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 L'édition professionnelle vs l'écriture comme hobby

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Verowyn
   
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Verowyn  /  Gloire de son pair


C'est une réflexion qui m'est venue sur le topic de "j'ai sciemment signé pour du compte d'auteur" mais je ne voulais pas trop faire dérailler le sujet, donc j'ai décidé d'en ouvrir un autre.  Very Happy

Je comprends tout à fait que l'écriture soit un hobby et qu'on n'ait pas de visées professionnelles/professionnalisantes en écrivant.
Pour autant, je ne comprends pas pourquoi ça justifie de se tourner vers un éditeur à compte d'auteur.

On a une personne qui nous dit peu ou prou "j'ai écrit un livre pour mes loisirs, sans réel projet éditorial, mais maintenant qu'il est écrit, ben je cherche à le publier, c'est la suite logique."

Mais est-ce qu'on se rend bien compte que c'est à peu près le seul loisir où, prendre sa première réalisation et s'adresser à une structure professionnelle pour en faire quelque chose est "une suite logique" ?

Si vous faites de la peinture le weekend, vous n'allez pas faire le tour de tous les galeristes de Paris, et quand aucun ne veut vous prendre, décider de payer un "galeriste à compte d'artiste" pour vous exposer, lui signer un chèque, et en plus trouver normal qu'il prenne 90% des revenus sur les toiles que vous vendez.

Si vous apprenez la guitare pour le fun, vous n'allez pas faire le tour des studios de musique avec vos reprises de Nirvana et quand aucun ne veut vous prendre, payer un "label à compte de musicien". et lui céder 90% de la vente de vos albums.

Si vous jouez au foot avec vos amis pour vous détendre, vous n'allez pas vous cherchez un "club à compte de joueur"  pour qu'il vous fasse participer à des matchs internationaux à vos frais et lui laisser empocher 90% de vos cachets.

Bien sûr, la musique, la peinture ou le foot sont des loisirs qui peuvent coûter de l'argent : vous allez avoir besoin de matériel et peut-être vouloir payer des cours ou l'adhésion à un club amateur. Mais en aucun cas vous n'allez payer quelqu'un pour qu'il fasse semblant de vous traiter comme un professionnel de votre activité, vous donne un faux sentiment de légitimité et vende votre travail en en empochant les bénéfices.

Alors pourquoi traite-t-on l'écriture si différemment ?
Je pense qu'effectivement, l'ego a une part là-dedans, mais pourquoi n'y aurait-il pas d'ego dans la peinture et la musique, pourquoi il n'y a que les auteurs qu'on arrive à arnaquer en leur vendant de la poudre aux yeux ?

Eh bien une hypothèse que j'ai c'est que les auteurs ont, par rapport à d'autres personnes qui pratiquent une activité créative en amateur, énormément de mal à juger de leur propre valeur. Et donc ils éprouvent le besoin de se tourner vers des structures qui vont leur donner un sentiment de validation.

En dessin, si vous ne maîtrisez pas la perspective ou les proportions, bah ça va vous sauter aux yeux. Vous percevrez assez facilement les défauts de vos premiers essais, ça vous donnera des pistes pour vous améliorer.
Pareil en musique, si vous faites des fausses notes ou que vous n'arrivez pas à rester dans le rythme, normalement, vous allez vous en rendre compte.
Et même si vous avez un peu de mal à vous auto-évaluer, vos proches pourront assez facilement vous donner des indications. Regarder un dessin et voir que le portrait n'a pas le nez au milieu de la figure, c'est immédiat. Écouter votre nièce jouer Lettre à Élise, ça prend quelques minutes. Donc si vous commencez à vous dire que vous êtes le prochain De Vinci ou Mozart, votre entourage vous ramènera gentiment sur terre en vous conseillant avec bienveillance. Bref, vous comprendrez que c'est peut-être encore un peu tôt pour tenter de faire carrière. Et que si c'est vraiment ce que vous voulez, ça va vous demander du travail.
Par contre, lire un roman, ça prend de longues heures et vos proches n'auront pas forcément le temps ou l'énergie pour ça. Et comme écrire un roman, c'est plus long que faire un dessin ou jouer un morceau, même s'ils vous lisent et qu'ils trouvent que c'est franchement perfectible, ils auront sans doute plus de scrupules à vous le dire cash.

Et c'est sans doute plus difficile de discerner les défauts d'un roman qu'on écrit soi-même pour la même raison : une intrigue incohérente, un style maladroit, des scènes clichés, des personnages superficiels... ça se repère en se relisant, et relire un roman complet, ça prend du temps, ça n'a pas l'immédiateté de s'entendre jouer ou de regarder son dessin. C'est plus facile de se perdre en route et de ne pas voir ce qui cloche.
Et puis pour repérer ces défauts de débutant, encore faut-il avoir un œil entraîné, or les auteurs amateurs ne sont souvent pas de très très grands lecteurs. Alors que les peintres et musiciens du dimanche ont sans doute plus l'occasion de voir des œuvres picturales ou d'écouter de la musique et donc de s'entraîner à avoir un jugement un peu plus critique.
Les auteurs qui affirment ne pas lire ("pour ne pas être influencé") et sont persuadés d'avoir pondu un chef d'œuvre sont légion. Par contre, les jeunes qui montent un groupe de rock, c'est parce qu'ils passent tout leur temps à écouter du rock. Pourquoi cette différence ? Est-il vraiment logique de penser pouvoir exceller dans une forme d'art qu'on ne consomme pas ?


