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 Commentaires [L'Immeuble - appartement 601] - Imanuel Davis Ferreira

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Chamanii
   
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Chamanii  /  Il voulait un rang


Les bruits du 601

Spoiler:
 
Ximeno Otravez
   
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Ximeno Otravez  /  Homme invisible


Toc-toc-toc — le petit poing d'O-TRA-VEZ qui n'attend pas que la porte ouvre pour crier :

— Señor Imanuel ! Jaime diris, ke mi diru al vi: jen!

Quand Jaime dit « jen ! » ou « voilà ! » dans son accent texan, ça veut très souvent dire : « la Raicilla est prête, passe à l'appart' quand tu veux cuando quieras si quieres (« quand tu veux si tu veux »).


Dernière édition par Ximeno Otravez le Jeu 19 Oct 2023 - 16:28, édité 1 fois
 
Le Concierge
   
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Le Concierge  /  Barge de Radetzky


BOUM BOUM BOUM BOUM


MONSIEUR FERREIRA NOTRE IMMEUBLE EST UN ETABLISSEMENT RESPECTABLE ET IL SERAIT BIEN QUE VOUS CESSIEZ DE MASSACRER DES AIRS DE TROMPETTE A LONGUEUR DE JOURNEE ET DE NUIT CECI EST LE DERNIER AVERTISSEMENT AVANT DES MESURES !

Le Concierge s'éloigne en faisant craquer le petit escalier qui monte au sixième.
 
Paco El Flaco
   
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Paco El Flaco  /  Homme invisible


Toc toc toc.

"Hey! j'ai cru entendre de la trompette pendant la nuit. Ca viens d'ici n'est-ce pas?"

Hum pas de réponse.

Je vais tout de même lui laisser la carte du bar El Pescador. Les copains cherchent toujours de nouveaux musiciens pour égayer un peu cette ville de d'enfoirés. Peut-être que ça l'intéressera. Je laisse aussi un petit paquet d'herbe avec mon numéro de chambre. Les zicos sont souvent des gens de tempérament détendus, il appréciera surement se faire un petit jokos. Avec un peu de chance ça le fera dormir et on entendra pas sa foutue trompette a 2h du matin.
 
Teófano Riviera
   
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Teófano Riviera  /  Petit chose


Bon alors je me suis planté une fois, mais pas deux. J'entends la trompette sortir de l'appartement 601, impossible que je me plante. Surtout que, pour une raison qui m'échappe, tout le monde me ferme la porte au pif. Comme si j'allais faire un truc un peu louche ; sortir une arme ou...

Aaaaaah d'accord ouiiiii ils sont au couraaaaaant...D'accord ; je suis surveillé, ils savent qui je suis, ce que je prépare. Ils ont peut-être mes écrits. Ils ont peut-être mes écrits pas encore écrits. Ils sont partout, c'est sûr, mais aussi dans ma tête et dans mon futur...ils en sont capables. Je dois me méfier, me montrer très prudent ; d'une prudence non prédictible ; une seule imprudence prévisible et je suis grillé...mais si je pense ça, ils savent déjà que j'allais le penser, donc il faut que je pense l'inverse. Mais ils le savent, ça aussi ! Oh putain de ses grands morts les noyés de ta race, je suis dans une merde noire ; un peu comme le fleuve mais avec le côté polar ésotérique, tu vois le truc.

Calmons-nous tous un bon coup. Respire. Je regarde à gauche, à droite. Rien. Personne. Ils doivent avoir des mouchards, des faux-murs, des trompe-zyeux. Quelque chose qui échappe à tout le monde ; pas à un Riviera en cavale. Est-ce qu'ils savent pour l'attentat ? Peu de chances, les flics auraient déjà fait sauter le champagne avec ma porte. Qu'est-ce qu'ils savent ? Et s'ils savent que je sais, ne font-ils pas semblant de ne pas savoir...et je le sais aussi...la vache, j'aimerais pas jouer au poker avec ces gars-là ; ils viennent d'un autre planète, c'est pas possible.

Le mieux avec ces gens, c'est de les contrer avec des témoins gênants. Tu peux tromper une personne une fois, mais pas...non c'est pas ça. Tu peux tromper mille personnes mille fois...pas ça non plus, merde ; tu peux tromper une fois mille personne mille fois et...bordel c'est quoi la phrase...tu peux tromper...bon je frappe.


- Y'a quelqu'un derrière la trompette ? T'es un putain d'artiste Marcello !

Vu que tout le monde est complice, se cache ou s'occupe de sa tuyauterie personnelle, je me demande qui je vais devoir menacer pour avoir un témoin gênant et contrer tous ceux qui nous écoutent pour nous supprimer. D'ailleurs, la fille du 602 est sûrement un individu ; de type féminin je crois ; qui fait semblant de pas savoir jouer de la trompette pour brouiller les pistes. C'était aussi clair que la devise qui dit qu'on peut tromper mille personnes une fois mais...

Putain de Tenorio, encore raté !
 
