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 Rejet du féminisme : causes ?

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J'ai répondu bassement hier à la bande dessinée. Ce qui m'ennuie c'est son "toujours", son "à chaque fois", son "n'importe quel mec". Peut-on discuter de la bande dessinée ? Si je dis que je suis d'accord avec le message, je suis en contradiction même avec le message (je suis un homme, je dois trouver un contre-argument !); si je ne suis pas d'accord, alors je suis dans le déni (je cherche un contre-argument); c'est d'une bassesse.
Il n'y a aucun moyen de discuter, à la manière d'une imposition freudienne ou marxiste d'une grille de lecture que ne pas accepter fait penser les analystes au déni.

Quant au "inconsciemment, on préférerait que le problème n'existe pas", je crois plutôt que c'est conscient chez les personnes réagissant ici (je l'espère), c'est une drôle de tournure ?

Enfin, ça ne part pas d'une mauvaise intention, mais que fait-on, avec ça... ?

C'est là, je crois, la violence que Noxer évoque. Je ne crois pas qu'il eut fallu enlever les affiches, je suis plutôt pour cette méthode et je crois que les revendications passent par là. La violence (qu'ils ont perçu avec beaucoup d'exagération ici), c'est l'image de cette bande-dessinée, qui dit "toujours" et qui, au lieu d'ouvrir quelque chose, ferme tout.

Pasiphae, nous étions d'accord, je ne suis pas allé contre ce que tu écris là, et c'est très bien ainsi. Je pense qu'il faut protester en tant qu'humain (enfin c'est un peu tautologique, pas tout à fait, si l'on peut considérer qu'un groupe proteste), pas en tant que femme, ou en tant qu'homme. Parce que l'écueil est ici : la bande dessinée dit : tous les hommes sont sexistes, parce qu'ils agissent ou cautionnent, c'est une idiotie; alors il faut considérer ce que les individus disent. Je ne parle pas de cacher quel est son sexe (cela est fait, parfois), mais de lutter cintre une situation (tout comme je ne crois pas que ce soit le prolétariat et seulement lui qui doive protester contre le capitalisme, dans un cadre marxisme - ou tout du moins, qu'il proteste contre l'injustice - non pas en tant que...). La querelle nominaliste ne permet en chemin que d'exclure des rangs des combattants une frange, pour s'identifier.

Il y a ces phrases que j'aime et que Dostoïevski dit mieux que moi, qui en appelle à ne pas céder à la tentation de faire masse :

« Même être des humains, cela nous pèse – des humains avec un corps réel, à nous, avec du sang ; nous avons honte de cela, nous prenons cela pour une tache et nous cherchons à être des espèces d’humains globaux fantasmatiques. Nous sommes tous morts-nés, et depuis bien longtemps, les pères qui nous engendrent, ils sont morts eux-mêmes, et cela nous plaît de plus en plus. On y prend goût. Bientôt nous inventerons un moyen pour naître d’une idée. »

Et alors je n'ai rien dit contre le regroupement. J'ai dit qu'il restait un regroupement d'individus dont il faut préserver la singularité, plutôt que d'exacerber le fait communautaire de la lutte. - Nous sommes d'accord sur ce que "une femme est une femme", comme disait Karina. Les femmes protestent en tant que la situation est injuste, les hommes protestent en tant que la situation est injuste, ensemble.

Mais je crois qu'on est d'accord jusqu'au bout : j'imagine que cette phrase exaspère tout le monde : "Je suis un homme, mais je m'intéresse au problème".

Quant à la "pensée de la conservation" ("je comprends ce qui est dit, je comprends ce qui doit changer si j'adhère à ce qui est dit, mais je rejette car cela déclenche une déstabilisation de mon système..."), j'ose espérer que nul ne pense ainsi. Parce que wouhou, debout, l'humanité va disparaître dans quelques décennies, réveille-toi...


Dernière édition par GillesdeRais le Mer 30 Aoû 2017 - 10:30, édité 2 fois
 
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Le rejet du féminisme : je pense qu'il y a d'innombrable d'autres problèmes beaucoup plus important malheureusement que celui du féminisme.

Ce n'est pas forcement un rejet mais plutôt une question de priorité.

( ne me faites pas une guerre d'idéologie pour ce que je viens d'évoquer).



