les évènements de mon existence et me permet de me projeter dans la signification de ma vie entière.
Ca je n'ai rien à y redire. Ca me semble une observation des manières subjectives de donner du sens à l'existence sur du temps long, hors l'action immédiate. - Citation :
- Le "sens" de la vie est donc en fait à la charnière entre une narration du passé et une projection vers le futur à partir des bases de cette narration. Mais, il est toujours possible de produire des actes qui, par leur nature, n'entre pas dans la narration globale et place ainsi le sujet en état d'incohérence que Ricoeur identifie au malheur. Dans ce cadre, le sens est donc bien une construction a posteriori qui conditionne ma manière de me projeter
Pour moi c'est un raccourcis de présenter ici le "sens de/dans la vie" strictement comme "une construction a posteriori". Car si le sens de la vie, des actions, de l'agir, est à la charnière entre rétrospection et projection, toute action a donc bien une part de projection qui la commande (ce depuis le passé). Ce même si le sens de cette projection est conditionné par une rétrospection. Finalement toute action est projetée et trouve plutôt son sens, a priori, même si ce sens a priori se trouve dans une vision a posteriori de l'existence du sujet (et du sens général de sa vie). Je sais pas si tu vois ce que j'veux dire. Le passé est une ressource signifiante pour orienter/projeter le sens de l'action, ce qui signifie que l'action au présent est bien conditionnée a priori par une nécessité de revêtir du sens. Ca me semble pas contradictoire avec ma position. Edit : par contre je trouve intéressante la piste qu'un défaut de sens dans l'accomplissement des actions de la vie qui pousse à l'inaction involontaire ou à remplacer la motivation volontaire par une contrainte physique ou morale soit cause du malheur. |
| | Nombre de messages : 30 Âge : 39 Pensée du jour : Un autre Lexomil ou pas ? Date d'inscription : 16/01/2022 | Greums / Petit chose Jeu 20 Jan 2022 - 16:17 | |
| - Citation :
- Je crois que tu ne comprends pas ce que j'entends par le sens de l'action, qui dirige l'action. Je doute de ton affirmation. Je ne crois pas que tu aies agi sans but, p-e sans but à long ou moyen terme, mais au moment où tu agis, tu n'agis pas aléatoirement et sans aucune motivation, si ? Si ce qui te met en mouvement n'est ni aléatoire, ni instinctif, il y a forcément un sens qui dirige ton mouvement. Pour moi c'est presque de la logique pure. Y a t il une faille dans ce raisonnement, un contre exemple ?
Je crois qu'il y a deux types de sens qui expliqueraient qu'il y a un sens à l'action dans un cas et pas dans l'autre. Un à long terme qui guide tes pas par une analyse logique de tes actions, vers un but, idéal ou autre (négatif). Et un sur le court terme. Régi par l'instinct. - Citation :
- Si ce qui te met en mouvement n'est ni aléatoire, ni instinctif, il y a forcément un sens qui dirige ton mouvement.
- Citation :
- Pour moi c'est presque de la logique pure.
Ne dit-on pas qu'il y a les viscéraux (moi) et les cérébraux (toi) ? Dans ton cas il y a besoin de conceptualiser un sens au mouvement de tes actions par le biais de la logique pure. Chez moi, pas toujours. Tu le dis là justement : "presque" - Citation :
- mais au moment où tu agis, tu n'agis pas aléatoirement et sans aucune motivation, si ?