Bref, c'est très cool d'avoir l'écriture comme hobby, ça détend, c'est cathartique, ou juste on passe un bon moment à s'immerger dans le monde qu'on est en train de créer. Mais c'est assez illusoire de penser que son premier essai littéraire aura le niveau pour être vendu par un professionnel. C'est rarement le cas dans d'autres disciplines artistiques où tout le monde conçoit qu'il faut se donner le temps d'apprendre à maîtriser son art. Pourquoi ça serait différent avec l'écriture ?
Ce qui est dommage, c'est que les auteurs débutants ont l'air de penser avoir perdu leur temps si leur premier roman ne trouve pas preneur dans l'édition (et sont donc prêts à signer à n'importe quelle condition pour éviter ça). Est-ce qu'on ne pourrait pas juste se dire que le temps passé à écrire est justifié en soi parce qu'on a pris du plaisir à le faire, comme on aurait pris du plaisir à faire une rando ou de la danse ? Est-ce qu'on est obligé de chercher à le "rentabiliser" en vendant sa production ?

Et souvent, les auteurs à qui on explique que le compte d'auteur va juste leur faire perdre de l'argent mais que leur œuvre ne sera pas traitée avec respect répondent que c'est pas grave, tant que ça leur permet de trouver une petite poignée de lecteurs.
Assez tristement, même une toute petite poignée de lecteurs, ce n'est pourtant pas garanti avec du compte d'auteur où il y a zéro travail éditorial et zéro promotion. À part les proches de l'auteur qui auraient lu son texte sous n'importe quelle forme, même une liasse de feuillets imprimée à la maison, qui achète des livres parus chez des ME obscures avec zéro communication et des couvertures pas au point ?

Je pense donc qu'on serait gagnant avant de se lancer dans un parcours éditorial, à se demander si on est dans une démarche de loisirs et qu'on cherche un éditeur "parce que c'est la suite logique" ou bien si on cherche à se professionnaliser.
Si on est dans une démarche de loisirs, je pense pas du tout que chercher un éditeur soit la suite logique. Pour moi, ça serait bien plus logique de chercher à rencontrer d'autres auteurs avec qui partager sa passion, par exemple dans des ateliers d'écriture dans sa ville, ou en ligne sur des sites et forums. Et de publier gratuitement sur des plateformes en ligne : vous y aurez plus de lecteurs qu'avec du compte d'auteur, en plus des lecteurs investis qui laissent des avis, et vous ne débourserez pas un centime.

Par contre, si l'idée c'est de se professionnaliser, ben alors il faut traiter le plus possible sa pratique artistique de façon professionnelle : accepter que les premiers essais seront rarement concluants, qu'il faut se donner le temps d'apprendre, et aussi de se renseigner sur les autres aspects du métier : pas juste l'écriture mais tout ce qu'il y a autour : les contrats, les corrections, la relation avec l'éditeur...
Et ne pas signer avec n'importe qui. Vous ne paieriez pas vos employeurs pour travailler dans n'importe quelle autre profession. Pourquoi le faire avec l'écriture ?
 
Cleindori
   
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Cleindori  /  Pippin le Bref


Très intéressante question Verowyn :mrgreen: Et qui rejoint une réflexion que je me suis souvent faite…
Je m’explique. Il y a 15/20 ans, je rédigeais des critiques de livres/films pour un site web spécialisé. Je recevais parfois des romans de grandes maisons d’édition pour en faire la critique (ça, c’était cool) et également, de maisons d’édition à compte d’auteur. Et ça, ça l’était moins.
Autant le dire tout de suite : c’était mauvais Shocked . Très mauvais. Tellement mauvais, en fait, que ça m’a fait arrêter d’écrire moi-même, car je reconnaissais dans ces textes tous les défauts que je voyais dans les miens.
Depuis, j’ai repris l’écriture, mais c’est une autre histoire. :mrgreen:
Les rares personnes qui savent que j’écris me disent souvent « et tu vas le faire publier ? », ce à quoi je réponds « si une maison d’édition le trouve assez bon, pourquoi pas, mais c’est pas gagné ». Et la suite logique, et c’est là que ça rejoint ton propos, est souvent « et sinon, tu sais que tu peux publier toi-même ? ». Comme si c’était effectivement une fin en soi.
Ba non. Si un jour mon roman sort de mon ordinateur, ce n’est pas pour quelques exemplaires qui iront décorer ma bibliothèque (pour mon propre ego) et celles de ma famille (parce qu’ils sont sympas et n’osent pas dire non). Ce sera parce qu’il aura été reconnu bon par des personnes dont c’est le métier. Et si ça n’arrive pas, tant pis, je n’aurai pas de regrets (parce que j’aurai essayé, au moins). Et surtout, de toute façon, le plus important, c’est que toutes ces heures passées à écrire, c’est du bonheur personnel (même si parfois on bloque, on s’acharne, la scène ne veut pas venir, les personnages sont récalcitrants…).
Oui, j’écris et, comme tout le monde ou presque ici, j’aimerais être publiée, laisser une trace, qui sait, être la prochaine J.K. Rowling (il faut bien rêver, non ? Very Happy ). Mais je suis totalement réaliste aussi : j’ai beaucoup plus de chances de gagner au Loto. Je pense que le peintre amateur dont tu parles, qui peint pour le plaisir, et qui ne va pas payer une galerie pour qu’elle expose ses œuvres, lui aussi il a dans un coin de son esprit l’espoir qu’un jour, une de ses toiles soit dans un musée… même si ce n’est pas de son vivant :mrgreen:
 