 
Hel
   
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Hel  /  Gloire de son pair


Citation :
C'est comme si elles étaient bloquées inconsciemment par une pensée de la conservation : "je comprends ce qui est dit, je comprends ce qui doit changer si j'adhère à ce qui est dit, mais je rejette car cela déclenche une déstabilisation de mon système et ce que je connais."
C'est vrai ce que tu dis ici, enfin ça m'interpelle car je crois que je réagis tout à fait de cette façon parfois. Enfin c'est valable pour beaucoup de domaines.
 
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Noxer  /  Au nom de l'Abeille – Et du Papillon – Et de la Brise – Amen !


Intéressant, Gilles, ton intervention touche exactement à ce que je voulais en venir.
Tu sembles avoir une difficulté à accepter la généralisation, et le mot "systématique" utilisé. Je veux voir ce qu'il se passe derrière ça, je fais pas de psychanalyse à deux balles ni rien. Mais faisons une expérience, veux-tu ? Imagine que dans cette BD, l'auteur(e) avait précisé "certains hommes" et "parfois" au lieu de systématique. Maintenant, sans mauvaise foi, dis-moi ce qui change avec le message délivré par la BD.
Il me semble que rien ne change à ce niveau là ; ce qui change, en revanche, c'est l'impact chez le lecteur. Je réfléchis, pourquoi pourrais-tu penser qu'il y a un besoin de dire certains ? Parce que tu juges que ce n'est pas vrai, que ces choses là arrivent systématiquement (ce dont il est difficile pour toi, avec ton expérience, de poser), ou parce que tu ne veux pas être impliqué, confondu, à quelque chose que tu n'accomplis pas ? Il me semble, avec ton message, que ça rejoindrait plutôt le deuxième cas :

Citation :
Si je dis que je suis d'accord avec le message, je suis en contradiction même avec le message (je suis un homme, je dois trouver un contre-argument !

puisque tu te projettes toi, dans ce que le message dit. Or, cette attitude est ce que j'ai un peu parlé dans mon précédent message : se sentir personnellement visé, et si un peu trop, se sentir agressé. Tu vois où le déplacement d'expérience se fait : au lieu de s'intéresser au message (qui ne change absolument pas qu'il prenne ses précautions ou pas) tu ne t'intéresses qu'à toi, comment toi tu reçois ce message ; au lieu d'écouter comme dans la BD, tu es déjà, alors même que le message est en train d'être délivré, dans une attitude de défense comme lorsqu'on se sent agressé.

Tu dis que ça "ferme" au lieu "d'ouvrir", le penses-tu vraiment ? Il me semble que c'est plutôt toi qui t'y ferme, parce que tu ne veux pas accepter une généralisation, ou quoi que ce soit. Pour moi, dans l'exemple de la BD, il n'y a pas de violence exprimée, je pense que c'est parce que l'on est dans une position d'agressé qu'on perçoit une violence (ça n'est pas tout le temps le cas, je ne peux pas nier la violence que peuvent posséder certains discours féministes/marxistes etc).

(je dis "tu" depuis tout à l'heure, ce n'est pas une attaque ad hominem ni un jugement, c'est une facilité de discours, cela ne désigne pas uniquement et tout le temps toi, c'est quelque chose que j'ai souvent observé chez des gens.)

Citation :
j'imagine que cette phrase exaspère tout le monde : "Je suis un homme, mais je m'intéresse au problème".

Non ? Encore une fois, il ne faut pas se sentir autant dans une situation d'agression.

Citation :
Quant à la "pensée de la conservation" ("je comprends ce qui est dit, je comprends ce qui doit changer si j'adhère à ce qui est dit, mais je rejette car cela déclenche une déstabilisation de mon système..."), j'ose espérer que nul ne pense ainsi. Parce que wouhou, debout, l'humanité va disparaître dans quelques décennies, réveille-toi...