Bah si justement ça m'arrive. Mais toujours sur du court terme et après analyse ultérieure de mon action, je peux lui trouver un sens ou non. Exemple : J'ai mon meilleur ami (depuis plus de 20ans) qui est un pur cérébral. Il m’a toujours trouvé un peu con. Il ne peut pas s'empêcher de tout analyser. Il a énormément de mal à ressentir une émotion, sans l'avoir au préalable décortiquée sous le prisme de la logique pure et dure. Et moi je l'ai toujours trouvé un peu con à cause de ça justement. Quand il rentre en conflit avec quelqu'un (souvent avec un viscéral, ce qui est très rare), il est incapable de réagir et est submergé par l'information, là où moi la patate de forain serait partie depuis longtemps. Là où je veux en venir, c'est qu'il y a une part de nous qui est tribale, instinctive et n'a pas de sens de par la spontanéité de l'action. Un peu comme l'envie de tirer un coup... (Au passage désolé de pas pouvoir citer des philosophes comme toi ou AOMPHALOS, mais je n'ai jamais ouvert un bouquin de philo, et je n'ai que mon vécu comme seul bagage pour étayer mes propos. Donc oui ça peut être cru...) Tu classes ça comment toi, la pulsion sexuelle quand tu croises une jolie fille ou un joli garçon en soirée ^^ ? C'est régi par un sens ? Oui et non probablement. - Citation :
- Une action signifiante dont l'objet est justement d'agir sur le sens des actions.
Et inversement. Enfin ce n’est pas ça que dit Aristote ? - Citation :
- un acte peut se déployer sans reconnaissance de sa finalité : cette finalité se révélant par l'action même, pas en amont.
- Citation :
- (puisqu'en effet je crois que la signification d'une action est liée à sa conscience).
Si on parle de conscience dans une action, on peut parler de ce qu'il y a d'encore plus primaire : la conscience. Et partir sur l'acquis et l'inné. Là aussi, deux concepts qui s’opposent je crois ? Mais je m’égard… - Citation :
- Et c'est à cela que je te répondais que selon Aristote (et peut-être moi aussi, je ne sais pas), un acte peut se déployer sans reconnaissance de sa finalité : cette finalité se révélant par l'action même, pas en amont.
- Citation :
- Oui c'est bien ce que j'ai supposé donc, mais alors comment ? Quelle est la démonstration ? Quelle action ignore sa propre finalité ? je ne comprends pas. Je ne conçois pas.
Instinct ! Primitif ! Le cerveau reptilien ! Beaucoup de mes actions m’ont permis de donner du sens à ma vie, sans savoir, sans comprendre ma finalité. On dit : "c'est en forgeant qu'on devient forgeron". A mes yeux le sens se façonne par l'action, surtout quand elle est immédiate. Un nourrisson lorsqu'il pleur pour avoir à manger, et mené par son instinct primaire, sans avoir à donner un sens à ces pleures (son action). Il n'a d'autre finalité que celle de se sustenter, et son corps agit dans l'immédiateté, sans réflexion ou conscience de son action. Et donc, agir est capital pour un "viscéral" (si on tient compte de l'instinct) qui par la réflexion, a posteriori, de ces actions pourra donner un sens à sa vie. Une finalité. En gros conscientiser une action, un "sens", n'a que la valeur qu'on lui donne... Je crois. - Citation :
- Ca me semble une observation des manières subjectives de donner du sens à l'existence sur du temps long, hors l'action immédiate.
C'est pour ça qu’à mes yeux il y aurait deux types de sens à donner à l'action. Ou plutôt une échelle graduée de 0 à la valeur qu’on lui donne. En fait, je crois que le terme de "sens" n'est qu'une conceptualisation qui est propre à chacun pour justifier (ou pas) ces actions en leur attribuant une portée en amont ou en aval. Et plus je vous lis, plus je me dis que ces deux façons de penser tiennent la route... Je vais arrêter la ma contribution, ça me fatigue de me creuser la soupière et je perd trop de temps. ^^ |
| | Nombre de messages : 5448 Âge : 57 Localisation : Paris Pensée du jour : Three blinds rabbits. Date d'inscription : 05/11/2017 | Jdoo / Maîtrise en tropes Jeu 20 Jan 2022 - 19:12 | |
| Le sens c'est ce qu'un sujet met dans un signe pour désigner ce qu'il pense être un objet. ça lui permet de communiquer avec un autre sujet et éventuellement de l'aider à de l'introspection. Le sens, la logique appartient à l'univers du sujet, il n'est donc pas réifiable dans le monde. Le monde transcendant au sujet, n'a pas de sens, et il n'a pas besoin de sens, on va dire qu'il "est", par contre on lui donne bien le sens qu'on lui veut (donc relatif et sans signification absolue). On peut même désigner à l'aide du langage des idées qui n'ont pas de correspondance dans le monde. Et peut être que dans le monde des objets échappent à la parole. L'erreur est de penser que la logique (porteur de sens) et le monde sont superposables et bijectifs. (on ne peut tout simplement pas faire correspondre l'inférence déductive logique avec ce qui nous semble être une causalité.) Dire que je donne du sens au monde, en tant que sujet, pourquoi pas -cela a néanmoins une portée triviale, anecdotique -. Dire le monde a du sens est par contre inapproprié. |
| | Nombre de messages : 5132 Âge : 34 Pensée du jour : ... Date d'inscription : 06/10/2013 | Érème / /quit Ven 21 Jan 2022 - 14:01 | |
| - Citation :
- Non non justement, tu as raison d'y revenir juste en dessous. Je présuppose bel et bien que le sens attribué à l'acte est conscient. Ce qui ne signifie pas pour moi théorisé/intellectualisé. je sais pourquoi je m'habille de telle manière, ça fait sens pour moi, par exemple, mais ça ne signifie pas que j'ai théorisé/intellectualisé ma pratique vestimentaire sur le plan de la mode.
