Je n’ai pas fait ça.
Cette pensée me traverse l'esprit alors que j'observe, les yeux écarquillés, l'homme à terre. Son corps est pris de soubresauts tandis que de ses mains, il tente désespérément d'arrêter l'hémorragie.
Le métal froid me brûle la paume de la main droite. Tremblante, je lève doucement le bras pour identifier l’objet que je tiens fermement entre mes doigts : un coupe papier totalement imbibé de sang. Je pousse un cri de surprise et lâche mon arme de fortune ; elle atteint le sol sans bruit.
Je me laisse tomber aux pieds de ma victime, le souffle coupé. Comment ai-je pu faire une telle chose ? L’homme agonise sur la moquette. Haletant et le front luisant de sueur, il émet des sons étranges, comme des couinements difficiles. Ses mains sont noyées sous le flot de sang qui s’échappe de sa gorge tranchée. Il fixe le plafond de ses yeux embués et souffrants.
« Oh non » murmuré-je entre deux sanglots.
Je trébuche sur ses pieds et me penche sur son corps.
« Attendez, attendez » supplié-je en poussant ses mains pour les remplacer par les miennes.
Je voudrais le rassurer mais ma voix se brise. Le sang coule abondamment sous mes doigts ; il y en a trop ! La respiration de l’homme a des ratés et son souffle se fait douloureux. Il ouvre la bouche comme pour dire quelque chose mais il ne parvient qu’à émettre un râle effrayant.
« Je suis désolée » hoqueté-je en voyant la vie s’éteindre dans ses yeux.
L’agonie prend fin quelques millièmes de secondes plus tard et son corps s'immobilise dans un dernier soubresaut. Ses yeux, grands ouverts, fixent le plafond d'un air déconnecté. Il est mort.
Je l’ai tué.