Non, je ne suis pas un expert de l’édition mais je déteste entendre ressasser ce poncif qui voudrait que seuls les gens “pistonnés” (ou connus ou…) peuvent trouver un éditeur. Il se trouve des gens pour répéter ça à longueur de forums ou réseaux sociaux. Naturellement ils connaissent quelqu’un que côtoie leur belle-soeur qui a fait un stage chez Galligrasseuil qui leur a dit que… D’un fait - sans doute vrai - ils tirent une généralité. Je me fous de savoir si une vedette de la TV a - elle - été éditée sans talent, c’est l’inverse qui m’intéresse : peut-on être édité en étant un quidam ?… Mieux : peut-on être édité en envoyant son manuscrit par la poste ? Evidemment que oui, j’en suis la preuve et je vais vous raconter tout ça.
Je tiens tout de suite à préciser plusieurs choses : je ne connaissais personne dans l’édition avant de trouver un éditeur pour mon premier roman ; je n’ai personne de connu dans ma famille ou mon entourage ; je n’ai pas fait d’études littéraires et je n’ai surement aucun talent particulier. Et en plus j’ai écris mon premier roman à plus de 40 ans ! Pourquoi si tard ? D’abord parce que j’avais une vision fausse de l’écriture. J’ai toujours voulu raconter des histoires, mais je pensais l’écriture de romans réservés à des érudits, passionnés de littératures, qui lisent Proust ou Joyce tous les soirs, etc. Bref, je ne me sentais pas légitime pour écrire… Le meilleur remède à ça, c’est de lire, beaucoup si possible, et des mauvais livres dans le lot. Vous verrez que pour être édité il ne faut pas forcément du talent, mais déjà de l’audace. Ecrire c’est juste raconter une histoire ; si on a quelque chose à dire, il faut se lancer. Au final ça sera bon ou pas, mais au moins on le saura, une fois pour toute. Et en plus il y a plein de mauvais livres édités, alors autant que ce soit les vôtres. Je soupçonne d’ailleurs les médisants cités précédemment de n’avoir même pas réellement essayé d’aller au bout de leur désir d’écrire. Vouloir écrire ne fait pas de vous un écrivain, écrire oui.
Bref, à 40 ans passés, un problème de santé m’a coupé du monde professionnel où j’étais bien peinard. Coincé chez moi, physiquement (et intellectuellement) diminué, sans espoir de rebondir de sitôt, sans autre ressource que Pôle Emploi. Finalement un mal pour un bien, plus rien à perdre, du temps à revendre, l’occasion rêvé pour essayer - enfin - d’écrire un livre. Pour être franc, j’ai déjà écrit des ouvrages techniques, mais ça n’a pas grand chose à voir. Là, si je ne le faisais pas, je n’avais vraiment aucune excuse… Donc je l’ai fais. Comme je trouve la littérature jeunesse très dynamique, je me suis lancé dans un roman jeunesse. Comme j’ai les pieds plutôt sur terre, je me suis axé sur un récit court (50 000 signes, environ 80 pages) pour commencer. Au moins j’avais des chances d’aller jusqu’au bout… A l’époque (2016), je voulais m’acheter un Solex, mais c’était alors une dépense pas super raisonnable dans ma situation. Donc je me suis dit que si j’arrivais à écrire un livre qui parle de Solex, je m’autoriserai à en acheter un. Comment j’ai procédé ? Pas du tout comme il faudrait… En tous cas pas comme on présente souvent les choses : écrire un synopsis, des fiches de personnages, puis une première version puis… Que nenni ! Du balais tout ça ! De l’improvisation, de la première ligne à la dernière ! C’est la seule façon de ne pas s’ennuyer pendant ce long parcours qu’est l’écriture. J’avais déjà essayé d’écrire des scénarii ( de BD, de film, …) dans ma jeunesse et le processus d’écriture était toujours long et laborieux. Je ne voulais retrouver ça pour rien au monde. Donc j’ai essayé l’impro… et j’ai vite su que je devais (moi) fonctionner comme ça. Du pur bonheur ! Je relisais chaque jour le chapitre de la veille et revenais donc peu sur ce que j’écrivais. L’écriture a duré environ un mois (de mémoire), sans aucune difficulté. Le jour même où j’ai mis le mot Fin j’ai acheté mon Solex (je m’en souviens, c’était un samedi). Au final j’étais étonné de la facilité d’écrire ce mini roman. C’était vraiment comme un déclic, tout improviser m’avait ouvert une porte incroyable. Je ne ferais désormais plus que comme ça.