Azaby
   
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Azaby  /  Tentatrice chauve


C'est dingue, j'allais créer exactement le même topic, pour les mêmes raisons ! Tu m'as devancée de quelques heures ! Smile

Je crois que cette obsession de la publication pour de premiers travaux tient à plusieurs facteurs.

1) La difficulté à apprécier le niveau.

Contrairement à d'autres arts comme la musique ou le dessin, il est parfois difficile de voir ou de savoir pourquoi notre œuvre n'est pas publiable. Ça rejoint une conception assez répandue de l'écriture : puisque ça ne sont que des mots, et que tout le monde sait les utiliser pour communiquer au quotidien, tout le monde peut virtuellement écrire. À cela s'ajoute le fait que la plupart des gens sont persuadés (à tort ou à raison, ça n'est même pas une question de juger) que leur vie est digne d'être racontée, d'où l'explosion du nombre d'auto-biographies de primo-auteurs qui ont atterri chez les éditeurs après les confinements.

Il y a donc cette difficulté en premier lieu d'évaluer son niveau. Puisqu'aligner des mots, tout le monde sait le faire : ça n'est pas comme manier un pinceau, sculpter un nez ou aller décrocher une note juste.


2) Le lustre social de la publication

Je pense qu'il y a une aura autour du métier d'écrivain qui hante moins les autres professions. L'artiste-auteur souffre de cet écartèlement paradoxal entre son image d'intellectuel et celle du troubadour. Mais même si les administrations voient plutôt cet aspect troubadour (vous avez déjà essayé d'obtenir un prêt en tant qu'artiste auteur ? Laughing  ), il reste une bonne partie de la population qui voit la publication comme un Graal ultime pour lequel ils seraient prêts à sacrifier leurs économies et leur premier-né.

Il n'y a qu'à voir le nombre de gens qui se foutent d'éditer à compte d'auteur tant que ça leur permet d'avoir un livre avec leur nom dessus. La fierté qu'ont les gens à dire "je suis un écrivain publié" dépasse je pense très largement celle qu'on voit dans d'autres arts. J'ai beaucoup d'amis compositeurs, dessinateurs ou artistes plasticiens et je n'en ai jamais vu aucun s'enorgueillir à ce point d'une mise à disposition de leurs œuvres. De même, quand tu parles de ton métier d'artiste-auteur, beaucoup font les gros yeux en réalisant "attends, mais ça veut dire que tu es publié(e) ? Et en librairie ?".

Je pense donc qu'il y a en effet une solide question d'égo là-dessous. Ce qui n'est pas un mal en soi, mais chez certaines personnes cet égo fait prendre des décisions catastrophiques car, plus que leurs deniers, ils sont surtout prompts à sacrifier les chances de leur texte en l'éditant à compte d'auteur plutôt qu'à le retravailler. Ce qui m'emmène au point suivant :

3) Le monde littéraire en lui-même :

On écrit pour être lu. C'est une évidence, sinon on tiendrait tous des journaux intimes. Un texte qui n'est pas lu est un texte qui a été écrit "pour rien" dans l'imaginaire de la plupart des gens (bien sûr il y a l'expérience, mais que vaut l'expérience quand on s'est saigné pour un texte sans résultat ?). Certaines personnes, soit par ignorance (le plus souvent pour des raisons générationnelles) soit par conviction (par mépris ou parce qu'ils attendent mieux) ne se penchent pas sur les méthodes de publication alternative : Wattpad, forums ou s'ils en ont les moyens personnels et financier, l'auto-édition.

L'édition est pour beaucoup le seul aboutissement possible pour un texte. L'échec est insupportable. Reprendre le texte plus tard alors qu'ils ont déjà tant attendu semble impossible. S'abaisser à l'auto-édition paraît parfois indigne. Reste l'édition à tout prix : et c'est les compte d'auteurs qui se régalent.

Tout ça, bien sûr, c'est lié au dernier point :


4) La place toute particulière qu'a l'écrivain face à son œuvre.