Teófano Riviera
   
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Teófano Riviera  /  Petit chose


Chamanii a écrit:

[Imanuel Davis Ferreira]

La porte s’ouvre devant Teófano Riviera et laisse apparaitre une petite chambre traversée par un éclatant soleil de fin de journée. Il met du temps à distinguer le visage de son hôte, mais finit par y voir les traits creusés d’un homme en sueur et aux yeux rougis par les pleurs. Il est torse-nu et tient une trompette à la main.
— Pardon. Je ne suis pas vraiment présentable.
Il s’éponge le front d’un revers de main.
— Je fais trop de bruit n’est-ce pas ? Désolé, je… à une époque, vous savez, les gens payaient pour m’écouter. Maintenant, eh bien… On me demande d’arrêter de jouer. Pardon. C’est l’alcool, vous savez… Et ma femme… Et…
Imanuel Davis Ferreira se perd un instant dans ses pensées, l’air abattu et son regard s’échoue au sol, entre ses pieds nus ; puis, d’un coup, il se ressaisit, redresse son long corps filiforme et les yeux écarquillés, il fixe Teófano.
— Pardon ! Je ne suis pas vraiment présentable ! Je fais trop de bruit n’est-ce pas ? Je… à une époque, vous savez…
Il s’arrête brièvement, puis reprend :
— Je peux vous offrir un verre pour me faire pardonner ? Il me reste un Mezcal ; et du bon !
Il fait volte-face vers l’intérieur de la mansarde et tout en saisissant une bouteille, il s’assoie sur un lit étroit. Souriant, il désigne, comme une invitation, un pouf au cuir élimé, près d’une petite table basse. Des feuillets de notations musicales, écornés, sont dispersés en pagaille, partout dans la pièce ; certains sont chargés d’écritures, d’autres sont vierges. Plusieurs bouteilles d’alcool vides trainent ça et là.


Que le Grand Robinet soit Loué ! La porte s'ouvre sur un ange traversé par la grâce ! Il manque un septième étage à cet immeuble, mais le paradis a été descendu d'un cran. Tu m'étonnes. L'ange qui apparaît devant moi emboucane pourtant l'humanité de souffrance ; de la sueur, des larmes et du sang versé dans sa trompette ; un mélange entre Churchill et Miles Davis finalement.

Je zieute un peu le bonhomme et sa trompette. On dirait qu'il pleure en jouant. Comme je pleure, dans mon appartement, en écrivant. On dit que l'art est cathartique, c'est surtout pour s'éviter des dépenses chez les psys, les pharmaciens et les dealers ; pléonasme. Il bredouille et semble s'excuser d'exister, comme pas mal de monde dans Aguacope. Avec la moitié des effectifs qui a bu la tasse, on a l'impression d'avoir grugé le Grand Robinet. Appelle-le comme tu veux.


- Vous faites du bruit, c'est certain. Mais je suis monté du deuxième pour vous remercier, justement. Cet immeuble est rempli de sociaux-traîtres et de profiteurs, vous vous en êtes rendu compte je suppose. Votre trompette m'a redonné le goût de quelque chose, peut-être la vie, encore jolie et surprenante, même amputée de quasiment toute sa sève...

Je recommence à trembler. Pas bon. Cette fois, ce n'est pas face à un gamin de dix ans qui invente son propre langage ; sans doute pour échapper à la cruauté de son destin et de sa sexualité. Je me dis qu'on est pareil, cet ange et moi. Sauf que je ne porte pas une armure de lumière, j'ai renié la Bible après mon séminaire ; la chasteté, qu'on se le dise, on s'en lasse. J'ai emprunté pour quelques semaines le costar du démon et j'ai l'impression qu'il me va de mieux en mieux, jusqu'à ce que je trouve ma propre porte de l'enfer ; que j'en finisse avec toute cette eau, toutes ces chiasses qui nous traversent ; que les responsables paient le karma qui vient chercher son dû à la gâchette.

- Du mezcal ? Je connais une super recette qui...ahem...oui, un verre ça me va.

Déconne pas Riviera. L'ange est un virtuose de l'évier de cuivre, c'est pas le moment de faire le malin parce que tu as été deux trois fois dans ta vie derrière le comptoir à secouer des shakers. Je m'effondre sur le pouf et avise son appartement. Pas fameux, comme le mien. Des bouteilles vides. Pour oublier ou se concentrer. Je comprends l'addiction. Moi c'est l'écriture.

- Moi c'est l'écriture. Pas musicale. Enfin y'a débat. De la poésie, surtout. Des textes, des trucs sans intérêt maintenant qu'on vit dans une baignoire. J'ai été chanteur aussi, j'ai pensé à des noms de groupe mais on verra ça plus tard...même si « les fados du sixième » c'est assez dans l'époque...enfin voilà je viens pour vous remercier de m'avoir donné ces moments musicaux, si rares, si précieux, si...intenses.... Je suis venu vous dire de ne pas écouter ces traîne-savates, à commencer par le Concierge qui pense qu'on est à l'armée...et si vous cherchez un chanteur...

