Nombre de messages : 750 Âge : 24 Localisation : France Date d'inscription : 06/07/2016
Trôme/ Le Chevalier sans épines Lun 11 Nov 2024 - 11:47
Bonjour tout le monde,
Hier, j'ai eu l'occasion de regarder un entretien de Jean-Philippe Jaworski sur la chaîne Youtube Café Rôliste (lien ci-dessous) :
Lors de cette interview, Jaworski décrit la relation d'interdépendance, voire d'influence entre l'écriture d'un scénario de jeu de rôle (Tiers Âge, Te Deum pour un massacre) et celle d'une nouvelle ou d'un roman (Janua Vera, Gagner la guerre). À l'origine, le Vieux Royaume a été conçu comme un univers pour le jeu de rôle avant d'être transposé en cadre diégétique pour la fiction littéraire. Bon nombre d'auteurs dans le milieu de la SFFF francophone ont également pratiqué le jeu de rôle (Pierre Pevel, Estelle Faye, Raphaël Bardas, Lionel Davoust, etc) et je sais que plusieurs écrivains-rôlistes fréquentent également ce forum.
Cependant, je suis également tombé sur deux articles qui, j'ai l'impression, tendent à opposer ces deux pratiques d'écriture : Reconnaître le rôliste derrière l'écrivain de fiction sur le blog de Stéphane Arnier, ainsi que Le piège des jeux de rôle sur le site Le Fictiologue.
Stéphane Arnier a écrit:
J’ai été meneur de jeu pendant une bonne quinzaine d’années, auteur de scénarios, animateur de forum roleplay. Je l’ai même susurré ici et là, je suis présentement en train d’écrire un jeu de rôles (c’est le projet qui m’occupe le plus cette année). De Jean-Philippe Jaworski à Estelle Faye, de Lionel Davoust à Raphaël Bardas à… à peu près qui tu veux (n’est-ce pas Julien Hirt ?), une grande partie des auteurs qui font l’imaginaire français d’aujourd’hui ont au moins joué un peu. La passerelle semble logique. Lorsqu’on est un meneur de jeu expérimenté et/ou un auteur de scénario habitué, on sait créer des aventures liées entre elles pour former des campagnes, imaginer et interpréter des personnages, bâtir des univers entiers. Et pourtant, même si ce sont des activités cousines, il y a une profonde différence entre l’écriture pour un jeu de rôles et l’écriture d’un roman de fiction.
Julien Hirt a écrit:
Écrire pour les jeux de rôle, c’est très différent d’écrire de la fiction traditionnelle. Pour commencer, rédiger un scénario, ça ne consiste pas à raconter une histoire, puisque celle-ci va être créée et vécue lors de la partie, mais ça consiste plutôt à esquisser un potentiel d’histoire. On décrit une situation de base, un incident initial, un personnage qui poursuit un but, une crise ; on ébauche une séquence d’événements qui peuvent se produire ; on décrit des lieux et des personnages secondaires qui peuvent être appelés à faire leur apparition dans l’histoire. Tout cela est ensuite utilisé pour alimenter la partie, en fonction des choix des joueurs, sachant que souvent, une bonne partie de ce qui était prévu dans le scénario se produit, mais parfois, on s’en éloigne complètement.
Qu'en est-il de votre côté ? Votre pratique du jeu de rôle a-t-elle imprégné la conception de vos romans ? Considérez-vous votre expérience rôlistique comme fructueuse dans votre processus littéraire ? Ne craignez-vous pas de tomber dans certains pièges d'écriture inhérents au jeu de rôle dans la rédaction de vos romans ?
Nombre de messages : 225 Âge : 46 Localisation : Wenzhou - Chine Pensée du jour : À vérifier demain Date d'inscription : 18/02/2024
Valatha/ Autostoppeur galactique Lun 11 Nov 2024 - 13:05
Bonjour,
Ma première écriture (feuille A4 avec un crayon… environ 160 pages) était vers mes 12 ans après avoir joué à Dungeon & Dragon (équivalent à). L’histoire de mon livre était de donner une prolongation de la vie de mon personnage que je jouais.
Pour répondre à tes questions : 1 – Écrire n’a jamais été mon objectif. Simplement que j’ai un truc à dire, et cela depuis toute ma vie, et je me devais de trouver le comment le dire.
2 – Raconter une histoire, c’est raconter une histoire : une blague, un livre, un film, un scénario d’un jeu de rôle, conteur : il faut toujours se préoccuper de celui ou celle qui va écouter ou lire et toujours se poser les questions « Qu’est-ce que je veux dire à l’autre ? », « Qu’est-ce que je veux faire voir à l’autre ? », « Qu’est-ce que je veux faire vivre à l’autre ? »
3 – Tout le reste n’est pour moi que détail.
Conclusion : chaque moyen de raconter une histoire peut et devrait s’influencer les uns les autres. Puiser chez l’autre médium, la chose qui va rendre notre médium plus magique.