C'est intéressant le problème de l'entropie que tu soulèves, parce que justement c'est une question qui a mis du temps à être acceptée, et on l'a pendant assez longtemps rejetée, avec le même processus de pensée de conservation ; parce qu'on ne voulait pas croire, alors que nous progressions à une vitesse phénoménale, que l'on se rendait vulnérables et qu'un jour tout pourrait s'arrêter à cause de cela (et puis, c'est toujours d'actualité, y'a qu'à voir Trump).
Maintenant, pourquoi penses-tu que ce serait différent avec le féminisme ? J'ai bien dit que c'était un processus inconscient, pas à la manière de Freud mais inconscient parce qu'on se situe dans un système qui nous a habitués à certains gestes et certaines pensées, et que l'idéologie à laquelle on se confronte est un élément perturbateur pour ce même système. La pensée de la conservation, c'est une fois confronté à cet élément perturbateur, le fait d'être dans un déni qui est plus ou moins assumé : soit on dit franchement "non, je n'y crois pas", soit on se retrouve devant, on sait qu'on y croit, mais on tente d'esquiver par l'oubli, par l'inertie, ou par la justification (par exemple, ta justification est que le message délivré n'est pas comme il le faudrait).

C'est je pense quelque chose qui nous touche tous à plusieurs niveaux, ça concerne pas forcément des idéologies, personnellement ça m'arrive très souvent de justifier ma conduite à moi-même alors que je sais très bien qu'elle n'était pas comme je le voudrais ; c'est une manière de me conserver et conserver mon système de pensée parce que sinon je me retrouve à regretter, je me retrouve dans une position instable. C'est de l'analyse, tout ça,hein,  à ce moment je ne réfléchis pas à tout ça en terme de système et de conservation.

Anti, nous n'allons pas te faire la guerre, mais par hasard, as-tu lu la BD à la fin de la page précédente ? Elle concerne justement ta prise de position et je pense qu'après l'avoir lue, tu pourrais développer tes idées plus facilement, et surtout on pourrait les recevoir autrement que jeté dans le tas ainsi Surprised
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Mais non, je n'accepte pas cette systématisation ! c'est outrancier, c'est vil, c'est faux. Le message a certainement sa portée, qui n'est pas celle (totale, absolue) qu'il veut avoir; non, tous les hommes ne se comportent pas ainsi. .. Ce qui change, c'est qu'au lieu de pointer un problème, ils pointent une frange de l'humanité qui n'a rien le droit de dire (oui 'est impossible; non est un déni). Je ne "semble" pas accepter cette généralisation, tu dis juste, mais trop précautionneusement, je refuse cette mise dans le même panier barbare.

La bande dessinée fait bien, sous beaucoup des aspects, et le combat pour l'égalité des hommes et des femmes est juste, méritoire, important; il ne faut pas dire : les hommes (c'était là le sujet de ma contestation depuis le début) comme le fait cette bande dessinée ("tous"), comme il est indigne de dire les femmes, etc.

Je persiste et signe : je vois du meilleur œil et veut participer autant qu'il est possible à la libération des femmes (mes termes sont idiots, parce que je veux qu'ils soient le plus large possible), ce que je conteste, c'est la généralisation bien trop souvent faite (faite ici), car non, je ne me reconnais pas dans ce profil  de "l'Homme" décrit, que j’exècre à bon droit.
Mais je ne dénie rien - qu'on ne croit pas que je nie, ce serait n'avoir pas lu - je répète, à longueur de messages, qu'on touche à un problème décisif, souterrain, gigantesque de notre civilisation.
 
Mâra
   
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Au passage, si je pouvais étaler ma maigre expérience: je ne parle pas trop de féminisme avec des hommes car j'ai peur de les saouler (déjà c'est un bon début hein?) mais quand je le fais, systématiquement, oui, à chaque fois, ça commence par une remise en cause de ce que j'énonce.
Ca peut prendre beaucoup de formes, selon le niveau de déconstruction du gars, son propre engagement en politique et/ou luttes sociales... 
Mais ouais, dès qu'il s'agit de toucher à un comportement qu'il pourrait adopter, ou à un concept nouveau, ou a quelque-chose dont il n'a pas fait l'expérience-et-faudrait-lui-taper-dessus-pour-qu'il-accepte-cette-réalité, il râle. Systématiquement.
J'ai un ou deux contre-exemples mais c'est quoi, une goutte d'eau dans l'océan?

Certes je ne connais pas tous les hommes mais à 21 ans j'en ai quand même rencontrés pas mal alors si ça vous amuse on peut dire TOUS SAUF 1 OU 2 POURCENT sauf que vous vous verrez toujours dans ces un ou deux pourcent et au final vous ne vous sentirez jamais concerné par la remise en cause, alors que ça concerne tout le monde, en fait.

