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 Les conseils du grand maître.

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Elouan
   
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Elouan  /  JE Lambda. (Cuvée 2012.)


Les conseils pertinents de l'écrivain préféré des français.

http://www.bernardwerber.com/unpeuplus/conseils_ecrivains.html

A vous de juger. Soyez gentil, malgré les apparences ce n'est pas un topic de flood/troll. Vous pouvez répondre intelligemment, aussi.
 
Pianitza
   
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Pianitza  /  Effleure du mal


Déjà, je dis : swag la photo d'en-tête.

Ensuite je résumerai ses conseils à ça :
Lire peut vous permettre de décomposer les structures comme si on démontait un moteur de voiture Mazeratti pour voir comment c'est fait. Cela ne vous empêche pas de construire autrement une Lamborgini.

Et je dis bravo.


Dernière édition par No00 le Lun 28 Oct 2013 - 16:53, édité 1 fois
 
Nywth
   
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Nywth  /  Ex-Ombre passée du côté encore plus obscur.


Citation :
La seule motivation honorable me semble être: parce que l'acte d'écrire, de fabriquer un monde, de faire vivre des personnages est déjà une nécessité et un plaisir en soi (on peut aussi admettre comme motivation: épater une fille dont on est amoureux).
Inutile de dépasser cette fausse branlette intellectuelle, je pense.
 
Manfred
   
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Citation :
11. Ne pas vouloir faire joli
Beaucoup de romanciers surtout en France, font du joli pour le joli. Ils enfilent les phrases tarabiscotées avec des mots de vocabulaire qu'il faut chercher dans le dictionnaire comme on enfile des perles pour faire un collier. Cela fait juste un tas de jolis phrases. Pas un livre. Ils feraient mieux d'être poètes. Au moins c'est plus clair. Toute scène doit avoir une raison d'être autre que décorative. Le public n'a pas (n'a plus?) la patience de lire des descriptions de paysages de plusieurs pages ou il ne se passe rien, ni des dialogues sans informations qui n'en finissent pas. La forme ne peut pas être une finalité, la forme soutien le fond. Il faut d'abord avoir une bonne histoire ensuite à l'intérieur on peut aménager des zones décoratives, mais sans abuser de la patience du lecteur.
Si ça venait d'une autre source, j'aurais dit "certes". Mais venant de Werber: Laughing"et quand la forme tire le fond vers le bas?"

Plus sérieusement, j'ai déjà eu à corriger ce genre de bouquin où l'auteur cherche avant tout à aligner des mots qu'il a cherché dans le disco dans des phrases tarabiscotées et interminables.
C'est effectivement insupportable.
Voire grotesque quand on est le correcteur et que le niveau en français de l'écrivain fait penser à de la surcompensation.


Au fait, Werber est certes l'un des auteurs les plus populaires en France, mais "le préféré" des Français, ce n'est pas lui.
Spoiler:
 
Darid
   
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Moins sérieusement :

Citation :
Plus sérieusement, j'ai déjà eu à corriger ce genre de bouquin où l'auteur cherche avant tout à aligner des mots qu'il a cherché dans le disco...
Smiley avec le bras en l'air qui pointe le doigt comme John Travolta Smile

Le truc de Werber offre un repère à imiter ou dépasser ou contester, ça attire un peu l’œil pour ça je crois. J'ai adoré les fourmis, mais je n'ai pas trop suivi par la suite. Je trouve son écriture efficace et d'une certaine façon "anti-littéraire", rebelle pour les cancres dans mon genre qui on ramé avec les Zola et Balzac, avec la "littérature normale".

Depuis, je me suis un peu réconcilié avec ce que je mettais derrière cette "littérature normale" que Werber bousculait, notamment parce que le champ est bien plus large que je ne le pensais. Je ne raffole toujours pas des histoires qui se passent aujourd'hui, qui fouillent la crédibilité et le reflet du réel, mais je suis parfois moins sectaire.

Je n'ai pas relu les conseils mais d'après ce que je me souviens, ça plait à ceux qui se sentent cancres et ça déplait a ceux qui admirent les "classiques", catégorie pas nette, je peux reformuler en disant que ça s'adresse au fan de sf, c'est plutôt pour une littérature de l'imaginaire.
 