Ok je ne lui mentionne pas la consigne reçue de me créer une couverture efficace dans l'immeuble. Autant joindre l'utile à l'agréable. Je le fixe un peu du regard, pour vérifier si y'a bien une âme dans le bonhomme. J'ai des explosifs-maison à préparer avec des tequilas bon marché ; je ne peux pas non plus prendre tout mon temps à jouer les traviatas. Un peu de mezcal histoire de ; on n'est pas là pour être ici alors autant se faire plaisir.
 
Teófano Riviera
   
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Teófano Riviera  /  Petit chose


Chamanii a écrit:

[Imanuel Davis Ferreira]

Ce grand type, qu’est Immanuel, on sent tous les nerfs qui agitent son corps. Ça prend de la place, cet être qui vibre, dans l’espace restreint de cette chambre. C’est de l’excitation (et de l’ivresse), comme si, enfin, on lui apportait à manger ; une nourriture spirituelle, juste là, à portée. Les yeux exorbités, il dévore les paroles de l’homme qui lui fait face. Pour seule réponse, il lui adresse un sourire exagéré, mais ô combien sincère et passionné. Après qu’Imanuel a vidé son verre d’une traite, Riviera ne se fait pas prier, sous l’injonction d’un mouvement de tête, il l’imite. Immédiatement, c’est un empressement quasi sauvage qui fait tinter la bouteille : le mezcal coule à nouveau, ça déborderait presque.
— Un ami des mots ! Tu sais – « tu », hein – j’y pensais, hier, justement ! La poésie… J’en écrivais ! J’en écrivais, dans ma jeunesse, des poèmes ! C’est incroyable ! J’y pensais, justement. J’écrivais des poèmes, quand j’avais… vingt ans ! J’y pensais, car, les jeunes filles, ce sont des… – comment on dit – des poétesses ! Les jeunes filles, elles ont dit des poèmes, hier, justement. Alors j’y pensais… que, moi aussi, dans ma jeunesse… Si tu les entendais ! Elles disent des poèmes et elles racontent… des… des… leurs vies ! Regarde !
Immanuel fige son discours d’un doigt levé et vide son verre, puis une impulsion l’envoie plonger les mains dans un tas de paperasses au sol ; il cherche, il froisse et finalement, en retire, brandit au nez de Riviera, une feuille chiffonnée, sur laquelle les portées musicales sont dépourvues de notes, seulement des mots, des phrases, absolument illisibles.
— J’ai écrit hier ! Justement. De la poésie. J’ai voulu renouer, retrouver ma jeunesse. Les jeunes filles. Des poétesses. Mais je ne suis pas doué pour ça. Comment t’appelles-tu, amis des mots ? Si tu me disais ta poésie, je pourrais te donner un nom ! C’est ainsi qu’ils faisaient, les guérilleros. Ils se lisaient des poèmes et alors, on leur attribuait le nom du poème ; ou du poète ! Il y avait des notes, dans les affaires de ma mère – des carnets que j’ai lu – je me souviens qu’elle parlait d’un de ses amis – je parle trop, pardon, amis des mots – un de ses amis, qui, lui, aimait « La Rivière », un poème, de… Desnos, je crois ? Elle avait écrit – ma mère – le poème dans son carnet. Moi aussi je l’aimais bien, il m’avait marqué et je le connaissais par cœur. Et lui – cet ami de ma mère – il disait – c’est ma mère qui a rapporté ses propos – qu’un jour, il traverserait la rivière aussi, mais, en fait, lui, il parlait de la mort : comment il allait mourir au combat. C’est beau, non ? On l’appelait Riviera. Tu imagines ; si on t’appelait Riviera ? C’est un très beau nom, je trouve.
Là, on peut voir une douceur, un apaisement dans le cœur d’Imanuel ; qui un instant, demeure silencieux, pensif, le regard perdu. Quand il revient à la réalité, c’est un sourire entendu et complice qu’il présente à Teófano Riviera, comme s’il ne doutait pas de son approbation.


On mégote pas sur la quantité d’alcool pour se dire les choses en face. Ça me plaît, ça me change des peaux-mortes mesurées en tous points et en tous lieux. L’excès est non seulement une porte de sortie, mais peut-être aussi une planche de salut ; un dernier signe d’humanité avec le grand saut. Le type semble transporté ; transcendé par je ne sais quelle puissance à l’œuvre dans son esprit. Sans toute cette eau, on aurait juré un de ces shamanes qui t’amènent aux confins du cosmos sous bouger de leur cabane faite en bois et en excréments.