Je vois. Il me semble qu'alors il faut considérer deux possibilités : ou bien la conscience du sens attribué à l'acte en question relève d'un travail réflexif ou bien le sens attribué à l'acte n'est qu'une conscience _vague_ d'une signification admise par acculturation ou éducation. Or, dans ce deuxième cas, le sens ne relève pas de "ma vie" au sens strict, mais d'une signification générale que j'applique par "acculturation" à mes pratiques personnelles. J'imagine que ce n'est pas la même chose de conscientiser pleinement une signification, c'est-à-dire d'y réfléchir et donc de pouvoir l'infléchir, que de simplement avoir une conscience vague de l'inscription de son devenir dans un sens social/culturel plus large. Pour moi, le sujet interroge plutôt le "sens de notre vie" au sens plein, à savoir l'acte réflexif par lequel le sujet se saisit d'une signification et c'est en cela que je disais qu'il me semblait possible d'agir et d'ensuite réflexivement se saisir du sens de son acte ou de l'édifier a posteriori. Oui c'est bien ce que j'ai supposé donc, mais alors comment ? Quelle est la démonstration ? Quelle action ignore sa propre finalité ? je ne comprends pas. je ne conçois pas. Je sors d'Aristote, mais il me semble, par exemple, qu'une pratique artistique peut s'émanciper d'une finalité et l'ignorer même dans une certaine mesure au sens où on entend finalité au sens fort et non pas au sens faible. Le sens fort de la finalité désigne bien l'acte par lequel un sujet, en pleine conscience, considère que son acte vise quelque chose. Quand j'écris, par exemple, il peut se passer quelque chose comme une écriture sans finalité forte (tu pourras toujours me dire que je vise "obscurément" quelque chose dans mon écriture, mais je parle bien d'une conscience forte de ce que je vise) qui, après coup, se révèle comme ayant un sens existentiel ou esthétique. (je réponds au reste quand j'ai le temps !) |
| | Nombre de messages : 5448 Âge : 57 Localisation : Paris Pensée du jour : Three blinds rabbits. Date d'inscription : 05/11/2017 | Jdoo / Maîtrise en tropes Ven 21 Jan 2022 - 14:42 | |
| je suis pas sûr d'avoir bien saisi, je tâche de raccrocher, mais le sens n'est pas forcement lié à la conscience. Une abeille qui revient à la ruche et fait sa danse (langage) et donne du sens (il y a du miel dans cette direction) n'a peut être pas conscience de ce qu'elle fait. Pourtant elle communique bien avec ses semblables et délivre bien une information qui fait sens. Des ordinateurs qui communiquent entre eux, doivent avoir des paquets de bit qui font sens pour pouvoir le traiter. Du reste un ordinateur est l'entité la plus logique que je connaisse en ce bas monde.