Fisch Ton Kan
   
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Werber me laisse une drôle d'impression. Le bonhomme a l'air tout à fait aimable mais il m'agace quelque peu avec ses vérités toutes faites. « Un bon roman, c'est... Un bon auteur doit... », rah, ça me défrise.
 
Érème
   
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Érème  /  /quit


J'aime assez Bernard Werber, mais je trouve ces conseils assez désespérant. Il me semble que Bernard Werber faute de la même manière que certains de ces détracteurs mondains : il pose une littérature, une écriture, comme plus juste qu'une autre et il construit, je trouve, des oppositions stéréotypées qui ne correspondent pas vraiment à la réalité.

Je suis étonné qu'il pose le "simple", le "compréhensible", la "surprise" et le "suspens" comme les conditions d'un bon livre. On est quand même dans un type très précis de littérature qui ne peut pas se substituer à la diversité des formes d'écritures. Lorsque je lis un roman de Kafka, je ne suis pas particulièrement "surpris", il n'y a pas de "suspens" et Kafka ne cherche pas à être strictement "compris" par son lecteur, cela ne signifie pas que sa littérature est pédante et auto-réflexive ou qu'elle ne parle qu'à une élite intellectuelle et prétentieuse. La critique parisienne qui rejette la littérature de Werber le fait parce qu'elle ne colle pas à certains canons esthétiques, à certaines formes que cette critique voit comme nécessaire à la littérature. Ce rejet est idiot parce qu'il se fonde sur une espèce de dogme de ce qu'il faut aimer, de ce qui est beau, de ce qu'il est juste de lire. Le problème c'est qu'avec cette recette on a l'impression que Werber n'a rien d'autre à opposer à ce dogmatisme qu'un nouveau dogmatisme tout aussi absurde. La volonté d'expliciter ce qu'est pour lui un bon livre, pourquoi pas, mais en faire une liste de conseils à suivre... euh non.

Bref, je me demande si Joyce, Kafka, Beckett, Camus, Dagerman ou Sartre auraient pu écrire leurs livres en suivant ces conseils.
https://aomphalos.wordpress.com/
 
Hobbes
   
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Un fil similaire traîne déjà quelque part, mais impossible de le retrouver malgré recherche.

Bernard Werber a écrit:
Beaucoup de romanciers surtout en France, font du joli pour le joli. Ils enfilent les phrases tarabiscotées avec des mots de vocabulaire qu'il faut chercher dans le dictionnaire comme on enfile des perles pour faire un collier. Cela fait juste un tas de jolis phrases. Pas un livre. Ils feraient mieux d'être poètes. Au moins c'est plus clair. Toute scène doit avoir une raison d'être autre que décorative.
La poésie tresse des guirlandes de jolis mots qui ne veulent rien dire. Merci, Bernard.

Aomphalos a écrit:
La critique parisienne qui rejette la littérature de Werber le fait parce qu'elle ne colle pas à certains canons esthétiques, à certaines formes que cette critique voit comme nécessaire à la littérature. Ce rejet est idiot parce qu'il se fonde sur une espèce de dogme de ce qu'il faut aimer, de ce qui est beau, de ce qu'il est juste de lire. Le problème c'est qu'avec cette recette on a l'impression que Werber n'a rien d'autre à opposer à ce dogmatisme qu'un nouveau dogmatisme tout aussi absurde.
Il ne s'agit pas de dogme, ou, en tout cas, pas dans l'acception péjorative du terme, mais de définition : il n'est possible d'établir une échelle de valeur, c'est-à-dire d'affirmer que tel livre est ou n'est pas bon qu'à partir du moment où une approximation de la littérature émerge. Normal que chacun défende son bout de gras en même temps que ses présupposés théoriques, aussi partiels soient-ils. Werber défend une forme de divertissement générique par et pour lui-même, quand bien même ses bouquins témoignent, à mon avis, d'autres préoccupations plus ou moins — plutôt plus — intériorisées. Quoi qu'il en soit, il faut une grille d'évaluation préalable pour déterminer si un produit coche ou non les bonnes cases. J'enfonce des portes ouvertes, mais on n'accorde de valeur qu'aux œuvres qui s'inscrivent dans notre préconception de l'art : si j'estime que l'oméga de la littérature se situe ici plutôt que là, je pose par principe que telle œuvre vaut mieux que telle autre qui, implicitement, défend une approche plus ou moins contradictoire de ce qu'est l'art et comment le pratiquer. On n'aime que ce qu'on voudrait voir écrit.