Je lève un sourcil en l’entendant parler des poétesses. Il y avait bien longtemps, plus d’une semaine et quelques jours de plus à ramer dans la ville, que je n’avais pas entendu ce terme. Il m’a ramené encore plus loin ; au temps des débats des déjectistes. Certaines d’entre nous, les meilleures musiciennes du mot, voyaient en ce suffixe la libération de leur condition ; pourrie, abusive, déterminée du début à la fin. Aguacope était, avant le Déluge, une ville réputée pour ses disparitions de femmes ; enlèvements ; prostitutions clandestines ; violences banalisées. Toutes ces joyeusetés validées en douce par nos dirigeants ; ces enfoirés prenaient leur part dans l’affaire, évidemment.
D’autres sœurs d’armes voyaient dans le terme, au contraire, l’enchaînement à cette même condition. Un piège impossible à éviter. Tout le monde l’ayant adopté, il y avait anguille sous roche. Être validées par l’ennemi, il y avait de quoi se poser des questions ; pas qu’un peu. On leur donnait raison, elles disaient qu’on leur donnait les clés de leur propre enfermement, avec un numéro de dossier connu et rangé comme il fallait. Je n’ai jamais pris part à leurs discussions, je prenais des notes. Il était temps d’inverser les rôles. Puis j’aimais bien servir à manger et à boire pour mieux les écouter ; enfin mieux les écouter, aurait dit Paolo.


- Hier, tu dis ? Tu es encore en contact avec des poétesses aguacopiennes ? J’ai cru qu’elles étaient toutes parties dans la sororité Neruda ! Un immeuble entier de femmes artistes, qui mettent la main dans les eaux sales pour éduquer les enfants perdus ou pour aider les femmes qui sont agressées un peu partout ! Si tu as des contacts, je suis preneur. J’ai même plus de nouvelles de Fabrizio qui habite à deux rues d’ici...c’est comme si…

Dur de finir la phrase. C’est comme si tout le monde était mort, qu’on flottait encore dans un dernier soupir ; un grand cauchemar impossible à terminer. Je lis les feuilles qu’il me tend et je ne comprends rien, mais mon cerveau lance des messages codés à mon corps ; se trouve que j’ai le code. A boire, vite. Je me ressers plusieurs fois et je vide mon verre plusieurs fois. Sans trop réfléchir. Il y a des séquences, des mots, des échos qui me perforent le plexus, remontent dans les narines comme de la moutarde ; tout ça s’échoue entre mes pieds et le ciel au-dessus de nous. Ne deviens pas ton monstre. Pourquoi est-ce que je pense à ça, maintenant ? Desnos, qu’il dit ? Sans doute un espagnol qui a suivi les grandes pompes à merde du pouvoir là-bas. Les poètes, pour part, sont les héritiers des chroniqueurs médiévaux. Une bande de suceurs capable de tout écrire pour s’endormir dans de la soie. Les poétesses sont les seules à avoir garder, de force, le goût de la révolte, de la colère ; de la dignité, tout simplement.

- Mourir au combat, rien de plus con. Peut-être que c’était cool du temps de ta mère, et tant mieux pour elle et son espagnol. Moi je ne souhaite que mourir pour enfin trouver le repos. Le silence total. J’ai comme un grand robinet qui coule dans mes veines, le bruit ne s’arrête jamais, l’écoulement dure toute la journée ; toutes les nuits ça me dévale. J’ai même refait pipi au lit, j’ai arrêté de dormir. Et faut pas que je devienne mon monstre.

Merde, ça m’a échappé. Qu’est-ce qui se passe ? Comme si je jouais contre moi-même, tout à coup. Il dit qu’il va m’appeler Riviera ; un sacré bol que ce soit mon nom de famille. Enfin celui marqué sur mon passeport et sur les papelards de la location. Les poètes ne sont jamais tels qu’ils se présentent ; ça fait partie de leur sport. Je me souviens d’un texte que j’avais proposé à Fabrizio. Cet enfoiré l’avait refusé car c’était trop sincère, trop vrai. Sans trop capter que je commence à le réciter après un autre verre de mezcal, je le balance comme ça à l’ange qui me regarde de son visage ailé de bon pasteur. Peut-être alors, peut-être que mon monstre s’assagira.

- De mon ancienne peau
il ne reste presque rien
le monstre en moi a tout croqué

de ma barbe sont venues les flammes
mes cheveux se sont unis en cornes
j'ai senti mes pieds courir en sabots
des poils pousser partout
jusqu'à l'intérieur jusqu'à l'os
des rugissements remplacer le mot
des crocs pour mieux le savourer

mon ancienne peau est devenue
la maison de mon monstre
la demeure de ses hurlements
ses critiques ses injures ses plaies
comme un champ planté en moi

j'ai senti les piques les tenailles
l'odeur du sang dans les naseaux
j'ai respiré ma propre âme et je l'ai cachée
pour ne pas qu'il me l'enlève
un jour de danse ensorcelée

mon monstre n'est pas comme vous
il vient d'une source de feu
d'énergie pure et des nuits sans couleur
il se nourrit des morts des deuils
des vêtements de la vie
ce qu'on laisse le soir sur le dossier d'une chaise
à crever à petit feu
devant un miroir cassé qui fragmente
les multiples rires de mon monstre

il veut se raser il veut s'habiller de moi
mais je connais son nom qu'il
me murmure qu'il me menace
quand je le regarde droit dans l'espace
et la lumière et ses yeux qui me tuent
Diavolo...et ma voix se casse
tombée au sol.

