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| Ma sensibilité de lectrice change en vieilissant. Et la vôtre ? | |
| | Nombre de messages : 4070 Âge : 43 Localisation : Région Parisienne Date d'inscription : 11/01/2019 | Jimilie Croquette / De l'Importance d'être Constamment Là Sam 7 Oct 2023 - 18:17 | |
| J'ai réalisé en lisant "ce que nous avons perdu dans le feu" de l'autrice argentine Mariana Enríquez que ne ne supportais plus les récits d'épouvante et encore moins les trucs gores.
Pourtant quand j'étais ado, il y a une vie de ça, j'ai englouti des Stephen King par dizaines. Plus c'était gore, plus j'aimais ça !
Quand, il y a cinq ans environ, j'ai lu "my absolute darling" de Gabriel Tallent aux Editions Gallmeister (un roman que j'ai détesté de bout en bout) j'ai mal supporté les violences et les mutilations. C'était déjà un signe que ma sensibilité avait glissé.
Maintenant, le moindre truc un peu gore et je saute des paragraphes, voire des pages.
Qu'est-ce qui provoque ce glissement, cet accroissement de ma sensibilité ? Est-ce que c'est l'âge, mais alors pourquoi, comment ? Avez-vous constaté le même phénomène chez vous ? |
| | Nombre de messages : 13 Âge : 61 Date d'inscription : 06/10/2023 | D'hautcourt / Homme invisible Sam 7 Oct 2023 - 19:45 | |
| Comme toi, j'aimais le fantastique, l'extraordinaire, il n'y a pas une vie, mais trois ou quatre. Toutefois je n'ai jamais aimé des trucs du genre "meurtre à la tronçonneuse", etc... Je ne me suis jamais posé la question "pourquoi ai-je changé ?" Donc, j'y réfléchis en te répondant. Une hypothèse serait qu'au cours de ma première vie, je ne comprenais rien à rien, la réalité des rapports humains ne m'intéressait pas. Je crois qu'à l'époque je n'étais pas moi. J'avais revêtu le costume d'un personnage taillé pour moi par mes parents, mes amis, mes professeurs... J'ai seulement pu me trouver après ma rencontre avec mon actuelle amoureuse. J'ai compris beaucoup de choses alors aussi parce que je me suis éloigné de mes sources, bienveillantes mais toxiques. Je crois être beaucoup plus lucide maintenant et j'adore absolument tous les Bacri-Jaoui - Ah oui, il faut que je dise que j'écris mais je lis très peu - Donc, je ne pense pas que ce soit l'âge qui m'ait fait m'intéresser à d'autres types "d'intrigues" mais plutôt , tant pis si c'est prétentieux, une forme de maturité. |
| | Nombre de messages : 241 Âge : 26 Date d'inscription : 23/10/2022 | Ozone / Autostoppeur galactique Sam 7 Oct 2023 - 20:25 | |
| Disons qu'avec l'âge et les différents ouvrages que l'on parcours, le goût se peaufine avec le temps. |
| | Nombre de messages : 4070 Âge : 43 Localisation : Région Parisienne Date d'inscription : 11/01/2019 | Jimilie Croquette / De l'Importance d'être Constamment Là Sam 7 Oct 2023 - 20:36 | |
| C’est pas vraiment une histoire de goûts. C’est vraiment une histoire de sensibilité. Je ne supporte plus, ça me met mal à l’aise alors que je sais que c’est de la fiction.
Et aussi, je ne suis pas sûre que les goûts “s’affinent”, comme si tous les jeunes étaient à côté de la plaque et les anciens détendeurs d’une sensibilité juste et bonne ? Les goûts changent, mais je ne suis pas sûre qu’il faille les hiérarchiser. |
| | Nombre de messages : 92 Âge : 35 Localisation : Lausanne Pensée du jour : Ma couronne est ma joie Date d'inscription : 19/09/2023 | Azurlazuly / Pippin le Bref Sam 7 Oct 2023 - 22:34 | |
| J'ai lu Harry Potter un nombre de fois incalculable lorsque j'étais jeune mais je sais aujourd'hui que je ne pourrais plus. De même pour Anne-Rice ou en plus réaliste Amélie Nothomb. Et pour de très différentes raisons.
Harry Potter parce que maintenant je me rends compte de toutes les failles du monde de J. K. Rowling et ça m'énerve. Anne Rice parce que le sujet, particulièrement des vampires, ne parle absolument plus et me met même assez mal à l'aise. Et Amélie Nothomb parce que je n'arrive plus à être absorbée par ses histoires. À force d'en lire j'ai fini par la trouver prévisible et cela devenait décevant.