Je ne fais pas de procès au genre masculin, d'abord peu de gens acceptent une idée nouvelle sans contradiction préalable, ensuite, je suis coupable de même sur les questions de racisme ou de handicape entre autres.
Mais c'est une réalité. Alors je veux bien ne pas vous en vouloir, mais stp, au moins, laissez-nous énoncer cette réalité, au lieu de la perpétuer en faisant comme si vous étiez au courant de ce qu'entend une femme lorsqu'elle parle de féminisme.
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Non, mais le fait : tu parles de "un ou deux contre exemples", et bien ne continuons pas (je dis nous par politesse...) à généraliser à outrance, je suis d'accord sur tout cela : c'est très répandu, extrêmement même; le 1% qui existe (j'espère, de tout cœur, pouvoir y être) me parait justifier l'idée de ne pas abuser du "tous".

Si c'est 1%, ce n'est pas systématiquement, quand bien même tu mets le mot en italique, la mathématique garde ses lois.

En termes bêtes : j'ai beaucoup à apprendre de vous (tous les hommes ont à apprendre des femmes sur ce sujet), de grâce, que les autres de bonne foi et moi soyons vus sur le pied de : voyant le problème et considérant les enjeux, ils ont moins d'expérience mais réfléchissent aussi; plutôt que : des hommes, alors ils mécomprennent, faute de quoi la demande d'écoute devient un peu totalitaire.

Ça n'est pas que ça m'amuse (merci de ta compassion), mais qu'il faut respecter les autres.
 
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C'est un peu de la mauvaise foi ça gilles Surprised

Et ça montre aussi une chose, que je rencontre souvent, que ce soit sur le racisme sexisme ou autre : lors d'un échange avec un dominé/lemotquetuveux, les gens veulent être vus par l'autre comme un gentil avant même toute écoute, avant tout dialogue, et ensuite quand on leur donne cela, ça les rassure, et au final il n'écoute plus ce qu'on leur dise, comme si ce que ces gens là cherchaient était simplement se faire voir comme gentil et non vraiment écouter et dialoguer.

Mais si tu veux vraiment être reconnu, il faut d'abord faire un effort toi-même. Là en l'occurrence Mâra t'a expliqué son expérience, et toi, tu t'es buté, et franchement, relis-toi, c'est très difficile de maintenir cette position sérieusement.

Ce "refus d'être mis dans le même panier", c'est aussi et toujours ce dont je parlais plus haut, à propos de l'agression vécue. Il me semble qu'un peu de recul sur soi te ferait le plus grand bien, l'humilité aussi, il ne t'est pas interdit de sortir de ce panier par tes actes et tes paroles.

à propos de la systématisation, je pense (je ne veux pas trop me mouiller là-dessus, je ne suis pas un concerné) qu'à partir du moment où l'on veut dénoncer quelque chose, on s'intéresse plus à ce qui pose problème et non ce qui est déjà acquis. Je ne vois pas l'intérêt, lors d'une dénonciation, d'une analyse, pour une féministe, de dire "il y a des mecs bien". Elle peut le faire autre part, sûrement, et ne soyons pas fous, tout le monde connaît des mecs bien. Mais ça ne sert strictement pas son message, c'est d'autre chose que l'on veut parler : une souffrance, une pensée, etc.