Là où le problème se pose effectivement, c'est dans le processus de définition, non seulement parce qu'il peut manquer de profondeur ou de justesse, mais surtout parce qu'on ne construit d'échelle de valeur qu'à partir d'une expérience de lecture. Image qui vaut ce qu'elle vaut, m'enfin : je ne peux pas savoir si je préfère les épices ou la cuisine française avant d'avoir mangé du coq au vin et du chili. C'est la même chose avec la culture : ma définition de la littérature, c'est l'ensemble des livres qui m'ont marqué ; et les livres qui me marqueront, c'est l'ensemble des livres qui répondront à ma définition de la littérature.

L'œuf et la poule, tout ça.

Ah, et c'est très laid, ces sobriquets à connotations géographico-économico-caricaturo-sociales. On n'organise pas d'autodafés pour les têtes de gondole à Paris, et il doit bien se trouver un ou deux lecteurs de Kafka dans la Lozère. Je fais exprès de grossir le trait, mais, bon.

Aomphalos a écrit:
Bref, je me demande si Joyce, Kafka, Beckett, Camus, Dagerman ou Sartre auraient pu écrire leurs livres en suivant ces conseils.
Ils ne les auraient pas écrits, et Werber aurait au moins eu le mérite de nous avoir débarrassé des romans de Sartre. Ce sera son troisième raté après sa carrière littéraire et sa coupe de cheveux.
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Les Chemins de la Liberté de Sartre, et particulièrement Le Sursis, ne sont pas des romans à jeter je trouve (et c'est peut-être parce qu'ils ne sont pas à jeter, que Sartre ne les aimait pas au final :mrgreen: ).

Hobbes a écrit:
Ah, et c'est très laid, ces sobriquets à connotations géographico-économico-caricaturo-sociales. On n'organise pas d'autodafés pour les têtes de gondole à Paris, et il doit bien se trouver un ou deux lecteurs de Kafka dans la Lozère. Je fais exprès de grossir le trait, mais, bon.
Pour le coup, c'est Werber qui cristallise son propos autour d'un rejet de la "critique parisienne" et qui caricature un peu la critique que l'on peut faire de ses livres.

Hobbes a écrit:
Il ne s'agit pas de dogme, ou, en tout cas, pas dans l'acception péjorative du terme, mais de définition : il n'est possible d'établir une échelle de valeur, c'est-à-dire d'affirmer que tel livre est ou n'est pas bon qu'à partir du moment où une approximation de la littérature émerge. Normal que chacun défende son bout de gras en même temps que ses présupposés théoriques, aussi partiels soient-ils. Werber défend une forme de divertissement générique par et pour lui-même, quand bien même ses bouquins témoignent, à mon avis, d'autres préoccupations plus ou moins — plutôt plus — intériorisées. Quoi qu'il en soit, il faut une grille d'évaluation préalable pour déterminer si un produit coche ou non les bonnes cases. J'enfonce des portes ouvertes, mais on n'accorde de valeur qu'aux œuvres qui s'inscrivent dans notre préconception de l'art : si j'estime que l'oméga de la littérature se situe ici plutôt que là, je pose par principe que telle œuvre vaut mieux que telle autre qui, implicitement, défend une approche plus ou moins contradictoire de ce qu'est l'art et comment le pratiquer. On n'aime que ce qu'on voudrait voir écrit.