En espérant donner une information pertinente sans insulte ou préjugés. Merci beaucoup.
Nombre de messages : 37 Âge : 27 Pensée du jour : Heart's fly Date d'inscription : 10/11/2024
Yunaka/ Petit chose Lun 11 Nov 2024 - 17:43
Bonjour,
J'ai repris l'écriture en commençant par celle d'un JDR, et je comprends les points de vue de Stéphane Arnier et Julien Hirt.
Dans le JDR, on ne crée pas une histoire fixe. C'est plutôt la création d'un lore, d'un univers, de personnages, et surtout de pistes à explorer. Là où l'écriture est fondamentalement linéaire, quand il ne s'agit pas d'un ouvrage à vocation ludique (livres dont vous êtes le héros, etc), le jdr doit rester un jeu ouvert à l'imaginaire des joueur.ses qui viendront s'y aventurer.
Pour le moment, la pratique du jeu de rôle dans mes écrits "moins jeux", est à la fois perturbante positivement et un peu négativement.
Le + c'est que j'ai tendance à laisser partir mon imagination comme un jeu, et c'est facile d'imaginer des nouveaux embranchements. Ma façon de créer se complète très bien à l'idée de voir les choses dans ma tête et à trouver des solutions hors des habitudes. Je pense que mon expérience du théâtre et du jdr m'y ont beaucoup encouragé et dans le bon sens
Le - serait que, bah comparé à un jeu, le roman est bien plus linéaire. Je ne peux pas accéder à tous les choix en même temps. J'écris depuis peu de l'écriture plus classique, et peut-être trouverais-je une réponse à cette problématique. Quand j'écris, j'ai envie que mes personnages soient libres de vivre leurs aventures. Et tout comme des joueur.ses, même avec leur propre caractère des personnages ne prendront pas les mêmes décisions selon leur humeur du jour. C'est donc difficile pour moi de faire un choix défini pour eux, et régulièrement ils changent eux même leur propre trame. C'est à la fois merveilleux et perturbant, parce qu'un simple effet papillon d'un seul moment peut tout changer. En tant qu'écrivaine, je me sens plus responsable qu'en tant que MJ où les personnages font leur propre choix, certes avec ignorance souvent de pas mal de choses, mais ça fait partie du jeu. En écrivain, on est un peu la divinité de leur monde, je deviens responsable de ce qui se passe bien ou mal, même si mes propres personnages font leur choix, avec la même ignorance que des joueur.ses.
Pour essayer de recentrer le sujet : je trouve que ce sont deux pratiques différentes, et je serais curieuse de voir des adaptations qui excellent dans le cross media tout en gardant leurs essences.
Trôme a écrit:
Qu'en est-il de votre côté ? Votre pratique du jeu de rôle a-t-elle imprégné la conception de vos romans ? Considérez-vous votre expérience rôlistique comme fructueuse dans votre processus littéraire ? Ne craignez-vous pas de tomber dans certains pièges d'écriture inhérents au jeu de rôle dans la rédaction de vos romans ?
Je dirais donc : - oui, ça m'influence, et pas qu'un peu. Malgré les problématiques que ça crée, j'adore le défi que ça me propose - absolument - j'ai du mal à comprendre cette histoire de pièges (peut être parce que je n'ai pas encore visionné la vidéo partagée). Quels sont ces pièges pour toi ?
Nombre de messages : 4667 Âge : 28 Localisation : Bureau Pensée du jour : Pétit coucou Date d'inscription : 12/05/2012
Radischat/ Dr. Danielle Jackson Lun 11 Nov 2024 - 18:38
Je sais que beaucoup de rôlistes ici ont fait leurs armes sur des forums de RP litt, allez, sortez de votre tanière, je sais que vous êtes là. Parlez-nous de votre expérience.
Pour ce qui est des pièges : l'article cité appuie surtout sur le fait qu'on ne construit pas une histoire de jeu de rôle de la même manière qu'un roman, puisque que le cas "d'utilisation" est différent : pour une session, on va créer un monde plus ou moins ouvert dans lequel les personnages prendront (ou non) des initiatives : ça peut donner lieu à un effet de coquille vide, d'intrigue qui manque d'inertie, ou d'adventure trop expectative, si elle est retranscrite tel quel en roman. Ceci dit, l'opposé de ces arguments sont aussi totalement vrais : ça apprend à créer des mondes, ça apprend à rester flexible dans sa manière de penser, et ça apprend à avoir un rythme dans les péripéties—parce que si un joueur n'a rien à faire, tu vas très vite le sentir en session.
L'article, je pense, omet aussi l'existence de tout un pan littéraire du jeu de rôle qui, pour le coup, est très formateur, comme peut l'être la fanfiction.