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Oui, on peut faire des maths et admettre que tous - 1 ce n'est pas tous, mais tu te trompes un peu de sujet là Gilles, mon/notre but ça n'est pas de faire reconnaître des vérités mathématiques, c'est de gagner un combat social. Encore une fois, si à chaque occasion on ajoute comme des bécasses sauf l'infimité de mecs naturellement déconstruits ou vraiment très au courant + de bonne volonté, bin c'est simple, chaque fois, tu te dis que tu fais partie de cette infimité, puisque tu es un mec bien (et donc tu ne te remets pas en question).
Là dans la bédé ça ne dit pas que les mecs sont de mauvaise foi et ne veulent pas faire d'efforts, ça dit que les mecs ont une grosse, grosse tendance, à méconnaître l'expérience féminine des rapports h/f.
D'ailleurs c'est bizarre dans ce dernier message tu passes de "tous moins 1 ce n'est pas 1" à "reconnaissez ma bonne volonté", ça n'est pas exactement la même prise de positions.
Peut-être as-tu besoin qu'à chaque revendication on te précise pat pat, tu es un bon gars... mais, je ne sais pas comment te dire ça sans utiliser des tournures méprisantes, en fait, on n'a pas que ça à faire tu vois? On n'a pas que ça à faire de ménager l'ego des membres du corps dominant dans le même temps qu'on leur demande de changer leurs comportements problématiques.
Si tu te considères comme un bon allié, alors utilise cette énergie pour régulièrement checker ton comportement... Je sais que c'est pas évident, moi-même quand je lis les propos des féministes noires envers les femmes blanches j'ai un peu la nausée, mais c'est juste de l'ego tu vois? J'en sais rien de ce que vivent ces meufs et ouais, quand j'y réfléchis, j'ai eu ces comportements qu'elles dénoncent, je suis incluse dans ce "les" si repoussant, parfois, faut juste accepter de ne pas être aussi cool qu'on le croit, ainsi que de se faire mettre une branlée par ceux qui d'habitude se taisent.
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En fait ton message Mâra m'a permis de mettre le doigt sur le problèmes que j'ai parfois avec ce discours et, en fait, avec tous les discours politiques ou visant à dénoncer un "fait" ou un "système", ce problème est qu'il semble extrêmement difficile de proposer un discours non-systématique face à un système. L'on pourrait même considérer, à raison, qu'une telle volonté est absurde parce qu'en tant qu'on veut dénoncer un système (patriarcal par exemple), il est forcé de produire un discours systématique. Derrière ça, il y a un vrai questionnement personnel sur ma capacité à m'intégrer dans des luttes collectives qui m'apparaissent toujours simplificatrices, réductrices de la réalité (parce qu'elles ne peuvent fonctionner qu'ainsi, parce qu'on ne peut pas lutter en rédigeant une thèse,  ou si peu et parce que le doute de soi est une arme assez faible face à tous les types d'oppression).

Mais tout cela je l'accepte quand même, je veux dire, ce n'est pas un argument que j'oppose à la cause féministe ou à n'importe quelle cause. En revanche, tu écris :

Je sais que c'est pas évident, moi-même quand je lis les propos des féministes noires envers les femmes blanches j'ai un peu la nausée, mais c'est juste de l'ego tu vois? J'en sais rien de ce que vivent ces meufs et ouais, quand j'y réfléchis, j'ai eu ces comportements qu'elles dénoncent, je suis incluse dans ce "les" si repoussant, parfois, faut juste accepter de ne pas être aussi cool qu'on le croit, ainsi que de se faire mettre une branlée par ceux qui d'habitude se taisent.

Or là je vois un paradoxe plus profond et problématique. Pourquoi ta "nausée" serait illégitime ? Parce que tu n'as aucune idée de ce que vivent les femmes noires et donc toi, en tant que femme blanche, tu deviendrais illégitime à juger leurs discours. Sauf que si on en reste là, alors le discours des féministes noires, dans ton exemple, devient inefficace politiquement, au sens précis où il ne rend pas possible la "communauté de la cité" puisqu'il te renvoi juste à ton incapacité à penser ce discours, tu serais obligé de l'accepter comme un état de fait, une réalité en soi, non-critiquable parce qu'étrangère à ton vécu. Autant je trouve très légitime la tentative de remise en question de ses propres fondements sociologiques, politiques, etc., autant je crois que c'est une erreur de systématiser cette remise en question sous le prétexte que nous sommes incapable, par principe, de saisir des réalités politiques / sociologiques différentes des nôtres. Il me semble que tous les discours politiques, encore une fois au sens noble du terme, ne fonctionnent que dans la mesure où ils invitent à l'interrogation critique.

Tout ça me renvoie un truc qu'avait dit Claudine une fois je ne sais plus où et qui m'avait frappé sans que j'arrive vraiment à le comprendre à ce moment-là. Elle avait écrit à quelqu'un quelque chose du genre : "je ne pense pas de toute façon qu'un homme puisse se dire féministe" (je prends cette phrase hors de son contexte, aussi bien elle voulait pas du tout dire ce que j'ai compris, mais c'est juste pour l'accroche quoi). Dans l'économie de son raisonnement, je trouvais l'idée intéressante et même pertinente, mais il y avait un arrière-goût étrange dans ces mots-là, quelque chose qui m'allait pas vraiment. Comment peut-on demander à un groupe (les hommes par exemple) de modifier leurs comportements, si on refuse à ce groupe la possibilité de prendre conscience de façon effective, tangible, des raisons justifiant ce changement. Si moi, en tant qu'homme, je suis radicalement étranger à ce qu'être une femme peut signifier, alors tous les changements que je vais opérer dans mon comportement relèveront d'une forme de contrainte ou de soumission absurde à une norme nouvelle. Le combat social que tu mènes Mâra, je pense que tu ne peux le gagner que si c'est le nôtre (pas au sens "le nôtre, homme", mais au sens "le nôtre, citoyen plus ou moins éclairé de la cité que nous partageons").