Ne deviens pas ton monstre, dit la voix. Pourquoi je l'entends encore, après dix-huit ans de vie commune, pourquoi l'odeur de ses cheveux rejoint comme un fleuve de lumière celui de sa voix, l'odeur de sa voix celui de son parfum, qui me récitait par cœur des poèmes d'amoureux ; ceusses qui s'endorment seuls au monde, main dans la main. D'où vient-elle ? Pourquoi l'ai-je oubliée ? Et pourquoi cet ange me rappelle à tout ça, tout ça qui se déploie comme un grand carnaval de fantômes ? Il faut boire, de toute urgence.  
 
Teófano Riviera
   
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Teófano Riviera  /  Petit chose


Chamanii a écrit:

[Imanuel Davis Ferreira]

— Le monstre de soie ! Le monstre… de soi. Il fait un geste de la main, pour montrer l’ambivalence. Tu comprends ? Celui qui voit le diable en lui… il n’est pas tout à fait perdu ! Tu sais, le seul moyen de ne pas ressentir le feu – le feu qui coule dans nos veines – c’est d’être le feu ! Et ça, crois-moi, tu ne le veux pas ; parce que tu ne le sais plus – que tu es le feu – tu ne t’en rends pas compte ; et c’est seulement les yeux de ceux que tu aimes qui te le disent ; lorsqu’ils sont en flamme – ceux que tu aimes – car tu les as calcinés jusqu’à l’os. Non, tu ne le veux pas, monstre de soie. Tu me fais penser… Il lève le regard au plafond, vers des cieux imaginaires et balaye l’espace d’une main d’orateur. Tu me fais penser à ces musiciens ; ceux qui s’arrêtaient au carrefour du désert, sur la route – tu sais – la 66 ; et qui faisaient un pacte avec le diable ; ils n’en pouvaient plus de sentir le feu en eux. D’un seul mouvement, il prend et vide son verre. Mais, c’est comme cela que l’on vit ! En éprouvant, encore et encore, le feu ! Et c’est comme cela que l’on meurt ! A quoi bon mourir, si l’on est le diable ? Quel repos ? La consolation de la mort, c’est, précisément, d’apaiser ce qui nous brûle l’intérieur, ce pourquoi nous brûlons en dedans ; nos combats ! « El Sedoso », le monstre de soie. Tu me fais penser aux poétesses. Tu ne m’as pas compris. Elles sont là, avec nous, autour de nous, les poétesses. Elles aussi, elles sont de soie, mais… par-delà la mort ! Elles sont glacées comme la mort ; et pourtant, le feu coule toujours en elles. Elles ont maudit ces terres et leurs habitants ! Elles ont refusé d’éteindre le feu en elles car elles ont compris le sens de la vie ! Seuls les fantômes ont compris le sens de la vie ! Il dit ça comme une révélation, puis, un instant, se perd dans ses pensées. Hier, petit poisson, elle disait :

Les yeux de papa – des baies d’açaï
Noires comme des plumes
Et mes mains tachées – d’un goût acide

— Tu comprends ? Il réfléchit. Non… moi non plus. Mais, les « plumes noires », je me disais, en voyant les corbeaux qui tournent au-dessus de la ville, un peu partout… Il hésite. Bref, peu importe ! Mon ami… ami des mots, Monstre de Soie… Il se penche vers Riviera, le saisit par les épaules et le regarde droit dans les yeux. El Sedoso… toi aussi, tu peux être un fantôme.


Je ne comprends pas tout ; je ne sais plus si c'est l'alcool ou moi qui bloque. Dans le doute, disons que c'est de la faute du Concierge. Quoi des poétesses avec nous, autour de nous ; quoi d'être le feu ; quoi des yeux de ceux qui m'aiment qui me disent quoi j'en sais rien c'est fini on est foutu on va plonger comme tous les autres avant nous dans le bouillon. Oui, c'est bon, je comprends que je suis le feu, que je le renie ; comment ne pas renier qui j'ai été maintenant que je suis moi, avec ma gueule de moi, avec ma barbe pas rasée de moi, avec mes errements internes externes, mes perditions de lâche, avec mes pleurs de moi ? Mais...ce qu'il dit, ça résonne. Je comprends mieux comment il peut jouer sur sa trompette. Pourquoi j'ai ouvert les vannes en l'écoutant l'autre soir. Les poétesses, si elles sont bien là comme il dit, alors mes poésies, les seules qui vaillent, elles sont là aussi...elles me disaient de ne pas devenir un monstre, le mien, avec ma gueule de monstre et ce que l'ange appelle le feu qui rugit de souffrir tout en bas de moi, tout au fond ; comme une bête dans un puits. Un fantôme...c'était donc ça. C'était le mot, la définition que je cherchais, en vain. Au fond de l'appartement, je l'ai cherché, dans mes mots, dans les vers ; dans tout ce que disait l'instinct de survie. Je me croyais en sursis, je suis déjà mort et brûlant. Par tous les bouts. Par chaque pore ouvert à cette ville.