Là où le problème se pose effectivement, c'est dans le processus de définition, non seulement parce qu'il peut manquer de profondeur ou de justesse, mais surtout parce qu'on ne construit d'échelle de valeur qu'à partir d'une expérience de lecture. Image qui vaut ce qu'elle vaut, m'enfin : je ne peux pas savoir si je préfère les épices ou la cuisine française avant d'avoir mangé du coq au vin et du chili. C'est la même chose avec la culture : ma définition de la littérature, c'est l'ensemble des livres qui m'ont marqué ; et les livres qui me marqueront, c'est l'ensemble des livres qui répondront à ma définition de la littérature.
Le problème n'est pas qu'il affirme ce qu'est pour lui une bonne littérature, qu'il explicite une "grille de lecture" intériorisée, mais qu'il définisse à partir de cette grille une série de "conseils pour les écrivains en herbe" sans sortir de son propre schéma d'écriture (qui est assez répétitif d'ailleurs). C'est assez inhibiteur comme démarche, un petit écrivain en herbe qui chercherait, sans réussir, à coller aux multiples critères de Werber, peut être, à côté de ça, un très bon auteur et avoir une écriture intéressante, etc. Donc oui, il s'agit bien d'un dogme pour moi, au sens où est posé ici un canon esthétique à partir duquel devrait partir "l'écrivain en herbe" pour espérer écrire un bon livre. A aucun moment Werber ne met en perspective ces conseils pour envisager d'autres pistes. Alors forcément, ça colle à une nécessité toute simple : si on admet la relativité de son écriture, on ne peut plus donner de conseil à quelqu'un pour écrire. Donc, pour donner des conseils, il faut forcer imposer un type d'écriture, un type de littérature, une pratique.

Oui, je pense aussi que c'est le processus de définition qui pose problème. Non pas simplement parce que notre définition de la littérature serait plastique, bougerait en fonction des livres lus, mais surtout parce que je pense que l'idée de "définition" est artificielle dans notre rapport au livre. Il ne me semble pas que je m'interroge consciemment sur le cadre définitionnel dans lequel rentre le livre que je suis en train de lire et que je juge à partir de cela de sa qualité. L'appréciation ou non d'un roman est beaucoup plus subtile et spontanée : la grille de lecture n'existe pas vraiment je pense. Plus radicalement encore, ça pose la question de la frontière entre ce qui est et ce qui n'est pas de la littérature : or, je crois que cette frontière est artificiellement posée et qu'elle n'existe pas réellement lorsque nous sommes lecteur. Peu m'importe de savoir si c'est de la "poésie" ou du "roman", que c'est de la "littérature" ou non, il s'agit juste d'éprouver quelque chose face à des mots.

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Manfred
   
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Darid a écrit:
Moins sérieusement :

Citation :
Plus sérieusement, j'ai déjà eu à corriger ce genre de bouquin où l'auteur cherche avant tout à aligner des mots qu'il a cherché dans le disco...
Smiley avec le bras en l'air qui pointe le doigt comme John Travolta Smile
;facepalm;
Darid a écrit:

Le truc de Werber offre un repère à imiter ou dépasser ou contester, ça attire un peu l’œil pour ça je crois. J'ai adoré les fourmis, mais je n'ai pas trop suivi par la suite. Je trouve son écriture efficace et d'une certaine façon "anti-littéraire", rebelle pour les cancres dans mon genre qui on ramé avec les Zola et Balzac, avec la "littérature normale".

Depuis, je me suis un peu réconcilié avec ce que je mettais derrière cette "littérature normale" que Werber bousculait, notamment parce que le champ est bien plus large que je ne le pensais. Je ne raffole toujours pas des histoires qui se passent aujourd'hui, qui fouillent la crédibilité et le reflet du réel, mais je suis parfois moins sectaire.
Les Fourmis est au mieux fadasse; Les Thanathonautes, absolument insupportable tellement c'est mal écrit. Même Barjavel fait mieux. Faut pas verser dans le clivage "les classiques d'un côté, le populaire de l'autre", et fourrer tout ce qui n'est pas "classique" dans le même sac pour pouvoir expliquer les critiques par un argument générique. Ce n'est pas parce que Weber n'est pas "classique" que certains comme moi le trouvent dénué de talent.
Darid a écrit:

Je n'ai pas relu les conseils mais d'après ce que je me souviens, ça plait à ceux qui se sentent cancres et ça déplait a ceux qui admirent les "classiques", catégorie pas nette, je peux reformuler en disant que ça s'adresse au fan de sf, c'est plutôt pour une littérature de l'imaginaire.
Non, encore une fois, rien à voir. Ça déplait lorsqu'on n'aime pas les formules toutes faites et la péremption de quelqu'un qui érige sa propre façon d'écrire comme une définition universelle. Même appliqué à la SFFF, ce qu'il raconte est réducteur et caricatural.