On écrit pas un roman comme on dessine un portrait. Bien sûr certains artistes de haut vol mettent des centaines d'heure sur un dessin ou une toile, mais à expérience artistique comparable, l'écrivain s'investit beaucoup plus dans une œuvre unique. On ne peut pas biffer un roman complet et le mettre à la corbeille comme on froisserait un dessin loupé. Un roman, c'est souvent un an, voire plusieurs années de travail. Ça cristallise des réflexions intimes, ça met en avant une partie de soi souvent vulnérable. Bref, je pense qu'il y a un investissement plus personnel (ou disons plus rapidement personnel dans l'apprentissage) dans nos textes que dans d'autres formes d'art.

Et puisqu'un roman condense des enjeux aussi intimes, a réclamé autant de temps... la perspective de ne pas être lu -  voire pire, refusé de tout le monde - relève de la torture.

Même en tant qu'autrice "semi-pro" qui écrit à mi-temps, je sais la douleur que c'est que d'écrire un texte qui n'est pas publiable. De s'entendre dire (ou de le comprendre par le silence) que le roman n'est pas assez bon en l'état, que ces années de boulot n'ont même pas effleuré le résultat escompté. Pourtant, j'ai du recul et un certain nombre de publications/d'échecs derrière moi. Quand on débute, il est très difficile d'accepter que ces mois de labeur ne donneront pas le résultat rêvé.

Il n'y a que trois choix en réalité : accepter d'attendre pour retravailler, abandonner les perspectives d'édition... ou se résoudre à payer.



A mon avis, c'est l'ensemble de ces facteurs qui crée l'aberration du système qui voit les auteurs en manque de reconnaissance accepter de signer chez des maisons qui ne respecteront pas leurs textes - mais auront tous les égards pour leurs portefeuilles :p - .

J'aimerais bien créer un topic spécial sur les voies de professionnalisation d'ailleurs. Histoire de voir quelle proportion des JE seraient intéressés par un exercice pro ou semi pro de l'écriture... ça pourrait être motivant !


Dernière édition par Azaby le Mer 5 Avr 2023 - 9:56, édité 1 fois
 
Fred Dee
   
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Fred Dee  /  Hé ! Makarénine


Ouah ! Pour le dire très brièvement : je suis tout à fait d'accord avec tout ça. Tes comparaisons avec d'autres arts ou loisirs sont tout particulièrement éloquentes.

Même si elles ont probablement leurs limites. Il y a des musiciens qui reniflent sans doute leur caca en pensant que c'est de l'art et vont essayer de t'imposer leurs accords mal placés sous ta fenêtre pendant la fête de la musique. Ou des peintres du dimanche qui vont faire le tour des expos de villages dans toute la région en espérant vendre quand même leurs croûtes. Bien sûr, dans ces exemples, ils ne vont pas forcément payer pour être vu ou entendu mais ils n'ont pas non plus le recul nécessaire pour cerner leurs défauts, même si ça devrait se sentir au premier coup d’œil ou d'oreille, ou ils vont avoir une attitude un peu hautaine en mode ""oui, c'est conceptuel, c'est un style libre, non-académique, c'est pas pour tout le monde."

Et là, je me dis que ces créatifs sont un peu comme certains écrivains qui vont se tourner vers des ME à compte d'auteur parce que ces dernières usent de la sirène "quand les autres maisons classiques ne vous acceptent pas, nous sommes là pour donner leurs chances à tous les talents" parce que ces talents sont "incompris", tout le monde doit avoir sa chance, etc.

Et là on touche à un gros problème contemporain : le "tout le monde doit avoir sa chance", c'est un peu le quart-d'heure de Warhol qui aurait fait une sortie de route et partirait en tonneau depuis des décennies en mettant un gros bordel dans les consciences sur son passage. C'est PopStar, la Star'Ac, et toutes les émissions de téléréalité qui transforment des connards en influenceurs à un million de followers grâce à une heure de passage à la télé. Ça a tellement l'air à la portée du tout-venant que ça doit être pareil pour tout le reste, même sortir un livre. Et si t'as pas sorti un livre à cinquante ans... vous connaissez la suite. Il y a comme un impératif social à la réussite, à l'accomplissement dans un domaine ou un autre. Mais comme tout le monde ne sait pas chanter, ne sait pas exécuter un passement de jambes sur un terrain de foot, mais plus de 99% de la population sait lire et écrire, bin, tout le monde devrait pouvoir sortir son autofiction ou sa romance soft-porn et trouver un public pour lire ça.

Bon, c'est plus long que ce que je voulais écrire au départ. Mais j'aimerais te poser au moins une question pour mieux connaître ton point de vue, à commencer par celle-ci : penses-tu qu'un auteur "qui ne lit pas pour ne pas être influencé" devrait grandement se remettre en question et peut-être se trouver un autre hobby ? M^me si je vois déjà dans ton texte une solution : ils peuvent simplement revoir leurs ambitions et commencer par montrer ça dans des petits clubs de lecture (comme on va jouer au foot sur son city-stade de quartier plutôt que de tenter direct le stade de France). Mais sont-ce des gens qui arrivent à se remettre en question ?
 
@now@n
   
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OK, nous sommes tous d'accord, je pense, que l'édition à compte d'auteur est la pire solution pour n'importe qui et n'importe quel cas.