Je ne doute pas que ma sensibilité a changé. Je n'ai plus envie de lire les mêmes choses et il y a des sujets qu'avec l'âge je comprends mieux et que je suis capable d'apprécier, ce qui n'aurait pas été le cas plusieurs années plus tôt, typiquement tout ce qui concerna la maternité.
Je ne parlerai pas de hiérarchie entre ces sensibilités mais d'un développement psychologique assez normal. De même que l'on n'a pas les même relation avec les autres à 10, 17, 30 ou 60 ans. On pourrait peut-être résumer ça à une certaine sagesse, qui ne s'acquière qu'avec l'âge et les expériences de vie. La sagesse, pour moi, n'est pas à opposer à la fougue de la jeunesse, ni à hiérarchiser mais juste à accepter comme une part de la vie, chacune ayant ses avantages et ses inconvénients. |
| | Nombre de messages : 131 Âge : 31 Localisation : 4ème dimension Date d'inscription : 24/05/2022 | Ackerman / Barge de Radetzky Dim 8 Oct 2023 - 1:15 | |
| Cela m'est aussi arrivé. Lorsque j'étais ado je dévorais les Agatha Christie et autres Mary Higgins Clark. À présent je ne dirai pas que je ne pourrai plus mais disons que mes goûts ont changé.
Je pense que c'est quelque chose de normal. Notre vision du monde change en vieillissant, cela peut se répercuter sur nos goûts ou notre capacité à supporter ou même à imaginer certaines choses. |
| | Nombre de messages : 1544 Âge : 31 Date d'inscription : 25/01/2021 | Page de Bâtons / Roland curieux Dim 8 Oct 2023 - 1:17 | |
| - Jimilie Croquette a écrit:
- C’est pas vraiment une histoire de goûts. C’est vraiment une histoire de sensibilité. Je ne supporte plus, ça me met mal à l’aise alors que je sais que c’est de la fiction.
J'ai pareil que toi, j'avais beaucoup moins de limites ado que maintenant, et je sens que ça continue de glisser en ce sens. Je me demande si c'est pas lié à l'expérience et l'âge qui lie ces scènes d'horreur/de gore/de violence à des choses de la vraie vie, alors que, jeune, ça reste quasiment entièrement de la fiction (pour la plupart d'entre nous dans les pays développés), et c'est un moyen justement d'explorer ces peurs ou ces possibilités, de regarder ce que les gens font lorsqu'ils sont face à ces situations - bref, un forme de catharsis ? Alors que, adulte, on a pu vivre des choses, directement ou par procuration via nos proches, qui ne nous font plus voir ces scènes comme une simple exploration "fun", mais comme le reflet de choses trop "vraies" qui peuvent nous mettre mal à l'aise ? Enfin, c'est une hypothèse, aucune idée si c'est là le vrai mécanisme. |
| | Nombre de messages : 2254 Âge : 32 Pensée du jour : Crachez-le aussi fort que vous voulez, ça ne sert à rien. Car je ne suis pas un déviant. Date d'inscription : 28/07/2023 | Blackmamba / Guère épais Dim 8 Oct 2023 - 1:28 | |
| Azurlazuly a bien pavé mon chemin dans l'esprit général. On change, on évolue. Le monde aussi, et il nous impacte. Les gens qu'on rencontre, les choses qu'on écrit, qui révèlent des choses parfois inconnues en nous, qu'on extériorise. Des récits qui nous marquent, et évoquent des choses insoupçonnées, sous un angle nouveau, qui nous parle. Tant de chose qui nourrissent nos sensibilités, sur le cheminement de nos sensibilités qui se poursuit tout le long de nos vies.
Est-ce que ton changement de sensibilité te préoccupe ? Ou simplement tu te questionnes dessus ? S'il t'inquiète, je pense que ça ne devrait pas être le cas, que tu te fais trop de souci, car c'est un processus naturel. C'est même tant mieux, car tu as fais des rencontres, d'oeuvres de gens et encore d'autres choses, qui ont su t'apporter quelque chose, dont tu as su tirer quelque chose. Si c'est la deuxième, peut-être pourrais-tu faire un retour en arrière sur des évènements de ta vie, pour voir à quel moment où occurence ça a pu commencer à changer ? Car la réponse que tu trouveras ne sera pas là même que la mienne ou celle des autres, tu vois ce que je veux dire ?