La conscience utilise du sens, mais en tant que tel, je ne pense pas que le sens soit suffisant pour la définir. De plus la conscience peut être illogique, paradoxal et contradictoire. Je pense que l'on surestime le sens quelque part. (je ne dis pas qu'il n'a pas son utilité, mais ça reste jamais que du jugement de valeur lié au sujet). mais je ne sais pas si vous parliez de ça. |
| | Nombre de messages : 3131 Âge : 76 Localisation : Paris Pensée du jour : "Là où l'on brûle des livres, on finit aussi par brûler des hommes." Heinrich Heine (écrivain allemand du XIXᵉ siècle) Date d'inscription : 27/01/2020 | Profsamedi / Didon de la farce Ven 21 Jan 2022 - 20:03 | |
| - jdoo a écrit:
- .../... (il y a du miel dans cette direction) .../...
(il y a du pollen dans cette direction) (just a joke for fun) pour détendre l'atmosphère. En toute amicale estime, Philippe. |
| | Nombre de messages : 357 Âge : 34 Localisation : 00.000.00.0 Pensée du jour : « Il n'y a pas une tête lucide entre deux termes d'un choix. Il y a une nature étrange, en détresse de n'être pas les deux. » Date d'inscription : 22/07/2021 | Nuage-Rouge / Tapage au bout de la nuit Lun 7 Fév 2022 - 19:52 | |
| Aomphalos, - Citation :
- une signification admise par acculturation ou éducation. Or, dans ce deuxième cas, le sens ne relève pas de "ma vie" au sens strict, mais d'une signification générale que j'applique par "acculturation" à mes pratiques personnelles. J'imagine que ce n'est pas la même chose de conscientiser pleinement une signification, c'est-à-dire d'y réfléchir et donc de pouvoir l'infléchir, que de simplement avoir une conscience vague de l'inscription de son devenir dans un sens social/culturel plus large. Pour moi, le sujet interroge plutôt le "sens de notre vie" au sens plein, à savoir l'acte réflexif par lequel le sujet se saisit d'une signification
Très intéressant, tu mets le doigt sur le nœud de notre divergence à mon avis, que je pourrais presque identifier à une divergence d'approche entre philo et sciences sociales. En fait ce que tu présentes comme un sens « faible » qui se trouverait dans la culture et qui serait le fruit d'une enculturation puis d'une acculturation (ou tout autre processus d’acquisition/transformation des représentations culturelles) n'est pour moi pas distinguable de ton sens « fort » qui serait le fruit d'un travail réflexif du sujet sur lui-même. Pour moi aucun contenu signifiant ne peut exister en dehors de la Culture, même si le travail réflexif a l'air de chercher à subvertir ou surpasser les déterminismes socioculturels de la personne. Pour moi ce « travail » se trouve bel et bien toujours dans la Culture. Il s'effectue toujours à partir de référents et matériaux culturels, qui sont la matière même du sens. D'un point de vue philosophique, je comprends pourquoi tu fais cette distinction, du point de vue de l'intérieur du sujet, si on cherche à mettre en lumière un travail philosophique de la conscience. Mais d'un point de vue extérieur au sujet, disons celui des sciences sociales, on pourrait dire que le sens produit par le travail réflexif de la conscience à partir de son environnement culturel (soit il une éducation à la philosophie), n'est pas qualitativement différent du sens produit, induit par un conditionnement religieux par exemple. Les deux processus sont des manières de donner du sens à l'existence à travers des matériaux culturels que le sujet confronte plus ou moins intensément à d'autres matériaux culturels, ce qui a pour conséquence de faire varier plus ou moins fortement et rapidement la vision du monde du sujet dans le temps. - Citation :
- une pratique artistique peut s'émanciper d'une finalité et l'ignorer même dans une certaine mesure au sens où on entend finalité au sens fort et non pas au sens faible.