Hobbes a écrit:
Ils ne les auraient pas écrits, et Werber aurait au moins eu le mérite de nous avoir débarrassé des romans de Sartre.
J'aurais préféré que Werber suive le postulat de Sartre dans Les Mots. Là non plus, il n'aurait pas écrit.
 
Hobbes
   
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Aomphalos a écrit:
Le problème n'est pas qu'il affirme ce qu'est pour lui une bonne littérature, qu'il explicite une "grille de lecture" intériorisée, mais qu'il définisse à partir de cette grille une série de "conseils pour les écrivains en herbe" sans sortir de son propre schéma d'écriture (qui est assez répétitif d'ailleurs). C'est assez inhibiteur comme démarche, un petit écrivain en herbe qui chercherait, sans réussir, à coller aux multiples critères de Werber, peut être, à côté de ça, un très bon auteur et avoir une écriture intéressante, etc. Donc oui, il s'agit bien d'un dogme pour moi, au sens où est posé ici un canon esthétique à partir duquel devrait partir "l'écrivain en herbe" pour espérer écrire un bon livre. A aucun moment Werber ne met en perspective ces conseils pour envisager d'autres pistes. Alors forcément, ça colle à une nécessité toute simple : si on admet la relativité de son écriture, on ne peut plus donner de conseil à quelqu'un pour écrire. Donc, pour donner des conseils, il faut forcer imposer un type d'écriture, un type de littérature, une pratique.
Oui, bien sûr, mais c'est le principe de ce genre de posture didactique. Werber donne des clés pour produire ce qu'il considère comme de la bonne littérature, quand bien même ses convictions ne recoupent qu'une infime portion du champ culturel à l'étude. Ce qui, personnellement, m'interpelle, c'est qu'on lui reproche l'exclusivité de son parti pris. Personne n'a l'idée de descendre Boileau, Du Bellay ou Rilke qui, pourtant, défendent eux aussi des pratiques segmentantes de création dont la plupart découlent, en plus, de présupposés que nous ne partageons plus. La distance temporelle et leur aspect canonique participent certainement à une forme de neutralisation, d'autant que Werber ne fait preuve ni d'une grande acuité analytique ni d'une connaissance même minimale de l'histoire de la littérature — mais, après tout, ce n'est pas son propos : il pointe explicitement vers le divertissement en dépit du format —, m'enfin, l'un dans l'autre, on pourrait leur faire le même reproche. L'art poétique est, par principe, prescripteur : privilégier un axe, c'est discriminer tous les autres. Après, c'est sûr que ce genre de discours peut agacer quand son auteur n'a globalement jamais rien sorti que du roman de gare écrit à la moissonneuse-batteuse.

Amphalos a écrit:
Oui, je pense aussi que c'est le processus de définition qui pose problème. Non pas simplement parce que notre définition de la littérature serait plastique, bougerait en fonction des livres lus, mais surtout parce que je pense que l'idée de "définition" est artificielle dans notre rapport au livre. Il ne me semble pas que je m'interroge consciemment sur le cadre définitionnel dans lequel rentre le livre que je suis en train de lire et que je juge à partir de cela de sa qualité. L'appréciation ou non d'un roman est beaucoup plus subtile et spontanée : la grille de lecture n'existe pas vraiment je pense. Plus radicalement encore, ça pose la question de la frontière entre ce qui est et ce qui n'est pas de la littérature : or, je crois que cette frontière est artificiellement posée et qu'elle n'existe pas réellement lorsque nous sommes lecteur. Peu m'importe de savoir si c'est de la "poésie" ou du "roman", que c'est de la "littérature" ou non, il s'agit juste d'éprouver quelque chose face à des mots.
C'est un peu naïf. Évidemment qu'on ne lit pas en se demandant si telle œuvre correspond à telle définition de la littérature, dans quelle mesure et sous quelles conditions on peut lui accorder de la valeur. Pour autant, et je schématise à outrance, les zélotes de la culture comme matériau de divertissement trouveront sans doute plus leur pain chez Stephen King que chez Virginia Woolf. Tout ça en gardant à l'esprit que le jugement de goût est bien sûr infiniment plus complexe et volatile. N'empêche que l'émotion, devant les mots ou non, ne tombe pas du ciel : c'est une donnée conjoncturelle informée dans des circonstances spéciales et personnelles données. Personne ne naît avec une sensibilité lacrymale a priori pour les modernistes, le roman à l'eau de rose ou la poésie du XVIe siècle.