Nombre de messages : 50 Âge : 36 Localisation : Suisse Date d'inscription : 25/08/2024
Alyerel/ Clochard céleste Mar 12 Nov 2024 - 8:47
Le jeu de rôle, c'est vraiment ce qui m'a plongé à 200% dans l'écriture. Avant ça, j'écrivais des petits textes courts, un peu de poésie mais rien vraiment sérieusement, ou avec méthode. C'était un peu la foire, avec les vieilles croyances du genre "en écriture, c'est le talent inné qui compte" ou "je n'ai pas de formation littéraire alors ça sert à rien". Oui, ces deux pensées limitantes sont contradictoires, je sais, mais à 15 ans on écoute un peu trop tout et n'importe quoi
Quand j'ai découvert le jeu de rôle, c'est un peu comme si toutes les barrières que je m'étais mises tombaient. Dans un sens, ça m'a libéré et permis d'explorer énormément de choses en écriture. Et ça été très très formateur aussi, tant sur la création d'univers, des personnages, le côté théâtrale/impro, le sens de l'adaptation, l'ouverture d'esprit...
Par contre, le jour où j'ai voulu transposer tout ça à un roman, eh beeeeh je me suis assez vite rendu compte que ça n'allait pas le faire. J'avais préparé mon premier roman comme je préparais un forum RP. Sauf que ça n'a pas suffit et je me suis très vite retrouvée bloquée dans le scénario par ma méthode très "architecte" (en plus d'être frustrée d'avoir une ligne trop directrice de laquelle j'osais peu m'écarter). Là où ça me permettait de me cadrer et ne pas partir dans tous les sens en jeu, côté roman, ça me cadrait beaucoup trop justement.
Il a fallu deux romans pour trouver comme gérer autrement, pour lâcher prise sur ma façon de travailler et mettre de côté la méthode JDR pour quelque chose de plus adapté à mes envies côté roman.
Je n'ai pas encore regardé les vidéos, mais je le ferai avec plaisir. Le sujet m'intéresse beaucoup, forcément Alors merci pour ce partage !
Nombre de messages : 13 Âge : 45 Date d'inscription : 25/05/2024
Alya Frag/ Homme invisible Mar 12 Nov 2024 - 21:37
Coucou Pour ma part je pense que les jeux de rôle ont aiguisé mon imagination, j’ai commencé à jouer assez jeune car ma sœur ainée jouait à Donjons et dragons. C’est plutôt du coté joueur et pas MJ que j’ai passé de nombreuses heures à écrire. Chaque personnage que j’ai créé avait un passé, une famille, des anecdotes, je les dessinais ou quand je n’y arrivais pas je découpais des photos de mannequins du magazine de la redoute pour illustrer ma fiche de perso (oui, bon on fait ce qu’on peut). Résultat au bout de quelques années, nos personnages avaient des histoires dignes des feux de l’amour. En tant que MJ cela m’a appris à structurer des éléments moi qui suis particulièrement bordélique. Plus tard j’ai fait du RP également et je pense que tout ces univers ludiques ont forgé ma façon d’écrire très certainement et mon affection pour le médiéval fantastique aussi
Invité/ Invité Mer 13 Nov 2024 - 0:16
Certains auteurs de fantasy parlent de ces errements en interviews, je pense notamment à Raphaël Bardas. D'après lui, il a perdu des années à vouloir présenter son univers dans son roman. Trop dense, il en a ensuite fait une trilogie. Avant de se rendre compte qu'il fallait avant tout raconter une histoire. Il est donc revenu à un tome unique qui fut sa première publication.
Ce défaut était courant dans la fantasy française d'une certaine époque mais les éditeurs sont plus vigilants là-dessus qu'autrefois.
Nombre de messages : 1263 Âge : 37 Date d'inscription : 11/07/2022
Mika/ Tentatrice chauve Mer 13 Nov 2024 - 0:57
Je suis aussi rôliste, ce qui fait que je suis toujours surprise quand on me dit que mon roman de fantasy est inspiré de Tolkien. Car non, il est surtout inspiré du jeu de rôle
Nombre de messages : 163 Âge : 46 Date d'inscription : 28/03/2022
Gernier/ Tycho l'homoncule Mer 13 Nov 2024 - 22:31
Je suis rôliste depuis longtemps. Et Maître de Jeu... L'approche entre l'écriture et je JDR est différente. Pour mes scénarios, je créé un décor et des personnages avec lesquels les joueurs peuvent agir. C'est ouvert.
Pour les romans, je suis plus dans la dramaturgie pure. Pourtant le point commun demeure de se surprendre (ou d'être surpris) et de s'amuser. L'improvisation aide à conserver toutes les options narratives sur la table.
Je ne suis plus un fana de la "construction d'univers" dans laquelle je me suis un peu perdu. Maintenant, je l'improvise en fonction de la narration et de ce dont j'ai besoin. Je ne conserve qu'une sorte de "Tagline" esthétique et fonctionnel pour celui-ci (du genre, dans celui-là, tout doit être vieux, sale et la magie ne fonctionne plus que de manière très hypothétique...)
Écriture romanesque et jeu de rôle
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