Je considère personnellement que l'édition à compte d'auteur est la pire solution pour n'importe qui et n'importe quel cas parce que le faux-éditeur se prend une marge monstre wow j'ai pas cet argent personne a cet argent n'importe quelle solution serait moins chère, et en plus ils mentent ???
Ils sont prêts à vous dire "oui plus personne ne lit en France ah vous avez entendu qu'on pouvait être payés pour la cession de droits de son manuscrit ? Ohohoh et vous n'avez pas pensé que c'était trop beau pour être vrai ? Balivernes que tout cela on n'est plus au XXe siècle c'est une situation qui ne concerne que les gens qui sucent leur éditeur !!" Et tout ça pour quoi ? Pour faire passer la pilule de leurs contrats à 5000 balles pour 100 exemplaires là ???

Je suis en désaccord avec vous sur le fait que c'est la pire solution pour n'importe qui parce que "pour qui se prend cette personne avec son ego gigantesque, si persuadée que son roman est formidable qu'elle est prête à payer pour qu'on l'édite ??"

La France a un problème avec la notion de bouquin. Le Livre Est Sacré. (Il y a des raisons historiques et culturelles à ça, mais ce n'est pas une raison pour traiter cette perception comme un fait naturel et immuable.) Et je pense que c'est la raison pour laquelle vous trouvez ça sale de prendre un roman écrit par soi, d'en faire une maquette prête à imprimer, de lui trouver une couverture, d'en imprimer un exemplaire via une solution de POD et de le mettre dans l'étagère "mes œuvres" de sa bibliothèque personnelle. C'est littéralement la façon la moins exigeante envers le monde extérieur (la moins égoïste !) de se faire ce "plaisir égocentrique" d'avoir écrit "un livre"... sauf si vous croyez qu'Un Livre C'Est Sacré et qu'en conséquence c'est "manquer de respect" au format "pile de papier imprimé et relié" que de faire ça.

Bref, ce dernier paragraphe était moins une participation qu'une digression, parce que nous serons d'accord je pense que quelqu'un qui recourt à un prestataire destiné à "l'éditer" à compte d'auteur n'est pas sorti de cette culture du Livre Sacré non plus : une part du travail du faux-éditeur consiste à le démoraliser et à lui faire croire qu'il est impossible, non seulement à son roman, mais à n'importe quel roman d'exister sur le marché littéraire.

Et une fois que la personne a été démoralisée, qu'elle a signé, c'est un peu tard. Non seulement le fruit de son expression individuelle a été dévalué ("eh votre roman il est pas terrible franchement faudrait me payer pour que je l'édite et encore je vous fais une faveur"), mais en plus le sentiment de "rationalité" et de "sacrifice" qui vient avec le fait de signer le contrat ("c'est vrai, on vit dans un monde un peu nul, pourquoi j'ai cru que je pourrais être édité gratuitement ? Ce n'était pas très raisonnable de ma part") vient se prendre lui aussi une beigne dans la gueule quand cette personne arrive sur un forum d'écriture et commence à bafouiller "Attendez, oui j'ai signé à compte d'auteur, mais moi c'est pas pareil, je suis pas un pigeon."

Bref ce forum a une volonté historique de prévention vis-à-vis du compte d'auteur mais clairement, très clairement, nous ne pouvons pas faire le service après-vente et le bureau des plaintes pour ces prestataires de service aux marges déraisonnables et aux méthodes dégradantes !
http://anowan.blogspot.com/
 
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Citation :
penses-tu qu'un auteur "qui ne lit pas pour ne pas être influencé" devrait grandement se remettre en question et peut-être se trouver un autre hobby ? M^me si je vois déjà dans ton texte une solution : ils peuvent simplement revoir leurs ambitions et commencer par montrer ça dans des petits clubs de lecture (comme on va jouer au foot sur son city-stade de quartier plutôt que de tenter direct le stade de France). Mais sont-ce des gens qui arrivent à se remettre en question ?

Tout a été dit en quelques messages sur ce fil alors, même si elle ne m'est pas adressé, je m'empare de cette question. Non, ils ne se remettront pas facilement en question. Comme Verowyn l'a dit, il y a un impératif pour devenir écrivain : lire, beaucoup. Le regard critique sur un texte littéraire se forge en lisant, pas en écrivant. Des sites Internet comme JE permettent de sauter cette étape en offrant un tas de conseils qui peuvent aboutir à un texte relativement propre, mais qui restera malgré tout pauvre et souvent mal construit.

Ces gens qui ne lisent pas mais veulent publier ce qu'ils écrivent sont donc dans l'impasse, même s'ils l'ignorent. Parce que tant qu'ils n'auront pas forgé leur esprit critique en lisant, ils seront incapables de savoir ce qu'ils font en écrivant.
 
Oxymorel
   
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Oxymorel  /  Clochard céleste


Je me permets d'intervenir sur ce fil qui faisait suite à mon expérience de publication.
La réflexion de Verowyn est très intéressante et je la partage largement.