Il me saisit les épaules, son regard angélique croise le mien, désespéré. Je le serre davantage et l'amène contre moi, pour une accolade qui semble durer une existence entière. Je hurle, la bouche bavante au-dessus de son épaule ; je lâche tous ces bagages de souffrance que je traîne depuis des jours comme des poux dans ma chevelure.  


- C'est pas juste, putain ! C'est pas juste ! Pourquoi on a survécu, hein, tu peux me le dire ? Pourquoi un scribouillard inutile comme moi ? Mes poésies sont parties avec le courant de ce putain de caprichoso , elles méritaient pas ça ! C'était à moi de me noyer , de montrer le chemin, de les accompagner !

Je le lâche et je titube pour me resservir un verre, en tremblant. Ce qu'il dit a résonné en moi, le diable, le feu, les fantômes, les poétesses, bien sûr. Mais...je n'ai plus aucun combat qui ne tienne debout. Les armes, les explosifs, ce sont des jouets pour adultes, et pas ceux qu'on aiment avoir dans son tiroir. Ce sont des jouets pour endosser un autre costume que soi. Pour jouer les durs. Pour se rassurer quand ça crie dans la ruelle.  

- Tu sais, toi, comment devenir un fantôme ? J'ai envie que tout s'arrête. J'ai envie de rejoindre les miens. J'ai envie de me noyer pour de bon et d'arrêter tout ce massacre. Plus rien ne me retient sur le rivage, je veux partir. Mais avant, en tant qu'époux, en tant que fils, en tant que père, oncle, cousin, neveu de tous les miens, je vais aller faire danser les responsables dans les feux de l'enfer. Je vais tous les embarquer avec moi...et quand viendra la gueule de mon monstre, je les dévorerai tous les uns après les autres, un croc de Diavolo après l'autre. Après ça, j'irai rejoindre mes poésies, leurs prénoms, et je me purifierai à leur amour.

Le feu dans les yeux est bien vif ; je me sens fondre, pleinement entièrement moi, avec mon monstre ; je regarde fixement l'ange tombé du sixième étage et lui propose de trinquer une nouvelle fois, en reniflant peut-être pathétiquement ; avec l'assurance de celui qui connaît sa prochaine route.
 
Teófano Riviera
   
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Teófano Riviera  /  Petit chose


Chamanii a écrit:

[Imanuel Davis Ferreira]

— J’aimerais être comme toi, Sedoso. Tu as de belles larmes. Je ne me suis pas trompé. Cette enveloppe de soie, que tu as, elle est fine, peut-être un peu déchirée par endroit, mais elle est là, toujours, à contenir le feu. Je veux continuer de boire avec toi. J’aime l’alcool, mais j’aime encore plus te voir pleurer et j’aime ce que tu dis. Tu n’es pas inutile, ami des mots ; tes larmes, elles feraient céder des barrages. Et ta poésie, dans le Tenorio, elle est là ! On peut la voir ! Puissante ! Ravageuse ! Vengeresse ! Et toi, si tu es un fantôme, c’est celui de l’avenir ! Peut-être incertain ; peut-être que tu gémis des vers, comme une petite rivière de larmes, mais, à l’embouchure du fleuve, c’est une gueule immense, prête à avaler les douleurs du monde ! Ta rivière de larmes, elle peut digérer, comme un intestin de fantôme, les blessures de tes amours. Tu n'es pas le diable, Sedoso. Tu es le guerrier qui pleure la lumière du feu. Tu es l’espoir.


J'écoute l'ange tenter de me réconforter comme il peut, mais je sens qu'on n'est pas si différents, lui et moi. Il y a une résonance, quelque fréquence qui passe entre musiciens. Chacun à sa manière. Chacun de son côté de la balance. Je ne sais comment digérer ce qu'il me dit ; aimer me voir pleurer ; vouloir être comme moi : envisager d'écrire encore, participer au futur de cette maudite ville... je ne crois plus en l'espoir ; l'espoir, c'était les miens, c'était elle, c'était les petites mains qui me tiraient les cheveux, c'était son parfum qu'elle dispensait, l'enfouissant dans mes écharpes. Je n'ai jamais cru que la poésie sauverait le monde, j'ai mis toutes mes religions au service de mon foyer. Balayé. Dévasté. Emporté par le torrent hurleur du barrage...Le déjectisme ne sauvera personne sinon la stature de la poésie aguacopienne. Peut-être que dans dix, quinze ans, les rescapés, les orphelins la reliront pour trouver des voix à incarner, à faire revivre ; pour un temps.