Pour moi le sens issu d'un conditionnement religieux traditionnel n'est pas plus « faible » que celui issu d'une méditation philosophique. Je vois là, dans la hiérarchisation « faible/fort » un biais d'ethnocentrisme. C'est pourquoi je pense que la question culturelle et son approche semble être le nœud de notre divergence. - Citation :
- Quand j'écris, par exemple, il peut se passer quelque chose comme une écriture sans finalité forte (tu pourras toujours me dire que je vise "obscurément" quelque chose dans mon écriture, mais je parle bien d'une conscience forte de ce que je vise) qui, après coup, se révèle comme ayant un sens existentiel ou esthétique.
Pour moi la question du sens n'est pas premièrement à chercher dans le sens propre de ce que tu écris/produis dans ta pratique artistique, mais plus profondément dans le sens que tu mobilises pour pratiquer, pour te mettre en mouvement. L'écriture, l'acte d'écrire, ça a un sens pour toi, au delà même de ce qui est contenu dans ton texte. C'est ta culture qui donne de la valeur ou du goût à cet acte, qui permet ta motivation à le réaliser, à mon avis. Pour moi le sens fort du « sens de la vie » pour une personne ce serait justement ce sens large, primordiale, qui comprend à la fois la dimension réflexive et la dimension « traditionnelle » de ce qui produit du sens pour le sujet, à partir de la Culture. Que ce soit pour renforcer la culture traditionnelle/dominante dont on hérite ou la subvertir à partir de matériaux issu de l'interculturalité ou de (contre-)cultures subalternes.
Jdoo, Pour moi il y a un biais anthropocentrique dans ce que tu dis. Les éléments que tu décris « font sens » pour un humain qui se met à la place des entités que tu décris et qui imagine la situation comme s'il s'agissait d'une interaction humaine. Mais rien ne dit que cette communication organique ou mécanique est perçue comme signifiante aux yeux des entités que tu évoques, que le sens que tu perçois fasse véritablement sens dans leurs relations. Il y a même toutes les chances qu'elle s'effectue de manière automatique et insignifiante. Je ne vois pas tellement comment la question du sens peut se poser hors d'un cadre de conscience. Un ordinateur qui « chiffre » ou « déchiffre » automatiquement des données ne donne pas de sens à son action et à ces données, il (ré)agit comme tel car il est programmé de manière à ce que la circulation électrique dans ses portes logiques produise des effets. Hors du regard humain, cette opération n'a aucun sens. Une « information » peut être traitée de manière automatique sans que l'entité qui reçoit cette information ne lui donne un sens. C'est une relation de cause à effet. D'ailleurs, appeler « information » une relation de cause à effet, c'est déjà pour moi une sorte d'anthropocentrisme. On estime que l'adn est un support de l'information génétique. Mais à l'échelle moléculaire c'est simplement une relation continue de cause à effet qui se reproduit dans le temps et l'espace à travers la vie. Ce n'est une information que pour la conscience observante qui souhaite donner du sens à cette relation. Pour les abeilles c'est la même chose, du moins si les abeilles n'ont pas conscience du « message », de son information en tant que telle, mais qu'elles obéissent simplement à une relation de cause à effet. Nous voyons des informations justement car nous cherchons à donner du sens aux événements et à leurs relations, mais la matière n'a aucun sens en soi et ne recèle aucune information, à mon avis. Pour qu'il y ait information il faut penser arbitrairement, subjectivement, un message, un récepteur et un émetteur. Concevoir de tels rôles dans des relations de cause à effet dans la matière, c'est déjà le produit d'un regard qui attribue du sens à ces relations. - Citation :
- la conscience peut être illogique, paradoxal et contradictoire. Je pense que l'on surestime le sens
je ne crois pas que la production de sens ne réponde à une quelconque nécessité logique (contrairement à ce que je crois comprendre de ton 1er texte). La culture est le processus par lequel le monde perceptible, et même au delà, est saturé de sens pour les êtres humains. Il est même plutôt logique et inévitable que cette saturation, par son principe même, induise des paradoxes et contradictions. Par exemple je peux croire (en) quelque chose, ce qui donne du sens à un élément de ma réalité subjective, sans pour autant n'avoir aucune preuve logique que ce que je crois est fondé, voire même en dépit d'éléments contradictoires invalidant ma croyance. Ce n'est pas un problème pour la conscience. Il est plus important/naturel pour l'esprit de trouver/donner du sens à travers un tas de représentations culturelles, soit elles génératrices de contradictions plus ou moins conscientes, que de rester en défaut de sens (si tant est que ce soit possible). - Citation :
- Dire que je donne du sens au monde, en tant que sujet, pourquoi pas -cela a néanmoins une portée triviale, anecdotique -. Dire le monde a du sens est par contre inapproprié.