Néanmoins je ne voudrais pas donner l'impression en parlant de loisir que je prenais cela par-dessus la jambe. Par loisir j'entendais que je n'ai jamais eu, et n'ai toujours pas, l'espoir de faire de l'écriture mon métier, parce que je le pense trop sélectif pour cela. Mais cela ne m'a pas empêché de m'impliquer totalement dans mon projet pendant deux ans. A vrai dire mon premier jet fut assez rapide (environ trois mois) mais ensuite j'ai relu le texte un nombre incalculable de fois pour retravailler les phrases, à l'écrit et à l'oral, pour réagencer les paragraphes. Je lis beaucoup depuis toujours mais là je l'ai fait en m'attachant en tout premier lieu au style. J'ai compilé de nombreux ouvrages sur le sujet dont celui que j'ai préféré et que vous connaissez sans doute, écrit par Antoine Albalat.

Bref je ne saurais dire si mon livre est bon ou non, mais je peux affirmer qu'il résulte d'une élaboration longue et méticuleuse, que je n'appelle pas travail car ce fut pour moi un grand plaisir.
Je suis d'accord que les proches sont de mauvais juges car ils ne sont pas forcément spécialistes et leur avis est biaisé. Pour cette raison je n'ai consulté que ceux dont je pensais l'opinion constructive, et encore ce ne fut pas toujours le cas.
Même parmi les retours intéressants, il est difficile de savoir quoi prendre et quoi laisser. J'ai notamment souvenir d'un passage qui était l'un des préféré d'une amie, alors qu'un autre trouvait qu'il frôlait le ridicule.
De mémoire il s'agissait de l'extrait suivant :

"De tous les endroits de Coline où j’aimerais me perdre, je ne peux observer à loisir que ses lèvres. Je n’avais jamais remarqué à quel point les lèvres de Coline étaient suggestives. Fermée, sa bouche s’accorde avec ses yeux pour l’envelopper d’une mine délicieusement rêveuse, celle de l’élève des Beaux-Arts qui vient de donner un coup de pinceau incontrôlé et se demande si elle doit le masquer ou l’inclure à sa toile. Entrouverte elle gagne en assurance, semble explorer chaque parcelle de son intellect à la re-cherche d’une information précise. Lorsqu’elle l’ouvre franchement, ses dents se multiplient comme les pierres nacrées d’un collier vaudou. Mais quelle que soit la forme qu’elles adoptent, ses lèvres semblent conçues dans un seul but : recueillir mes baisers. Tantôt tendres tantôt fougueux, tantôt pressés tantôt langoureux, tantôt passionnés tantôt routiniers. Peu importe, mes baisers !
Coline arbore un décolleté profond qui met en valeur autant sa poitrine que le petit tatouage qui s’y promène. Coline a toujours eu une jolie poitrine, c’était de notoriété au lycée. Seulement à l’époque elle la cachait sous d’épais pull-overs dont beaucoup se lestaient encore d’une volumineuse poche kangourou. Les temps ont changé : rien qu’un t-shirt blanc, on ne peut plus simple, mais il dessine ses contours avec un érotisme à couper au couteau. Son tatouage – une phrase écrite en caractères d’imprimerie (police Magneto je crois) qui semblent rétrécir à mesure que l’on s’en approche – ondule comme un vicieux petit serpent vous invitant à plonger votre regard dans son hypnotique logis. Ma tête n’aspirerait qu’à s’y enfouir ; l’en retenir astreint mon cou à un effort des plus éprouvants.
La chaleur de l’été méditerranéen constitue une alliée de poids pour dévoiler à mes yeux d’autres sources de gourmandise. Ainsi Coline porte-t-elle une jupe courte et légère. Elle découvre largement ses longues jambes dorées. Assise en face de moi, elle les entrelace de curieuse manière, son pied droit se coinçant derrière son mollet gauche pour former un complexe cadenas humain que je ne demanderais qu’à déverrouiller.
"

Finalement je l'ai gardé, car moi-même je l'aimais bien et les avis divergeaient à son sujet.
 
Mika
   
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Mika  /  Tentatrice chauve


Je suis d'accord avec toi, mais la comparaison peut tout de même marcher avec les autres formes d'art. Des musiciens payent pour enregistrer leur premier disque (qui est nul ou non) puis vont essayer de le vendre eux-mêmes. D'autres payent la location de la salle et y mettent un stand pour vendre leur disque ou leur démo enregistré avec leur propre argent (j'en ai plein des petits CDs amateurs comme ça, c'est assez fréquent). Idem pour la peinture. Tu peux louer une gallerie pour exposer, voire un espace dans un café et donc payer de ta poche pour montrer tes œuvres. Ça ne me semble pas aberrant si c'est la démarche de l'artiste. Certains achètent bien du matériel de ski qui coûte bon-bec. Si c'est leur passion, payer pour montrer leur travail peut être une façon de se faire plaisir et d'aller au bout en quelque sorte. Dans ces exemples, l'auteur, le musicien ou le peintre vont chercher à percer de cette manière ou juste chercher des réactions. Ça peut marcher ou non, mais c'est un choix finalement. Être auteur pro n'est pas comparable à être footballeur pro, c'est très précaire comme job à comparaison et le but à mon avis n'est pas de vouloir être pro et de gagner sa croûte avec son oeuvre, mais d'en faire sa passion à côté. Et peut-être ce côté touche à tout et diffusion par soi-même en fait partie.