- Les larmes ne sont jamais belles, mon ami. Elles reviennent toujours depuis des filets de pêche qui draguent en nous nos propres abysses. Echappées, ce sont nos erreurs roulées en boule, en boucle, remuées dans nos flux et nos fluides. J'ai bien peur que tu ne trouves que le sens qui me rassure ; qui te rassures aussi, peut-être. Mais je te remercie, il y avait longtemps que je n'avais pas rencontré une âme inspirante capable d'une telle accolade. J'aime aussi l'alcool, la prochaine fois ce seront mes tournées.

Je le regarde, dégageant les bouées de larmes collées aux coins des yeux. Ses mots me ramènent sans ménagement aux apéritifs infinis dont Paolo Acebes avait le secret. « Guerrier qui pleure la lumière du feu », voilà qui s'inscrirait bien dans un poème ; même dans un morceau. Je le regarde différemment, comme après des heures et des heures de discussions, des choses jamais dites à qui que ce soit ; les verres resteront les confessionnaux des poètes et des musiciens, même au bout du chemin.  

- Et toi, mon ami, qui es-tu ? Tu m'as réconforté, parlé d'espoir, de poésie, de feu, de fantômes...toi aussi tu as des douleurs, tu as perdu des gens que tu aimais sans doute. Comment tu es revenu de ça, aussi vite ? Tu as un secret ? Tu parles en ligne directe avec le Grand Robinet qui nous lavera tous ? Tu dis que tu aimerais être comme moi, mais depuis le début, c'est moi qui te jalouse ; moi qui vampirise ton inspiration...tu dois avoir un secret, ou alors...ou alors beaucoup de mezcal ! Dis-moi deux trois fois ta vie dans le passé, mon ami. Je suis certain que sur la route des artistes, tu as laissé quelques godasses gonflées de belles choses.
 
Typhon
   
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Commentaires [L'Immeuble - appartement 601] - Imanuel Davis Ferreira  Screen12
 
Teófano Riviera
   
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Chamanii a écrit:

[Imanuel Davis Ferreira]

Eh non, mon ami, je n’envie pas tes pleurs. Pardon, je parle mal ; je t’ai induit en erreur, avec mes histoires de « belles larmes ». Tu as raison, il n’y a pas de belles larmes ; mais tu as la blessure, pour porter les armes ; ta poésie peut-être. Pour se servir d’une arme, il faut… il faut… avoir perdu un bras, ou un cœur ! Une amie ou une sœur ! Moi… je n’ai que moi à tuer. Imanuel marmonne pour lui-même : et peut-être Montes aussi. Peu importe ! Moi, j’ai fait du mal à ceux que j’aimais. J’ai été arrogant et capricieux, je mérite mes larmes. Je dis que je dois tuer Montes, mais – en vérité – ce n’est pas mon combat ! Je suis lâche comme mon père ! Et de Dieu, je ne connais rien – je ne connais rien – j’ai même cru qu’il m’aimait ; que j’étais un de ses favoris. Ha ! Je ne suis qu’un misérable et… vaniteux. Il se recroqueville sur lui-même en disant cela, et fait mine de se poignarder le ventre à plusieurs reprises. Ha ! Je suis lâche ! J’avais tout ! Pour être heureux, mais, surtout, pour rendre heureux. Il se redresse et posant à nouveau ses mains sur les épaules de Riviera, lui annonce dans un chuchotement rêche : si tu me dis que tu veux te jeter dans le Tenorio, non ! Laisse-moi y aller à ta place ! Je le fais pour toi ! Toi ! Tu as un combat à mener ! Toi ! Tu peux être un porteur de lumière ! Tu as le droit ! Et tes mots ! Et tes mots… Ça ! …c’est une belle arme ! …Sedoso. Sedoso… Fais-moi sauter ce barrage ! Ah non… il a déjà cédé… Sedoso… Tes mots… Ils peuvent sauver des gens, ils peuvent les aimer, ils peuvent être les drums qui leur donnera courage, qui les feront marcher, danser ! Pourquoi les drums – c’est que je l’aimais tant (le mien), lui aussi je l’ai laissé tomber – tu serais un chef d’orchestre, Sedoso ! Avec tes poèmes ! Un guérisseur ! Un chamane ! Tiens, j’en ouvre une autre ! Le soir commence à tomber. C’est peut-être la lune, ou les étoiles ; et puis la nuit, c’est là, qu’on voit les fantômes. Dis-moi que je ne suis pas fou ! Qu’il y a ici… une porte, vers ce que l’on croit, ce que l’on demande chaque jour, chaque nuit, une porte vers les rêves. S’il y a des fantômes-poétesses alors tout est possible.


- La poésie n'est pas une arme, c'est une caresse qui peut aller n'importe où. C'est notre secret, car elle est tellement plus efficace que la plus terrible des armes que...que les crétins en font soit une industrie, soit une mode du passé, sans la comprendre ; sans rien comprendre d'elle. Il faut avoir autant perdu que donné, en poésie, autant oublier le monde que soi-même, y revenir, comme à la surface d'un océan tapageur. Ne pas craindre les allers-retours. Y aller en vacances. Tu connais cette remontée en apnée, n'est-ce pas ? C'est ce que tu joues ; c'est à ça qu'on s'est reconnu.