Bref, tout ça pour dire que même si je comprends ta réponse à GillesdeRais, Mâra, je crois quand même que le "n'importe quel mec" de la BD est problématique et symptomatique d'un truc qui est potentiellement une difficulté de fond de n'importe quel discours politique (je ne pense pas que ça soit spécifique au féminisme). Or, je ne pense pas qu'éviter ce genre de formule soit quelque chose pouvant remettre en cause l'efficacité d'un discours en général, au contraire même puisque ça évite que le discours en question soit attaqué sous cet angle. Mais bon, il est aussi très possible que je me trompe et que mon impression soit la marque d'une incapacité totale à comprendre ce qu'un bon discours politique suppose (et je dis ça sans ironie).

J'ai beaucoup hésité à écrire ici, j'avoue que même un pauvre bonhomme comme moi qui pensait être plutôt juste dans ma manière de vivre avec les autres, je marche un peu sur des oeufs en publiant dans ce sujet et je crains absurdément d'être l'arme inconsciente d'un système de domination. Si c'est le cas je m'excuse platement et je me tais.

PS : Mais sinon, en passant, je suis d'accord avec le reste hein Sad Sad Sad


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Coucou Aomph, t'inquiète. 

Je vais être un peu plus détaillée, cette "nausée" que j'évoque, en dehors des cas où l'on est vraiment insultant, c'est plutôt de l'inconfort à me voir désignée par "les blanches", simplement parce que, bah, c'est pas un truc que j'ai l'habitude d'entendre, pour moi je ne suis pas "les blanches", je suis "les femmes", mais c'est déjà symptomatique du problème, parce que les femmes noires, elles, sont très souvent désignées en référence à leur ethnie: pourquoi pas moi?
En tant que fille blanche j'ai certains avantages et c'est désagréable de s'en rendre compte, désagréable de découvrir d'abord qu'on n'est pas l'Humanité, ensuite qu'on a certains privilèges (des gens ici n'aiment pas ce mot, alors je vais plutôt dire "avantages"), des avantages que je suis la première à dénoncer quand ils concernent mes collègues masculins mais, bizarrement, quand c'est moi, ça fait mal.

C'est gênant de découvrir qu'on a plus de temps de parole que les noires, qu'on reçoit plus de considération que les noires, que personne ne doutera de notre intelligence en raison de notre couleur, qu'on se retrouve presque toujours dans les modèles de beauté au moins en ce qui concerne l'ethnie, que l'histoire de nos ascendants n'a pas été brisée par le racisme et qu'on n'a pas ce passé à porter, qu'on ne sera pas soupçonné de puer juste à cause de notre couleur, bref, qu'en tant que blanche on est invisible dans le bon sens du terme. Et cette invisibilité, on en profite à mort. Et en en profitant, on cautionne ce système. Donc, par notre passivité, on est coupable. Le mot est lâché!

Bref, tout ça ne fait pas plaisir, et grande est la tentation de répondre: "mais non! moi je ne suis pas comme ça" "mais non, moi j'ai vécu ça" "mais non, tu vois le mal partout" "mais non, tu généralises tout". Donc non seulement on a des avantages mais on refuse de s'en rendre compte, en niant le vécu des personnes qui les subissent! C'est une double-peine pour les concernées... C'est là que l'humilité dont je parlais entre en jeu: qu'est-ce que je sais, moi, de l'expérience d'une femme noire? Qu'est-ce que je peux faire sinon me nettoyer les oreilles?

Ensuite y'a l'autre versant, quand des personnes racisées (j'ai pris les noires mais ça concerne autant les maghrébines, les indiennes, les latines, les asiatiques...) deviennent carrément insultantes envers les blanches. Là, je ne sais plus trop comment réagir. La plupart du temps ça se passe sur FB alors je me dis que je n'ai qu'à l'ignorer. Finalement, on ne me vise pas MOI MÂRA, on exprime un sentiment d'injustice, une colère, à laquelle je participe en profitant de mes avantages. On en revient à la "colère légitime" dont on parlait quelques pages plus tôt.