Perso je jouais dans un groupe (plusieurs en fait) et on ne se voyait pas rester cantonnés à notre cave. Déjà on payait la location d'un local pour jouer et se retrouver, mais ensuite, c'est grisant de se produire en concert dans des petites salles du coin. Aucun de nous n'avait en tête de devenir pro ou de gagner quoi que ce soit. Peut-être de se rentabiliser avec les entrées (et encore, on s'en foutait). On voulait juste jouer les chansons qu'on avait écrites (et postées en ligne), c'est tout. Je paierais pas 2000 euros pour ça, c'est sûr, mais acheter les instrus, louer la salle de répet, et louer une salle de concert, c'est pas gratuit, mais ça fait parti du délire. C'est une façon de partager son hobby avec ses amis et de vivre sa passion.
 
Arno12
   
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Arno12  /  Clochard céleste


Ce post permet vraiment de faire le point sur ce qu'est l'écriture pour chacun d'entre nous.

Un hobby est une activité de loisirs, dans ce cadre la nous n'avons pas besoin de publier lorsque je fais un gâteau le week-end, je ne deviens pas pour autant pâtissier, mais ça nourrit ma famille et ça me fait plaisir de le faire et parfois les gâteaux sont très bons en plus.

Lorsque c'est une activité que l'on veut professionnaliser il faut effectivement trouver un éditeur à compte d'éditeur pour espérer en tirer un revenu, c'est la que le problème se complexifie, comme beaucoup d'entre vous je ne signerais jamais à compte d'auteur, ni des contrats ou il faut acheter des livres pour rembourser l'impression (Spinelle par exemple). Le monde de l'édition est un monde des affaires, les éditeurs sont des entreprises qui doivent être rentables, et donc il est plus facile d'éditer un livre lorsque l'on est animateur télé et que l'on est connu que lorsque l'on est un illustre inconnu.

A titre personnel si aucun éditeur ne juge mon livre digne d'être publié, il restera dans mon ordinateur, et il ne sera lu par personne, je ne vois pas l'intérêt de le faire lire à mon conjoint ou mes amis qui auront une vision forcement bienveillante puisqu'ils m'aiment (enfin c'est ce que je crois !!).

La solution de faire lire son livre sur une plateforme telle que JE permet d'avoir des avis éclairés et d'améliorer son texte car bien souvent les éditeurs renvoient une lettre type sans prendre le temps (trop de manuscrits reçus, pas assez de temps,....).

Accepter de ne pas être auteur est difficile mais important pour ne pas trop rêver d'être autre chose que ce que l'on est.
 
Chimère
   
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Chimère  /  Constamment Fabulous


Excellent sujet. J'avais justement envie d'évoquer [l'absence de] remise en question chez les artistes, et ça rejoint plutôt bien celui-là.

Comme tu l'as dit, il y a effectivement "l'aura de l'écrivain.e" qui joue beaucoup ; lorsque j'ai été publiée pour la première fois, j'ai vraiment eu affaire à quelques réactions dithyrambiques que j'ai dû calmer (ça fait plaisir, bien sûr, mais c'était tellement tronqué que j'aurais été mal à l'aise de laisser dire).
Avoir son nom sur une couverture apparaît comme une consécration. Et ça l'est, quelque part, pour soi, on ne va pas se mentir ; mais de là à faire n'importe quoi pour l'obtenir, c'est terriblement malaisant.

L'un des maux phares de notre société actuelle, à mon sens, c'est l'absence totale de remise en question chez autrui. Je suis sidérée par cette mauvaise foi et ce déni chez un nombre incalculable de personnes, y compris et surtout dans le domaine artistique.
Je me suis souvent interrogée à ce sujet, et j'ai bien conscience que le déni est plus confortable que de remettre en question une partie de nous-même, de notre croyance en nos propres capacités, ou encore ce manuscrit sur lequel on a travaillé si dur pendant si longtemps. Je ne le sais que trop. Mais de là à s'enfermer dedans ? À s'imaginer trop doué.e pour ne serait-ce qu'écouter les conseils de personnes bienveillantes et plus expérimentées que soi ?

Récemment, on a vu des exemples édifiants sur JE de cette mauvaise foi, de cette absence totale de remise en question. Et bien souvent, cela va de pair avec un niveau médiocre. La cause à effet me semble limpide.
J'ai été cette personne enfermée dans le déni, moi aussi, mais j'avais l'excuse - je pense - de mon âge. Entre 18 et 22 ans, avoir un regard critique sur sa production est compliqué (mais pas impossible, et j'ai une forte admiration à l'égard des très jeunes personnes déjà totalement lucides sur leurs capacités).
Mais quand je vois débarquer ici un nombre inquiétant d'écrivain.e.s ayant dépassé la trentaine et qui s'imaginent que "leur roman va cartonner", que "leur talent sera proclamé, célébré", c'est aberrant.
Surtout lorsqu'iels écrivent comme des collégien.nes.