Ce qui à mon avis paraît plutôt trivial, anecdotique et abstrait, qui plus est inapproprié du point de vue de l'anthropologie, c'est bien de dire que, pour les humains, le monde n'aurait pas de sens. Que le monde matériel n'ait pas de sens en soi, qu'on postule scientifiquement cette insignifiance ou qu'on échoue à lui déterminer objectivement un sens, d'un point de vue scientifique et matérialiste, c'est une chose. Mais d'un point de vue empirique plus large, qui comprend l'étude des représentations humaines sur ce monde, force est de constater que tous les groupes humains et tous les sujets humains attribuent tout un tas de représentations culturelles signifiantes au monde au sein duquel ils exercent leur (inter)subjectivité. Il n'est donc pas spécialement pertinent d'affirmer qu'en théorie « Dire le monde a du sens est par contre inapproprié », alors qu’empiriquement, le monde recèle de sens pour tous les êtres humains. La réalité anthropologique, c'est bien que le monde a inévitablement du sens pour les humains, ce à quoi fait référence l'introduction de ce sujet, un sens culturellement et psychologiquement situé et déterminé, parfois parallèlement réfléchi, sur lequel il convient d'enquêter infiniment, continuellement et diversement si on s'y intéresse, car par nature, l'humain est un être (parmi quelques autres) continuellement et inéluctablement au prise avec sa Culture. |
| | | Invité / Invité Lun 7 Fév 2022 - 21:01 | |
| qui sait ce que pense la petite fourmi ? comme disait lacan : - lacan a écrit:
- [Elles] ont quelque chose qui les tient ensemble, on ne sait pas quoi d’ailleurs, on en est réduit à dire que c’est l’instinct
vraiment, je le dis, ayant une formation en philosophie, ayant surlu énormément de philosophes et des plus obscurs, que la plupart des questions philosophiques sont complètement inanes le paradoxe de chez lacan, et qui fait de lui à mon avis le plus grand génie parmi les nombreux soi-disant génies français du 20e siècle, c'est qu'il reprend à son compte toutes les manies et simagrées des philosophes mais que, du même coup, il les tourne en dérision avec un grand sens de l'humour et une efficacité philosophique redoutable puisqu'il en profite pour donner une leçon de philosophie je suppose que le but de la vie est d'être satisfait. mais j'en suis pas si sûr. on connaît tous des gens qui cherchent à s'auto-détruire en permanence. sans compter les modes de vie de plus d'un peuple qui laissent franchement à désirer. en sont-ils satisfaits ou heureux ? était-on satisfaits ou heureux au moyen âge ? non seulement ça demanderait de remonter dans le temps, mais il faudrait trouver un consensus sur ce qu'est l'homme moyen du moyen âge (pour ainsi dire) qu'on pourrait interroger là-dessus je suppose que la vie a un sens, mais, bizarrement, sauf pour quelques jungiens, ça ne résout pas beaucoup de problèmes, puisque ça revient à dire que pour être homme et vivant il faut avoir un cerveau. c'est presque comme une évidence. le reste, qui de dire ça, qui de soutenir ci, etc. aucune réponse en impose en ce sens (pour ainsi dire) la question de départ était bien plus sensée (pour ainsi dire) que les débats qui l'ont suivie je suppose que le mien (de sens) est l'écriture |
| | Nombre de messages : 5448 Âge : 57 Localisation : Paris Pensée du jour : Three blinds rabbits. Date d'inscription : 05/11/2017 | Jdoo / Maîtrise en tropes Lun 7 Fév 2022 - 23:36 | |