Au final c'est très intéressant parce que le féminisme emploie les mêmes rouages que l'anti-sexisme, et ça permet d'être de chaque côté de la barrière.


PS: et je pense qu'éviter ces tournures affaiblit le discours, oui, parce que lorsqu'on est dans une position privilégiée, on a rarement envie de reconnaître ce privilège. Souvent, il faut que l'extérieur nous englobe de force dans cette situation pour qu'on accepte de la regarder en face. Trop souvent j'ai été confrontée à des hommes qui se disaient féministes mais en profitaient pour avoir des comportements carrément limites (voir abusifs) parce que c'est bon, ils avaient leur badge de gentil garçon... Non, lorsqu'on dit "les hommes", ça concerne "tous les hommes", et puis Dieu reconnaîtra les siens. D'ailleurs en fin de compte il y a toujours du boulot. Personne n'est parfait, voilà. Qu'est-ce que c'est prétentieux de prétendre le contraire!
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On ne peut pas mettre tout le monde dans la même case, tout simplement. C'est peut-être la cause ou qui peut freiner le mouvement féminisme, les hommes sont différents des autres hommes, les femmes différentes des autres femmes. Chacun a ses bons côtés et ses mauvais, mais dans le lot il en ressort toujours des idiots,aussi bien chez les femmes que chez les hommes. Non?

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C'est difficile à croire. Je vous demande, parce que c'est déplaisant et insultant, de ne pas mépriser de vos paroles tous les hommes, pour qu'on puisse discuter sereinement, et l'on me trouve insensé. J'ai posté vingt messages ici, respectueusement, je discute avec tous, je ne me suis pas emporté, je trouve un peu gras de dire systématiquement (le côté mathématique n'est que celui-ci : si tu dis systématiquement, puis : sauf 1%, c'est une contradiction); - je ne viens pas de nulle part cracher ma haine du féminisme, et j'ai tenté de débattre et de discuter du sujet, votre attitude est folle ! Si tu n'as pas "que à faire" de respecter tes interlocuteurs (ce qui est un bon point par lequel attaquer ce sujet), alors tant pis pour nous tous.

Si je dis que ça me gène que l'on dise "chaque homme se comporte mal" (variante douce que : vous êtes tous des cons), il est assourdissant de se voir répondre ainsi en retour;
 
Silence écrit
   
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Silence écrit  /  Péril 666


Gilles, tu as... lu les posts explicatifs précédant ta dernière intervention ?

Tu les as compris ? Tu n'en donnes pas l'impression.
http://silenceecrit.wordpress.com
 
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Lequel ? j'accepte que tu me fasses un reproche, fais-le, guide-moi ! Je n'ai pas "buté" sur l'argument comme le dit Noxer, j'ai dit trois fois que l'argument m'allait. Ce qui m'embête, c'est la méthode. Peu importe.

C'est violent, cette formulation de culpabilité, d'inaptitude à discuter, parce que je serais oppresseur.

Et - c'est évident ! - je suis navré si je passe pour l'empêcheur de tourner en rond, ce que j'ai constaté, c'est l'impossibilité de sortir d'un schème : je suis un oppresseur si je dis non, je suis un oppresseur si je dis oui. Alors, bannissez-moi ! L'entre-soi très bergsonien est à la portée de toute opinion.

J'ai voulu paraître gentil "avant toute écoute" ? cela fait six pages que j'interviens, si je m'en souviens, déjà cela est perdu. Vous voulez parler "d'une souffrance, une pensée", et non pas du vrai et du faux ? alors, effectivement il n'est pas bon de discuter, il n'est pas bon d'échanger. Votre pensée est : les hommes ne nous comprennent jamais ?

Je disais dans mes premiers messages parlons du fond : l'inégalité des salaires, la discrimination par la violence verbale et physique, etc. La condition est qu'on se respecte et qu'on ne parle pas d'entités globales fantasmagoriques (les femmes, les hommes, les "lgbt" ou je ne sais quoi), mais qu'on discute, un à un, du fond. Et je lis "Les hommes réagissent tous et toujours ainsi". Quelle folie que de défendre une telle proposition !


Dernière édition par GillesdeRais le Jeu 31 Aoû 2017 - 11:11, édité 2 fois
 

 Rejet du féminisme : causes ?

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