Comment peut-on imaginer être publié alors que l'on est incapable de respecter la syntaxe de base, de faire des paragraphes, d'éviter cinq répétitions en trois lignes, les lieux communs et les énormes clichés ? Certes, on peut raisonnablement penser que le manuscrit a été plus soigné, mais quelqu'un qui peine déjà à s'exprimer sur un forum a peu de chances d'être le prochain Hugo - ou même le prochain choix d'une ME tout court.
Comment peut-on se persuader qu'on est "trop spécial, trop incompris, trop auteur.e de niche" quand on se fait systématiquement jeter par les ME, les concours ? C'est possible, mais statistiquement très faible.
Comment peut-on penser que sa logorrhée autocentrée, écrite pendant le confinement, mérite d'être publiée ?
À un moment donné, il faut se remettre en question. Encore plus si les autres nous pressent de le faire.

Citation :
Les auteurs qui affirment ne pas lire ("pour ne pas être influencé") et sont persuadés d'avoir pondu un chef d'œuvre sont légion.

Ces gens déclenchent chez moi une incommensurable pitié.


De plus, je ne vois pas l'intérêt de payer pour obtenir un livre. L'argent paie tout, tu peux aussi bien auto-éditer ton manuscrit que quinze pages où tu auras écrit "MEEERDE" en boucle, puisque c'est ton argent. Je ne vais pas me lancer dans un discours sur l'AE ou le compte d'auteur, mais c'est tout de même un biais où tu décides, à la base, que ton roman est suffisamment bon pour mériter d'exister en tant que livre publié. Et que, par extension, il mérite l'attention et l'argent des lecteurs qui vont payer pour un produit fini envers lequel ils auront des attentes concrètes. Or, comme dit plus haut, être (bon) juge de son travail d'auteur.e est une tâche résolument fastidieuse voire impossible. Je ne me sentirais absolument aucune légitimité à payer pour publier quoique ce soit, à décider seule que mon livre est "bon". C'est beaucoup trop facile de se mentir à soi-même.

Je rejoins ce qu'on dit plusieurs d'entre vous sur le fait qu'écrire semble "facile", vu qu'à l'origine, tout le monde sait aligner des mots, que c'est plus simple que de jouer d'un instrument ou de peindre. Mais alors, n'est-ce pas paradoxal que le Livre, l'Auteur.e soient vus comme sacrés ? On les met sur un piédestal, on veut absolument atteindre ce but, tout en s'imaginant que cela sera facile ou du moins, pas trop dur. C'est là que ma logique personnelle échoue à comprendre ce genre de raisonnement bancal.

Je fréquente un autre milieu artistique depuis presque quatorze ans, où j'ai commencé sans talent, en sachant à peine ce que je faisais. La mauvaise foi et l'absence de remise en question y sont courants aussi, mais beaucoup moins que dans le milieu du livre, moi qui croyais pourtant en avoir vu de belles, il m'arrive encore d'être sidérée.
Ce qui me fait le plus de peine, c'est de voir des gens avec un réel potentiel, de l'expérience, un style, des capacités, qui doutent horriblement d'eux en permanence, qui s'en rendent malade, pour qui la remise en question est parfois quotidienne, tandis que le premier péon venu qui s'imagine avoir pondu un chef-d'oeuvre ne remet jamais en question son "talent", voire le proclame partout avec une fière crétinerie.

J'ai envie que JE continue à être un espace communautaire où des membres seront toujours là pour aider et conseiller, c'est extrêmement important ; mais comment ne pas se sentir découragé face à l'abondance d'individus uniquement motivés par une "validation", et qui refusent tout net de considérer un avis autre que le leur, par pure mauvaise foi et absence de questionnement ?
 
Jimilie Croquette
   
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Moi en tous cas, ça me ferait ch*er de dépenser 20€ pour un roman de male-gaze qui ne passe pas le bechdel.

En tant que Lectrice, je compte sur les éditeurs pour faire un premier tri (même si souvent, ce tri n'est pas suffisant). Jamais je n'achète des romans en AE ou en compte d'Auteur parce que personne n'a fait ce tri et que donc, le risque de perdre mon argent est extrèmement élevé.
(il n'est pas nul chez l'édition classique non plus, mais au moins, y'a eu un début de tri).

Mais je ne réponds pas vraiment à la question.
https://linktr.ee/emilie_goudin.lopez
 
Azaby
   
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elopez7228 a écrit:
Moi en tous cas, ça me ferait ch*er de dépenser 20€ pour un roman de male-gaze qui ne passe pas le bechdel.


What a Face What a Face What a Face What a Face
 
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Un roman dont le narrateur est un personnage masculin ne peut tout bonnement pas réussir le Bechdel.
 
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hard disagree
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Chimère  /  Constamment Fabulous


95% de mes romans ont un narrateur masculin, et ils passent le Bechdel.
 

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