| Le sujet donne du sens au monde, c'est indéniable, mais ça ne veut pas dire que le monde a du sens. Le sens est au moins relatif au sujet et rien n'indique que cette notion soit appropriée au monde. C'est sûrement pour cela que toutes les définitions du sens de la vie sont hétérogènes. à la rigueur s'il y a avait une convergence dans toute ces définitions on pourrait peut être en tirer quelque chose, comme on peut tirer quelque chose d'une théorie qui modélise la chute d'une pomme. Mais ce n'est pas le cas, donc ce qui semble un passe temps assez vain, c'est de s'acharner à vouloir donner un sens à la vie et au monde (mais bien sûr on peut le faire, comme on peut donner du sens à une pierre, ou une montagne ou une orange posée sur une table). |
| | | Invité / Invité Lun 7 Fév 2022 - 23:48 | |
| pas mieux je ne peux pas m'empêcher ici de copier/coller lacan sur ce sujet : - lacan a écrit:
- La vie, dès qu’on commence à en parler comme telle, quand on prend la vie comme concept, alors là, on se met tous à l’abri tous ensemble pour se réchauffer avec un certain nombre de bestioles qui naturellement nous réchauffent d’autant mieux que, pour ce qui est de notre vie à nous, on n’a aucune espèce d’idée de ce que c’est. Dieu merci, c’est le cas de le dire, il ne nous a pas laissé tous seuls. Depuis le début, depuis la Genèse, il y avait d’innombrables animaux. Que ce soit ça qui fasse la vie, ça a la plus grande vraisemblance. La vie est ce qui nous est commun avec les petits animaux.
Première approximation. C’est beau, la vie, comme vous savez. Ça remue, c’est chaleureux, c’est sensible, c’est bouleversant. Alors on commence à penser, Dieu sait pourquoi, que ça se conserve, la vie. C’est quand même un signe que là, quelque chose passe d’un peu plus sérieux. Pour que ça dure, il faut que ça se conserve, ça fait ce qu’il faut pour se conserver, ce qui commence à compliquer un petit peu plus les choses. Je voudrais quand même essayer de décanter un peu ce qui vous parvient de la psychanalyse, qui n’est pas tellement collée à cette bêtise. Il suffit d’un tout petit peu de jugeote, n’est-ce pas, pour s’apercevoir que ce n’est pas du tout ça, la vie, ce n’est pas du tout forcément ce qui remue, ni ce qui est chatouilleux, ni ce qui fait ce qu’il faut pour se conserver. [...] Elle est toujours l’aboutissement de quelque chose qui d’abord est frayage de sens et, comme on dit, essai de donner à la vie un sens. Alors, la meilleure façon de commencer à lui donner un sens, ce n’est pas de croire que c’est elle-même qui est le sens. Il arrive qu’elle soit l’aboutissement du sens. S’il y a une chose absolument certaine, c’est que ce n’est pas du tout à donner un sens à la vie qu’aboutit le discours psychanalytique. Il donne un sens à des tas de choses, à des tas de comportements, mais il ne donne pas le sens de la vie, pas plus d’ailleurs que quoi que ce soit qui commence à raisonner sur la vie. Quand le biologiste, le behavioriste, considère comment ça se comporte, il peut en effet parler de ce que j’appelais tout à l’heure se conserver, et s’il pousse un peu les choses, il parlera de survie. Survivre à quoi ? Là est la question. Pour ce qu’il en est de l’être parlant, il y a quelque chose qui s’appelle l’acte, et il ne fait pas le moindre doute que le sens, la caractéristique de l’acte en tant que tel, c’est d’exposer sa vie, de la risquer. C’en est strictement la limite. Je ne m’en vais pas me mettre à exposer le pari de Pascal pour dire que la vie, pour qui pense et sent un peu, n’a strictement qu’un sens – pouvoir la jouer. En échange de quoi ? Sans doute d’innombrables autres vies. Il n’en reste pas moins que ce dont il s’agit, c’est de la jouer, c’est de parier. Jusqu’au point où nous en sommes, et dans le discours du maître particulièrement – ça, Hegel l’a fort bien vu – hors du risque de la vie, il n’y a rien qui, à ladite vie, donne un sens. |