Restait à savoir ce qu’il valait… Parce qu’au final écrire vite et en s’amusant n’est gage de rien. Pas 36 solutions, il fallait envoyer à des éditeurs pour avoir un avis. La famille, les amis, tout ça c’est bien, mais les éditeurs c’est mieux. Non seulement c’est leur métier, mais en plus ils ne prennent pas de gant pour vous dire que ça va pas (la fameuse réponse type “Votre ouvrage n’entre pas dans notre politique éditoriale etc.” signifie que votre truc est trop mauvais pour eux, point). Et comme c’est un service gratuit que proposent les éditeurs, inutiles de se priver ! Si on a de la chance, ils donnent même des conseils. J’ai d'abord tâté le terrain en envoyant à Gallimard (rien que ça). Le nom fait fantasmer, je me suis dit qu’ils devaient être sérieux dans la gestion des manuscrits donc Go ! Et commence alors l’attente d’un mail de réponse…
C’est généralement long (quoique, vous verrez…) mais là, après exactement 6 mois, pas de réponse… Bon signe ou pas ? Pas de règle, mais si l’éditeur affirme toujours donner une réponse, ça peut plutôt être un bon signe… ça signifie qu’après une première lecture, le livre est passé dans d’autres mains pour un autre avis, etc. Un livre vraiment mauvais est abandonné après trois pages et la réponse est forcément plus rapide… Bref, après 6 mois, je me dis qu’ils me “doivent” une réponse… je relance (après 6 mois c’est pas du harcèlement…) et je reçois une réponse 3 jours plus tard (mon livre ou sa réponse avait quand même dû rester coincé quelque part, j’ai donc bien fait de relancer…). Une réponse… négative. Évidemment diront certains, un premier livre, écrit à la va-vite, etc. Oui une réponse négative, mais très argumentée, pleine de compliments, pleine d’encouragements. J’avais au moins ma réponse : mon bouquin valait quelque chose ! Donc je devais insister, chez d’autres éditeurs, tout simplement.
Alors j’ai listé les éditeurs jeunesses susceptibles d’être intéressés par le format. j’ai envoyé (par mail ou par courrier). J’ai eu beaucoup de refus, c’est normal. Souvent argumentés aussi. Et finalement, j’ai eu une demande de RDV avec l’éditeur La palissade (https://lapalissade.fr/) seulement 3 jours après l’envoi du manuscrit ! Vous voyez, ça peut être rapide aussi… C’était pas un “oui” mais une prise de RDV… Le reste est facile à deviner : rdv, contrat, corrections (surtout d’orthographe…)... Le livre a mis pas mal de temps à sortir (mai 2019) il faut être patient dans l’édition…
Le livre connaît sa petite vie autonome désormais. Moi j’ai écris 3 autres romans jeunesse depuis (de toutes les tailles) et je galère encore à leur trouver un éditeur (j’ai souvent des refus argumentés, mais des refus quand même)... Je suis reparti dans l’écriture de scénarios BD aussi, et je lorgne du côté de la SF (adulte) depuis quelques temps. Même si je ne ferai pas carrière dans l’écriture, je peux le dire haut et fort : on peut être édité en étant complètement inconnu ! Chez un vrai éditeur (avec avances sur droits, etc.) ! Si ! Et tant pis pour l’avis de votre belle-soeur…
Si vous voulez en savoir plus sur ce premier roman : https://lapalissade.fr/catalogue/operation-solex/
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