Quod a écrit:
Non, encore une fois, rien à voir. Ça déplait lorsqu'on n'aime pas les formules toutes faites et la péremption de quelqu'un qui érige sa propre façon d'écrire comme une définition universelle.
C'est vrai que pour un yaourt, cinquante ans ça fait long.


Dernière édition par Hobbes le Dim 27 Oct 2013 - 15:42, édité 1 fois
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Hobbes a écrit:

Quod a écrit:
Non, encore une fois, rien à voir. Ça déplait lorsqu'on n'aime pas les formules toutes faites et la péremption de quelqu'un qui érige sa propre façon d'écrire comme une définition universelle.
C'est vrai que pour un yaourt, cinquante ans ça fait long.
Sad  Je ne devrais pas poster les lendemains de cuite. Vous aviez tous compris que c'était une substantivation foireuse de péremptoire.
 
Darid
   
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Darid  /  Barge de Radetzky


Citation :
Les Fourmis est au mieux fadasse; Les Thanathonautes, absolument insupportable tellement c'est mal écrit.
On peut faire la même critique, en changeant les titres, sur n'importe quelles œuvres, c'est juste un "c'est pas bon" à la place d'un "je n'aime pas", le vieux truc sur les goûts let les couleurs.

Les Fourmis sont un peu dans la lignée des œuvres de Jules Verne, l'auteur Werber met en avant une forte culture scientifique employée de façon littéraire, pour produire une histoire imaginaire et lui donner une cohérence.

Dans cette description, on peut reconnaitre ce qui le différencie des "classiques" : "culture scientifique", "imaginaire". Par amalgame, les "grands romanciers" sont plus "mystiques" tout en écrivant des œuvres qui semblent "plus vraies que vraies". C'est une certaine trahison d'inventer en littérature, un "bon" livre doit s'adresser au père/mère qui est en nous, pas du tout à l'enfant, surtout si le lecteur n'en est plus un. C'est à dire avec une forte exigence de "rationalité" malgré l'évidence de la fiction, c'est ce paradoxe qui serait "mystique".

C'est un amalgame bien sûr, les livres n'ont pas des camps comme les apaches ou des forts comme la cavalerie, ils s'inscrivent plutôt dans un univers plutôt imaginaire ou plutôt rationnel, mais ça peut suffire pour expliquer un passage d'un "j'aime/j'aime pas" à un point de vue plus morale sur le "c'est bien ou mal".

Une vision "mystique" de la littérature niera toutes définitions, c'est "sacrilège" en quelques sorte, juste d'en avoir l'idée, alors qu'un point de vue plus scientifique les accumulera et les mettra à l'épreuve des faits.

Quelles ouvrages sembleraient suivre les conseils de Werber ? Je ne suis pas sûr qu'ils excluent les "classiques", quelques soient les ouvrages que l'amalgame du mot puissent y placer. Quelles ouvrages ne correspondent pas du tout à ses conseils d'écriture ?
 
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Darid a écrit:
C'est un amalgame bien sûr, les livres n'ont pas des camps comme les apaches ou des forts comme la cavalerie, ils s'inscrivent plutôt dans un univers plutôt imaginaire ou plutôt rationnel, mais ça peut suffire pour expliquer un passage d'un "j'aime/j'aime pas" à un point de vue plus morale sur le "c'est bien ou mal".

Une vision "mystique" de la littérature niera toutes définitions, c'est "sacrilège" en quelques sorte, juste d'en avoir l'idée, alors qu'un point de vue plus scientifique les accumulera et les mettra à l'épreuve des faits.
Le jugement de goût n'est pas un opinionisme. Dans l'absolu, affirmer qu'une œuvre est ou n'est pas de bonne facture revient à dire qu'elle remplit certains critères esthétiques dont on estime qu'ils sont l'apanage d'une discipline donnée. Oui, je rabâche. Toujours est-il que les notions de bon ou de mauvais, qui n'ont pas grand-chose à voir avec celles de bien et de mal, ne sont pas des concepts moraux, mais qualitatifs.