| | Nombre de messages : 5448 Âge : 57 Localisation : Paris Pensée du jour : Three blinds rabbits. Date d'inscription : 05/11/2017 | Jdoo / Maîtrise en tropes Mar 8 Fév 2022 - 0:04 | |
| oui et je voulais rajouter un petit truc sur le sens. Le sens c'est ce que le sujet charge dans un signe. Les signes c'est ce que l'on organisent dans un langage. En fait il n'y a pas de sens sans langage. La logique, on va dire que c'est ce qu'il y a de plus formelle comme langage, c'est donc du sens (le vrai/le faux) et de la grammaire. Le sens c'est donc un jugement de valeur. Ou alors c'est imaginer qu'il y a du vrai et du faux en dehors d'un langage, en dehors du signe et donc en dehors du sujet. Si je dis "le chat est dans la cuisine", on sait (ou plutôt on croit) si c'est vrai au faux. mais en tant que tel le chat lui n'est pas porteur de sens, ce qui fait sens c'est le lien que le sujet a fait entre le chat et la cuisine. C'est donc un jugement de valeur. Le chat est au mieux porteur d'ontologie (qui est aussi un jugement de valeur),enfin ça n'a pas beaucoup d'utilité de dire que "le chat est vrai", pris sous cette forme ça serait plutôt à considérer d'un point de vue axiomatique (donc de la grammaire débarrassé de sens). Ou alors il faudrait penser que le "vrai" et le "faux" sont des entités ontologique et appartiennent au monde. Mais en dehors d'une phrase ou d'une proposition, personnellement je n'ai jamais vue le vrai ou le faux. Alors que j'ai déjà caressé un chat. Donc oui pour moi (enfin pas que pour moi, sans vouloir en faire un argument d'autorité) le langage et le sens sont liés (mais je ne parlerais pas de nécessité logique du sens, disons que la logique c'est du sens et de la grammaire). |
| | | Invité / Invité Mar 8 Fév 2022 - 0:17 | |
| mais tu es lacanien ? - lacan a écrit:
- Ce que nous donne l’analyse c’est que la question est personnelle pour chacun des êtres parlants qu’on ferait mieux de dire des êtres parlés, ce qui montre bien que c’est dans le langage que se joue l’affaire pour chacun. Bien sûr que comme on me le fait remarquer il y a des affects, mais c’est du discours qui l’habite que procède l’appréciation juste de chaque affect majeur chez chacun, et ceci d’ailleurs, se démontre du progrès obtenu dans le champ analytique sur un affect aussi important que l’angoisse.
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| | Nombre de messages : 5448 Âge : 57 Localisation : Paris Pensée du jour : Three blinds rabbits. Date d'inscription : 05/11/2017 | Jdoo / Maîtrise en tropes Mar 8 Fév 2022 - 0:25 | |
| Non pas vraiment. Mais la conclusion de Lacan que tu cites, n'est pas en soit "originale" - avec tout le respect que j'ai pour lui-. On les trouves quelque part chez les stoïciens, Berkeley, Descartes,Humes, Husserl, Heidegger, Russell, Wittgenstein, Sartre, Levinas, Merleau-Ponty. Sûrement d'autres. Par contre la contrepartie existe aussi, pour Platon, je pense que le Langage a une valeur plus absolue. Pour lui le vrai/le faux, le beau/le laid etc. sont des absolus. Pour Saint Jean aussi 'Au début était le verbe !' |
| | | Invité / Invité Mar 8 Fév 2022 - 0:30 | |
| oui tu as raison, c'est ce qu'on appelle le structuralisme, un mouvement qui n'a pas vraiment d'inventeurs et qui s'appuie sur beaucoup de choses. en revanche, j'insiste pour dire que les conclusions de lacan sont spéciales |
| | Nombre de messages : 5448 Âge : 57 Localisation : Paris Pensée du jour : Three blinds rabbits. Date d'inscription : 05/11/2017 | Jdoo / Maîtrise en tropes Mar 8 Fév 2022 - 0:32 | |
| je te crois sur parole. je ne connais pas plus que ça. |
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