Je regarde l'ange qui semble s'en vouloir de quelque chose. Je l'ai dit, nous regrettons d'avoir survécu, nous sommes des monstres ; ceusses qui n'ont pas rejoint leurs morts, leurs familles ; nos amours. Et pour ça, il n'y aura aucune rédemption paisible. Tout ira se purger dans la violence. Il y aura ceux qui l'accepteront, et il y aura les autres. Je le laisse dévaler les pentes de ses adjectifs-miroir ; ça fait toujours du bien. C'est à son tour d'affronter son monstre. On a peut-être survécu au fleuve pour ça, espérer un deuxième ticket ; terminus Purgatoire. Les repêchés du caprichoso. Les damnés du Tenorio. Je le regarde et je comprends pourquoi j'ai pleuré en l'écoutant l'autre soir. On est pareil ; l'envie d'en finir, le dégoût de sentir la pulsation de la vie en nous, les erreurs en écharpe, le remords en carburant. Tout nous rassemble. Je lui prends la main droite, yeux dans les yeux, avec ce feu dont il me parlait, ce feu qui brûle quand il pleure, quand il parle, quand je sens battre son âme avec la fougue et l'énergie de tout un orchestre...mais mal dirigé. Quelle âme est sans défaut, après avoir connu le Déluge et la perdition ?

- Personne ne mérite de pleurer parmi le peuple. Ni toi, ni moi. Comme personne ne méritait de mourir. Sauf les responsables de tout ça. Oui, tu peux te plaindre autant que moi, oui nous avons été arrogants, capricieux, d'une lâcheté sans pareille. Oui nous sommes tous misérables et vaniteux. Nous avons volontairement laissé les clés du paradis à une bande de mafieux, des petites frappes, des salopards de fond de chiottes comme le monde en connaît rarement. Tous à se tenir les coudes, tous à manipuler, magouiller, apparaître dans les médias, faire les beaux et les propres sur eux. Tu dis que ce n'est pas ton combat, mais c'est la plus grande lutte de toute ta vie qui se présente à toi, à nous tous ! Et tu essaies de regarder ailleurs ! Mon combat personnel, c'est retrouver les miens. Rien à voir avec le combat que je mène tous les jours. Que tu peux saisir toi aussi, si tu le veux. Soit tu continues de jouer toute la journée de la trompette, soit tu prends à bras-la-trompe ta part de boulot. Et les soirs seront des festivals d'étoiles fières, les nuits seront nos plus beaux souvenirs. On y laissera notre peau, assurément, mais pas sans y tricoter quelques médailles de poésie. Des caresses de feu et d'or.

Je ressers deux verres de mezcal. Je n'ai même pas envie d'essayer de le convaincre. Je ne peux recruter personne, car le combat qu'il faut mener, c'est à chacun de le trouver sur son chemin ; d'y poser les causes, les dieux et nos photos de famille. Je crois qu'il est parti quelque part, et je crois que je l'ai suivi.

- Tu n'es pas fou. Il y a en nous, à l'extérieur, au fond de la Terre, au bout du ciel, des portes, partout. Il n'appartient qu'à toi, qu'à nous les pauvres échoués d'Aguacope d'aller les ouvrir. D'y rencontrer ce que l'on souhaite, d'y rester, même de les refermer à un moment. Tout est possible, non seulement les fantômes, les poétesses, mais aussi des musiques qui leur parlent, des poèmes pour chaque goutte d'eau, des vers pour toutes les vies prises par le courant. Ce sont d'abord des rêves, croit-on, mais on peut les tenir entre nos mains, si on le souhaite assez fort, si on y croit. Ce n'est pas une pensée magique, c'est la magie elle-même ; c'est déjà ce que tu fais avec ta musique. Si tu meurs, qui montrera cette porte, qui osera s'aventurer à la place où tu dois aller ? Nous sommes les plus utiles des misérables et de tous les lâches, trouve ta place et n'oublie pas de pleurer, au moment propice. Le recueillement, voilà tout ce qui nous distingue de toute cette clique qui tombera dans le sang et les roses.

Un autre cul-sec pour la route. Je ne sais pas si je veux être guérisseur ou chamane. J'aimerais que toute la classe politico-mafioso-révolutionnaire n'ait qu'un seul cou, à deux mètres de moi et de ma hache sur-aiguisée. C'est mon souhait le plus ardent.
 
Le Concierge
   
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Glisse un mot sous la porte

Si vous ne cessez pas la trompette, je vous vire.

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Commentaires [L'Immeuble - appartement 601] - Imanuel Davis Ferreira  20231011

(trompettez zapata demain à minuit !
il vous attendra à la fenêtre.)
 
Luz
   
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(un grappin a été déposé sur le balcon pendant la nuit.)
 
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 Commentaires [L'Immeuble - appartement 601] - Imanuel Davis Ferreira

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