Ton passage sur la mystique me paraît plus ou moins confus, mais, dans l'absolu, il me semble que ses prémices se résolvent dans ce genre d'amalgame. Je ne pense pas que ça tienne.

Au reste, affirmer un socle objectif au jugement de goût recoupe exactement la démarche scientifique que tu parais défendre uniquement sous le rapport technologique. Les sciences humaines sont, comme leur nom l'indique, des sciences, et peuvent elles aussi prétendre à un discours rationnel en marge des mystiques poncives et des imaginaires fulgiineux. Quant à envisager la fiction de genre comme fantaisie scientifique et le corpus canonique comme, peu ou prou, produit d'un réalisme plus ou moins enjolivé, c'est un clivage simpliste et globalement inopérant dans l'histoire de la littérature, à plus forte raison depuis le XXe. Pas sûr de comprendre le reste — c'est vraiment confus — mais réduire la qualité d'une tradition, mettons : scientifiste à sa pertinence théorique me paraît plus que douteux aussi. Je doute d'ailleurs que Werber y prête grande attention, ou alors le brahmanisme, la numérologie, les mythes grecs et la physique quantique ont fait des enfants sans m'envoyer de faire-part.

Darid a écrit:
Quelles ouvrages sembleraient suivre les conseils de Werber ? Je ne suis pas sûr qu'ils excluent les "classiques", quelques soient les ouvrages que l'amalgame du mot puissent y placer. Quelles ouvrages ne correspondent pas du tout à ses conseils d'écriture ?
À peu près l'intégralité du patrimoine littéraire, ce qui n'a d'ailleurs rien d'étonnant vu la multiplicité des écoles et l'âge de la discipline. Ce serait également sans compter que Werber défend une esthétique du divertissement plutôt que de l'art, auquel, choix délibéré ou non, il ne s'intéresse jamais. La poésie comme enjolivure, le roman comme discours fantaisiste, c'est une fenêtre ultra-réduite et bourgeoise — gros mot, pardon — du phénomène artistique. Il existe forcément des accointances marginales, mais je doute que tu trouves des exemples concordants ailleurs que chez les tenants de la culture comme passe-temps : le format est littéraire, mais le projet ne l'est pas. De l'entertainment générique, donc.
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Darid  /  Barge de Radetzky


Ce que j’appelais "mystique" c'est le fait qu'une œuvre soit une fiction assumée mais refuse l'imaginaire.

Je trouve certain de tes passages confus aussi, mais je tente de te faire une place quand même avec ce que je peux saisir Smile

Citation :
Le jugement de goût n'est pas un opinionisme.
Je ne sais pas ce que tu mets derrière opinionisme, mais tes mots sont ton opinion, comme ceux de tout un chacun. On peut se référer à quelque chose mais une fois invoqué, on en a la responsabilité.

Citation :
Toujours est-il que les notions de bon ou de mauvais, qui n'ont pas grand-chose à voir avec celles de bien et de mal, ne sont pas des concepts moraux, mais qualitatifs.
C'est un point de vue qui n'empêche que tu peux contester la qualité des épinards ou des blettes avec des affirmations comme :

Citation :
Les Fourmis est au mieux fadasse; Les Thanathonautes, absolument insupportable tellement c'est mal écrit.
Tu trouves les fourmis "fadasses" mais elles ne le sont pas, c'est ton opinion.

Confondre ses goûts avec la nature des choses, c'est entrer dans un conflit "moral" qui ne fait pas de place à autrui. La confusion peut venir de là, du refus de l'autre.

Citation :
sans compter que Werber défend une esthétique du divertissement plutôt que de l'art, auquel, choix délibéré ou non, il ne s'intéresse jamais
C'est pas faux, il y a  un paradoxe entre sa vision plus scientifique que littéraire, plus rationnelle que mystique et son écriture tournée vers l'imaginaire. Mais ça rejoint, cette question de l'art, le refus de la définition pour pouvoir toujours dire, en quelques sortes, "c'est n'est pas bon/c'est mal" sans donner de repères autre que son propre jugement.

Je ne fais pas trop long et je chasse les cowboys et les indiens pour que ça soit moins confus, les images m'aident plus que les concepts, mais je peux les garder pour moi.
 

 Les conseils du grand maître.

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