Pour ma part, Naruto a toujours été l'oeuvre à la première place dans mon cœur. Quand j'étais ado, mais aussi adulte. Ma vision a changé, mais s'est renforcée. J'ai encore mieux compris l'oeuvre, pourquoi elle m'avait touché à l'époque, pourquoi elle me touche maintenant. Pareil pour Star Wars. C'est la trilogie originelle qui est dans mon cœur avant tout, alors que je suis de la génération de la prélogie. Plus je prenais de l'âge, plus la trilogie originelle affirmait sa place dans mon cœur. La sensibilité de ses goûts et préférences évolue même lorsqu'on croit qu'elle est forgée pour de bon. Car nos goûts et nos sensibilités sont plus une constante évolution, plus ou moins intensive, que quelque chose de figé. Enfin c'est la manière dont je perçois les choses.
Aussi, tout dépend notre passé et notre milieu social pour le rapport à la violence. Quelqu'un qui a grandi à la campagne n'aura en général pas les même inhibitions de base qu'un citadin. Je précise que je globalise en l'occurrence. Et chacun à ses expériences qui jouent plus ou moins fortement sur ses inhibitions. J'ai toujours été intéressé/fasciné par la castagne, le combat et la violence, avec une très haute tolérance. Et mes expériences personnelles, vécues en condition réelles, ont en réalité accentué cet intérêt, d'être plus attiré par la subtilité des détails, mieux comprendre la violence, ce qui la motive, ect. Pour la retranscrire avec le plus de justesse, décorrélée des idées reçues à son sujet, mais voilà.
Et pour continuer à valider Azurlazuly, c'est tout aussi important de passer par une phase fougue et flamme de la jeunesse, pour mieux apprécier la période où on va s'assagir. En gros. Et vivre avec notre sensibilité, car on ne la choisit pas, elle se construit en nous, et vient de nous, on ne peut la leurrer au fond de nous.
J'espère avoir apporté un peu à la discussion, et n'hésitez pas à rebondir ou apporter de nouveau, pour nourrir le fil ! |
| | Nombre de messages : 4070 Âge : 43 Localisation : Région Parisienne Date d'inscription : 11/01/2019 | Jimilie Croquette / De l'Importance d'être Constamment Là Dim 8 Oct 2023 - 7:27 | |
| Ça ne m’inquiète pas vraiment, c’est un simple constat et un peu de perplexité face à ce constat. Ma tolérance à l’épouvante / l’horreur/ la violence en littérature est descendue proche de zéro alors que j’en raffolais autrefois. Ça s’est fait à mon insu. Je me demande quelle est la mécanique inconsciente à l’œuvre. |
| | Nombre de messages : 322 Âge : 29 Pensée du jour : Gnothi seauton Date d'inscription : 13/04/2023 | Aconitum / Tapage au bout de la nuit Dim 8 Oct 2023 - 8:04 | |
| J'avais lu une fois un article qui disait que en étant enceinte et en ayant des enfants, le cerveau évoluait pour accentuer tout ce qui est empathie, sensibilité etc.
"Even before a woman gives birth, pregnancy tinkers with the very structure of her brain, several neurologists told me. After centuries of observing behavioral changes in new mothers, scientists are only recently beginning to definitively link the way a woman acts with what’s happening in her prefrontal cortex, midbrain, parietal lobes, and elsewhere. Gray matter becomes more concentrated. Activity increases in regions that control empathy, anxiety, and social interaction." Source : https://www.theatlantic.com/health/archive/2015/01/what-happens-to-a-womans-brain-when-she-becomes-a-mother/384179/
Si c'est vrai, ça pourrait peut être expliquer l'évolution de ton ressenti ? Il me semble t'avoir vu mentionner quelque part que tu avais un ou plusieurs enfants.
Pour ma part (sans avoir d'enfant) je pleure un peu plus facilement devant certains types d'histoires, alors qu'avant quand j'étais enfant/ado il n'y avait pas grand chose qui m'émeuvait. |
| | Nombre de messages : 7665 Âge : 36 Date d'inscription : 10/04/2008 | Flora / Serial Constance killer Dim 8 Oct 2023 - 9:25 | |
| Je vais aller à contre-courant, mais je suis devenue moins sensible en vieillissant En tout cas, entre 15 ans et 25 ans, clairement, je suis devenue mieux capable de supporter des scènes sexuelles ou violentes, alors qu'avant, ça me marquait très fort. Je me souviens notamment que pour le collège, j'avais dû lire un tome de Rougemuraille dans lequel un cadavre était décrit et je m'en souviens encore... Je pense par contre qu'en vieillissant, on accumule de nouvelles expériences et que des scènes qui ne nous concernaient pas du tout à une époque font soudain écho à notre vécu. Par exemple, j'ai sangloté comme une perdue dans un cinéma, devant une scène de crémation, parce qu'un de mes proches avait été incinéré assez peu de temps auparavant, et avec la même musique en prime... Si j'avais vu le film avant cet événement, ça ne m'aurait pas atteinte à ce point. |
| | Nombre de messages : 2895 Âge : 104 Localisation : Dans chacune des histoires que j'écris (je déménage beaucoup, donc... ) Pensée du jour : Demain, ça ira mieux ! Date d'inscription : 29/11/2017 | Plumerose / Roberto Bel-Agneau Dim 8 Oct 2023 - 14:33 | |
| Je ne suis pas sûre que les changements de sensibilité littéraire soient forcément "liés à l'âge". Je dirais plutôt qu'on a "des périodes", qui évidemment, s'inscrivent dans le temps. Et puis, mine de rien, les modes nous influencent aussi... ainsi que ce qu'on écrit (j'écris du thriller, je n'ai pas forcément envie de lire du thriller, du coup... par exemple). Enfin, je dirais que la sensibilité (chez moi en tous les cas) a beaucoup changé quand j'ai eu un enfant. Donc, je parlerais plutôt d'expériences qui s'inscrivent dans le temps, et qui modifient notre (nos) sensibilité(s), d'une façon générale, et donc aussi en tant que lecteur, lectrice... PS : toute jeune, je n'aimais pas du tout la romance, or à présent, si. Mais cela peut aussi être lié au fait qu'il y a de plus en plus de choix et de qualité dans ce domaine. Je m'arrête, sinon, je vais faire un exposé complet ! |
| | Nombre de messages : 1257 Âge : 47 Date d'inscription : 14/08/2022 | Cath / Tentatrice chauve Dim 8 Oct 2023 - 15:06 | |
| Je ne sais pas si c'est lié à l'âge, plutôt à des périodes de la vie où l'on est plus fragile ou sensible, quelle qu'en soit la raison. Je rejoins Flora, par exemple, sur le fait qu'entre 15 et 25 ans environ, je pouvais lire ou voir à peu près n'importe quoi.
Avant ça, j'ai le souvenir quand j'avais encore 11 ou 12 ans, de livres (L'herbe bleue, par exemple, qui à l'époque était encore présenté comme un vrai journal intime) ou de films (comme Pluie noire) qui m'ont durablement traumatisée (pas bravo à certains profs de collège d'imposer ça à leurs élèves...) Là j'imagine que l'âge joue, on sort à peine de l'enfance, on est impressionnable.
Plus tard, je suppose que c'est le vécu et les expériences traversées qui font évoluer notre sensibilité. En tout cas, en ce qui me concerne, après des deuils, la grave maladie de certains proches, du harcèlement moral subi dans le cadre professionnel, des problèmes de santé... je sais qu'il y a des blessures que certaines lectures viennent réveiller, et elles sont difficiles à supporter. |
| | Nombre de messages : 1044 Âge : 57 Date d'inscription : 30/10/2018 | LuigiR / Effleure du mal Lun 9 Oct 2023 - 0:20 | |
| Moi aussi, j'ai constaté cela cet été. J'ai commencé le dernier Frank Thilliez, ca commençait avec un viol de cadavres, il y avait une pauvre flic enceinte qui se faisait agresser, j'en passe et au bout de 10 minutes, j'ai laissé tomber. Ce genre d'histoire ne m'intéresse pas. Plus jeune je n'aurais sûrement pas décroché mais à mon âge, je ne veux pas lire ce genre d'histoire. Pourquoi ? Sûrement qu'avec les ans, le fait d'être parent, de perdre des proches vous sensibilisent plus à la valeur de la vie. Quand on est ado, la mort, on y pense pas vraiment, c'est comme la retraite, c'est loin. Passé la quarantaine, c'est quelque chose auquel on a été confronté.
Dans le même temps j'ai constaté que mes écrits abordent des thèmes moins fun : ca parle de vieillesse, de mort, d'effondrement, de réchauffement climatique. Mais ça n'est jamais trash ni gore, avec de l'humour et du sarcasme (enfin j'essaie). Et ça c'est plus marqué depuis 2 ou 3ans. Il y a l'âge, sûrement (j'ai dépassé les 55 ans) mais je pense aussi que la crise du Covid à laissé des traces parmi nous. |
| | Nombre de messages : 7665 Âge : 36 Date d'inscription : 10/04/2008 | Flora / Serial Constance killer Lun 9 Oct 2023 - 7:11 | |
| - Cath a écrit:
- Je rejoins Flora, par exemple, sur le fait qu'entre 15 et 25 ans environ, je pouvais lire ou voir à peu près n'importe quoi.
Non, c'est le contraire pour moi, j'étais sensible, et je suis devenue peu à peu mieux capable de supporter la violence C'est à partir de 25 que je pouvais lire n'importe quoi. Je réalise que mon message était mal tourné. |
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